Intervention de Kléber Mesquida

Séance en hémicycle du 8 décembre 2014 à 21h30
Délimitation des régions et modification du calendrier électoral — Article 1er

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaKléber Mesquida :

Les régions Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées sont à la fois très proches et très différents. Avec nos collègues de Midi-Pyrénées, que je salue ici, nous nous apprécions, je dirais même que nous nous aimons d’amitié. Toutefois, Saint-Exupéry n’a-t-il pas dit qu’aimer ce n’est pas se regarder l’un l’autre, c’est regarder ensemble dans la même direction ? Or, le Languedoc-Roussillon regarde la Méditerranée, tandis que Midi-Pyrénées regarde l’Atlantique et Bordeaux. Certes, nous sommes dans le berceau de la langue occitane, mais nous nous tournons le dos. Dès lors, comment regarder dans la même direction ?

Nous avons des politiques de marque. Le Languedoc-Roussillon a la marque Sud de France Méditerranée et Midi-Pyrénées celle de Sud-Ouest de France, associée à l’Aquitaine. Rappelons que Bordeaux est le port naturel de Toulouse. Les deux régions auraient toute légitimité à rester autonomes et je veux, pour vous le prouver, décliner quelques-uns des atouts de notre région. Nous avons un budget de 1,2 milliard d’euros, comparable à celui d’autres régions qui restent isolées. Montpellier Métropole dispose avec Agropolis et le CIRAD d’un pôle unique tourné vers la Méditerranée et le Maghreb. Elle est également à la pointe de la recherche dans les domaines de la santé, de l’eau, de l’agronomie et même dans l’innovation, récompensée par l’obtention du label French Tech.

Le Languedoc-Roussillon dispose également d’une forte économie présentielle, avec la plus forte progression démographique du pays – 30 000 nouveaux habitants arrivent chaque année. Nous avons un tourisme de qualité, mais néanmoins un tourisme de masse, bien différent de celui de nos voisins. Le Languedoc-Roussillon, c’est le plus grand vignoble du monde et d’importantes activités portuaires. Le port de Sète recevra, d’ici à 2020, 300 millions d’euros d’investissements publics – 53 ont d’ores et déjà été réalisés, 60 sont en cours. Port-la-Nouvelle recevra 200 millions d’euros afin de développer de nouveaux trafics.

Alors que le Languedoc-Roussillon, avec Montpellier Métropole, est en situation de pouvoir maintenir son autonomie, son développement et son rayonnement, je veux pointer quelques menaces liées à la fusion. Celle-ci entraînera nécessairement la suppression de doublons de directions régionales. On ne peut pas imaginer que l’État et d’autres instances, notamment consulaires, conservent des directions régionales dans deux pôles différents. Je pense à la direction régionale de l’action culturelle – la DRAC –, la direction régionale des finances publiques, la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi – la DIRECCTE –, la direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement – la DREAL –, la chambre régionale des comptes, le rectorat, la cour d’appel, la préfecture de région, le secrétariat général aux affaires régionales ou encore l’agence régionale de santé. Comment, par exemple, cette dernière pourra-t-elle coordonner l’offre de santé et de soins de Beaucaire à Tarbes, situées à cinq heures de route l’une de l’autre ?

Parmi les autres handicaps, pensons également aux habitants usagers. Nous allons leur imposer de longs trajets pour se rendre dans la capitale régionale afin d’accomplir les différentes démarches administratives. Les menaces de disparition qui pèsent sur les directions régionales – elles vont se concrétiser, j’en prends le pari – concerneraient chez nous 4 000 postes. Je comprends que les zélateurs de la fusion aient envie d’apparaître comme des visionnaires ; mais je pense que les habitants et les usagers, qui ont conscience de la proximité de leurs services par rapport à leur zone de résidence, sauront un jour se souvenir de qui a bradé leur région.

Je ne pense pas que programmer une fusion forcée soit particulièrement efficient. Il n’y a pas eu de référendum, comme je l’ai entendu en Alsace, mais les assemblées se sont prononcées, même si elles n’ont pas été consultées par le pouvoir central, et toutes, d’une manière unanime, se sont prononcées contre cette fusion. Monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, je soumets mes réflexions à la sagesse de l’Assemblée et souhaiterais que nous puissions revoir ce texte en profondeur.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion