Intervention de Catherine Lemorton

Réunion du 29 octobre 2014 à 9h35
Commission élargie

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCatherine Lemorton, présidente :

Il s'agit, en effet, d'une ligne budgétaire très importante, ainsi que notre rapporteure pour avis, Mme Véronique Massonneau, l'expliquera. Dans notre société, qui va mal, l'accès au logement est essentiel pour les personnes rendues très vulnérables par la perte de leur emploi ou le manque de moyens, mais aussi par le handicap ou la perte d'autonomie. D'ailleurs, la question de l'adaptation du logement revient régulièrement dans les débats de notre commission des affaires sociales. On ne peut se sentir citoyen que si l'on a un logement.

M. Christophe Caresche, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, pour l'égalité des territoires et le logement. Cette mission s'inscrit dans le cadre des plans de relance pour le logement décidés par le Gouvernement. Elle ne concerne qu'une petite partie des mesures relatives au logement ; les autres, de nature fiscale, notamment toutes celles qui concernent le logement intermédiaire, figurent en première partie de la loi de finances.

Si ce budget apparaît en forte augmentation, celle-ci est en grande partie due à une modification de périmètre, avec la rebudgétisation des crédits de l'APL, gérés jusqu'à présent par les régimes sociaux. À périmètre constant, le budget du logement augmente de 437 millions d'euros, soit plus 5 % par rapport à 2014, sous le double effet de la progression naturelle des deux aides personnelles au logement, l'APL et l'allocation de logement familiale (ALF), financées par le Fonds national d'aide au logement (FNAL), en croissance de 519 millions, et du nouveau renforcement, de 68 millions, des crédits dédiés à l'hébergement et à la veille sociale.

L'objectif de production de logements sociaux est affiché à 150 000, mais une partie de la mission ayant été redéployée, notamment les programmes liés à l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), ces derniers sont-ils toujours comptabilisés ? En d'autres termes, l'objectif de 150 000 est-il toujours d'actualité ?

L'article 53 du projet prévoit de faire remonter la participation du 1 % logement au FNAL de 150 à 300 millions d'euros en 2015. Cela ne remet pas en cause le niveau de ses contributions aux politiques nationales. Le plan de rénovation urbaine se trouvant dans une phase de transition, le financement apporté par Action Logement peut être réduit à due concurrence pour maintenir l'enveloppe globale à 1,2 milliard d'euros, comme l'État et les partenaires sociaux en sont convenus pour cet exercice. Cela étant, si la loi pour l'accès au logement et pour un urbanisme rénové (ALUR), votée en mars dernier, a prévu que les emplois de la participation des employeurs à l'effort de construction (PEEC) seraient à nouveau définis conventionnellement et programmés sur cinq ans, les négociations n'ont toujours pas abouti. Où en sont ces négociations entre le Gouvernement et Action Logement, le premier demandant cette année un effort supplémentaire pour le financement du FNAL ?

Par ailleurs, le financement de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) a été assis pour l'essentiel sur le produit des enchères des quotas d'émissions de carbone, qui reste incertain. Le Gouvernement pense-t-il que le marché des quotas suffira à assurer le financement de cette agence, qui jouera un rôle encore plus important après le vote de la loi sur la transition énergétique (LTE) ?

La commission des finances a examiné il y a peu le décret d'avance abondant les crédits pour l'hébergement d'urgence. La dépense a crû de manière très importante ces dernières années. Quelles sont les pistes qui permettraient, tout en répondant aux besoins, de mieux la maîtriser ?

Enfin, s'agissant des APL Accession, qui ont été recentrées sur la sécurisation en contrepartie de l'augmentation importante du prêt à taux zéro (PTZ), je présenterai deux amendements afin d'assouplir le dispositif et d'éviter que cette réforme ne pénalise les bénéficiaires des aides.

M. Daniel Goldberg, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour le logement. La présente période est marquée par une baisse de la production de logements neufs depuis 2011, avec une perspective de 300 000 logements en 2014. Même si l'on constate une légère hausse du nombre de permis de construire ces tout derniers mois, la crise du logement est durable.

Elle provient d'une distorsion entre l'offre de logements socialement accessibles et les possibilités d'y accéder pour beaucoup de ménages. Elle pèse sur les conditions de vie de nombreuses familles, met en difficulté le secteur du bâtiment et nuit à la compétitivité de notre pays. Face à cette situation, le Gouvernement a pris des initiatives, avec les plans de relance de la construction, qui trouvent leur traduction dans le présent budget. Trois leviers sont actionnés : le développement du logement intermédiaire, le renforcement de l'accession à la propriété et la garantie de la solvabilité des ménages locataires.

Le développement du logement intermédiaire sera un outil essentiel. Le dispositif d'investissement locatif est plus assoupli, mais il devra, selon moi, être modifié en vue d'éviter les effets d'aubaine. Des fonds d'investissement seront créés, notamment un fonds public entre la Caisse des dépôts et l'État, et le prêt à taux zéro sera renforcé.

S'agissant de l'APL Accession, l'article 52 du projet propose de sécuriser les parcours plutôt que d'accorder l'aide à tous les accédants sous condition de ressources, ce qui entraînera un gain de 20 millions d'euros pour l'État. Des études ont-elles été réalisées pour évaluer les risques de réduire la solvabilité des nombreux ménages accédants modestes ? Par ailleurs, je souhaite que, dans le cadre des prêts sociaux de location-accession (PSLA), les locataires accédants continuent de bénéficier d'une aide dans la phase locative.

Nous savons que la dépense des aides au logement n'est pas soutenable à long terme : avec 18 milliards d'euros en 2015, dont 13,8 milliards pour le FNAL, elle est en forte augmentation. Il conviendra d'examiner si, pour les logements neufs ou nouvellement mis en location, des contraintes en termes de niveaux de loyer ne devraient pas être imposées.

Le logement social joue un rôle contracyclique : la production de logements sociaux a, dans un contexte de baisse de la construction, augmenté de 14 % ces dernières années, atteignant 117 000 nouveaux logements en 2013. La baisse des crédits d'État constatée dans ce budget est contrecarrée par la montée en puissance du soutien fiscal au secteur du logement social et par un effort de mutualisation des organismes de logement social.

Les aides à la pierre disparaissent pour les logements concernés par les prêts locatifs à usage social (PLUS), afin d'être concentrées sur les logements des prêts locatifs aidés d'intégration (PLAI). Je souhaiterais que l'on réfléchisse aux moyens d'assurer une plus grande fongibilité des aides, pour que celles qui ne sont pas utilisées sur une partie du territoire puissent l'être ailleurs. Autre soutien au logement social, le taux réduit de TVA à 5,5 % sera prorogé par un amendement.

Des mesures importantes sont prises sur le foncier. Un amendement a notamment permis d'étendre les efforts fiscaux aux terrains bâtis sur lesquels se trouvent des constructions appelées à être démolies.

L'hébergement d'urgence souffre d'une sous-budgétisation chronique. La situation appelle une réforme en profondeur qui envisage une redéfinition des publics bénéficiaires mais aussi mette fin aux plans hivernaux et stabilise les capacités d'hébergement, notamment par l'augmentation des capacités des centres d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS).

Je souhaite, enfin, que les engagements de l'État en matière de lutte contre l'habitat indigne et en faveur de l'ANAH, inscrits dans la loi de mobilisation pour le foncier public et la loi ALUR, soient tenus.

J'émets un avis favorable sur ce budget.

Mme Véronique Massonneau, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales, pour la prévention de l'exclusion et l'insertion des personnes vulnérables. La loi de finances initiale pour 2014 a été l'occasion d'un effort important de réévaluation des crédits du programme 177, pour mieux prendre en compte l'évolution des crédits consommés chaque année. Ce rebasage était particulièrement bienvenu. J'ai cependant constaté combien les besoins allaient croissant. Aussi, pourriez-vous, madame la ministre, nous indiquer de combien l'enveloppe adoptée pour 2014 sera dépassée ? Comment anticipez-vous, par ailleurs, les besoins pour l'année prochaine ? Autrement dit, dans quelle mesure l'enveloppe proposée dans ce budget sera-t-elle dépassée ?

En ce qui concerne l'utilisation des crédits de ce programme, je constate la stagnation, depuis 2010, des places en centres d'hébergement d'urgence (CHU) et en CHRS. Notre pays est ainsi conduit à héberger un nombre croissant de personnes à l'hôtel. J'ai bien conscience que cette forme d'hébergement coûte en moyenne un peu moins cher ; cependant, nous sommes tous d'accord pour considérer qu'elle n'est pas satisfaisante. Le nombre de personnes hébergées à l'hôtel ne cesse de croître et les personnes relevant de l'hébergement d'urgence ont de plus en plus de difficulté à en sortir et à accéder au logement social. Comment comptez-vous redynamiser les formules d'intermédiation locative ? Envisagez-vous de nouvelles mesures pour débloquer cette situation ? Le soutien aux dispositifs passerelles vers le logement ne doit-il pas être renforcé ? Des investissements seront-ils consentis pour disposer de structures pérennes ? Par ailleurs, dans une situation de forte tension budgétaire, comment maintenir les moyens nécessaires pour proposer un véritable accompagnement social ?

J'ai constaté, par ailleurs, que les populations relevant du programme 177 changeaient fortement : un nombre croissant de demandeurs d'asile déboutés sont ainsi pris en charge par les crédits de l'action 12 « Hébergement et logement adapté ». Or le Gouvernement a engagé une réforme de l'asile : pourriez-vous nous indiquer comment vos services anticipent l'impact de cette réforme sur l'hébergement d'urgence ?

Dans mon rapport, j'ai choisi de m'intéresser à l'accompagnement des gens du voyage. Le fonctionnement et l'entretien des aires d'accueil est financé par le programme 177, au titre de l'aide au logement temporaire, dite ALT 2, et leur aménagement l'est par le programme 135. Le programme 177 finance également des actions d'accompagnement social, en subventionnant notamment le milieu associatif. La loi Besson du 5 juillet 2000 n'est que très partiellement mise en oeuvre : près d'une place sur deux prévus par les schémas territoriaux d'accueil des gens du voyage est effectivement aménagée, dans des conditions assez variables en termes de qualité. Comment le Gouvernement compte-t-il faire évoluer cette situation ? Il s'agit de faire appliquer la loi.

La réforme de l'ALT 2 conduira à la modulation d'un tiers de cette aide, qui sera versée en fonction de l'occupation réelle des places. La subvention versée à certaines aires allant par conséquent diminuer, l'économie ainsi obtenue pourrait-elle être reversée pour partie afin de financer des actions d'accompagnement social ? Cela permettrait, entre autres, de proposer un soutien accru aux associations têtes de réseaux. Des programmes spécifiques, portant notamment sur l'accompagnement scolaire et l'alphabétisation, me semblent en effet indispensables. Je resterai vigilante sur les prochains textes concernant ces populations fragiles.

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