Intervention de Alain Vidalies

Réunion du 19 novembre 2014 à 9h45
Commission des affaires économiques

Alain Vidalies, secrétaire d'état chargé des transports, de la mer et de la pêche :

Ayant abordé les questions relatives aux transports hier devant votre Commission du développement durable, je ne les aborderai pas de nouveau ici, malgré leur importance, notamment pour ce qui touche au développement des autoroutes ferroviaires que M. Chassaigne s'est interdit d'évoquer.

En ce qui concerne notre sujet, la pêche, je répondrai tout d'abord à M. Mesquida et à plusieurs d'entre vous sur le thon rouge. C'est effectivement un beau et bon sujet, dans la mesure où la décision prise est le résultat des efforts internationaux visant à reconstituer les stocks. Nous sommes partis d'une situation catastrophique qui a conduit, à partir de 2006, avec beaucoup de difficultés pour les pêcheurs, à de très fortes restrictions. Or, alors que les stocks étaient évalués à l'époque à 150 000 tonnes, ils seraient remontés, à croire les scientifiques, à près de 600 000 tonnes aujourd'hui ; je suis d'autant plus surpris des réactions de certains que ce renouvellement s'est produit avec sept ans d'avance. Face à ce constat, une décision a été prise hier au niveau européen, qui correspond à ce que la France avait souhaité, à savoir une augmentation des quotas de 20 % chaque année pendant les trois prochaines années. C'est une décision responsable, courageuse et cohérente, et je ne comprends pas la position de ceux qui soutiennent qu'il faut maintenir des quotas très bas : à les entendre, puisque cela marche, il faut continuer à ne pas pêcher… Il fallait choisir entre trois positions : d'un côté, ceux qui voulaient en rester à des quotas très bas ; de l'autre, ceux qui réclamaient aussitôt des augmentations de 45 % ; la position de la France, qui a rejoint celle de la Commission, a été de tirer les conséquences de la reconstitution considérable des stocks, et c'est la bonne formule. L'augmentation décidée ne sera pas, d'ailleurs, de 20 % mais de 18 %, à la suite de la renégociation des quotas au sein de la commission internationale, avec des pays demandeurs comme l'Algérie et la Libye. La méthode qui consiste à protéger la ressource lorsque c'est nécessaire, parfois au prix de gros efforts, doit, lorsqu'elle réussit, se traduire par un retour le moment venu, et donc par une amélioration de la situation des pêcheurs.

Pour ce qui est de la découpe des ailerons de requins, la France est aux côtés des opposants à cette pratique. Nous sommes également en discussion sur le cas du thon tropical – qui n'a rien à voir avec le thon rouge. Le mode de pêche traditionnellement utilisé, compte tenu du comportement du thon, consistant à concentrer fortement les poissons, s'est beaucoup industrialisé ces dernières années ; il en viendra à poser rapidement des difficultés et devra, dans un cadre national, être limité.

Sur la question du renouvellement des navires, monsieur Fasquelle, j'avais repris pratiquement mot pour mot vos préoccupations dans mon propos liminaire. J'ai indiqué que nous attendions d'ici à quelques jours un rapport commun de l'inspection générale des affaires maritimes et de l'inspection générale des finances, que je rendrai public. Je saisirai les parlementaires et les professionnels. Sur les rejets, j'ai également précisé qu'il fallait nous donner au moins pour objectif de neutraliser le coût de la manutention supplémentaire. Ce travail est en cours ; les avis scientifiques sur le sujet montrent que la question est complexe.

L'État finance l'IFREMER pour les programmes de recherche sur la sélection génétique. S'agissant de la mortalité ostréicole, nous devons mener une réflexion sur les fonds assurantiels, dont le principe est permis au sein du FEAMP. C'est dans ce cadre qu'il nous faudra donc travailler, avec les professionnels, à l'élaboration de l'outil approprié.

La question sanitaire relève du ministère de l'agriculture, mais mon administration reste vigilante. L'État consacre 600 000 euros, aux côtés de l'Europe et des régions, au financement de la recherche. Les résultats sont plutôt encourageants, mais je ne veux pas en dire davantage au risque de créer de fausses joies : des vérifications complémentaires doivent encore être réalisées.

L'organisation de la pêche à la coquille Saint-Jacques dans la Manche relève d'un accord entre la France et la Grande-Bretagne, pour prévenir les incidents entre pêcheurs de nos deux pays. Les représentants professionnels restent globalement satisfaits de cet accord, même s'il s'est produit encore quelques heurts. Mais il ne faut pas oublier que nous sommes dans un cadre très particulier, celui d'un accord bilatéral et non dans l'application du droit européen.

En ce qui concerne l'extraction de sable dans la baie de Lannion, je sais, madame Erhel, que vous avez saisi le ministère de l'économie. Ce dossier relève en effet de sa compétence puisque c'est ce ministère qui est chargé de la signature des titres miniers au nom du Gouvernement. Mais vous avez raison de poser la question : j'ai moi-même demandé, par souci de logique interministérielle, que mon administration soit associée à la démarche, la question de fond étant bien celle de la compatibilité entre l'activité envisagée, et celle du secteur de la pêche et, plus généralement, l'économie maritime. Nous serons bien présents dans le débat.

Vous avez raison, monsieur Chassaigne, de souligner que des économies d'énergie dans notre flotte de pêche sont possibles et même nécessaires. C'est pourquoi un programme d'investissements d'avenir (PIA) a été lancé sur le « navire du futur » ; de son côté, France Filière Pêche finance aussi des projets innovants en la matière. Les perspectives technologiques sont très positives.

Je n'ai aucune information, monsieur Pellois, sur les difficultés de France Filière Pêche dont vous faites état. Cette structure originale – il s'agit d'un fonds privé financé par la grande distribution, au service de la pêche – se réunit à Paris aujourd'hui et je serai présent à cette manifestation. Je n'ai pas eu connaissance de difficultés particulières.

Mes services, madame Fabre, vous adresseront une réponse écrite sur les délais administratifs que vous avez évoqués.

Il n'est pas prévu, madame Abeille, de dispositif particulier sur la TICPE. Si tel était le cas, cela devrait se faire dans le cadre européen puisque c'est régi par une directive. Pour ce qui est du chalutage en eaux profondes, une réunion a eu lieu ; le droit européen continue de s'appliquer. La France a participé à l'élaboration, à Bruxelles, des quotas de pêche des espèces en eaux profondes pour les trois années à venir, selon une procédure identique à celle des autres quotas, après un avis scientifique. Un vote du Parlement européen est intervenu ; la suite logique sera que nous entrions dans une phase de trilogue afin de déterminer, si cela est possible, une position commune.

S'agissant des financements du FEAMP, je considère que l'articulation entre la pêche et l'environnement doit être dans nos discussions avec les professionnels un axe prioritaire. Les intérêts environnementaux rencontrent d'ailleurs les objectifs économiques et sociaux : ainsi que l'ont relevé MM. Fasquelle et Chassaigne, le renouvellement de nos bateaux permettra des économies d'énergie et de frais de fonctionnement.

Sur l'information des consommateurs et la labellisation, madame Batho, le nouveau règlement européen portant organisation commune des marchés (OCM) comporte de nouvelles obligations en matière d'information sur les lieux de vente des produits de la mer. Cette information permettra également d'apporter des précisions sur l'emploi de protéines animales dans l'aquaculture. Nous sommes en discussion avec les professionnels ; le débat est complexe.

Les aires marines protégées sont un élément important du projet de loi sur la biodiversité, porté par l'Agence française de la biodiversité. Je n'entrerai pas dans les détails de questions qui concernent au premier chef ma collègue Ségolène Royal. S'agissant de l'Appel pour la haute mer, la France reste un élément moteur au sein des discussions, un rendez-vous étant prévu prochainement à l'ONU, qui permettra de dresser le bilan que vous appelez fort opportunément de vos voeux.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion