Intervention de Éric Alauzet

Séance en hémicycle du 16 décembre 2014 à 21h30
Projet de loi de finances rectificative pour 2014 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Alauzet :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, chers collègues, les écologistes se félicitent de ce projet de loi permettant l’adaptation de notre législation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière. Elle apporte une pierre de plus à la création d’une union bancaire et d’un processus de résolution de crises, qui dégage progressivement le contribuable d’éventuelles mésaventures financières liées aux spéculations bancaires. Sur ce sujet, comme sur de nombreux autres, les solutions viendront de la coopération européenne.

Notre souci, tant au niveau français qu’au niveau européen, est de créer les conditions pour qu’il ne se produise plus de crises dévastatrices comme la crise des subprimes de 2008, qui a ébranlé notre système économique, provoqué la faillite de certaines grandes banques américaines et anglaises, entraîné la destruction de centaines de milliers d’emplois en France et entamé durablement la confiance des agents économiques.

Pour ce faire, nous devons mettre les banques en face de leurs responsabilités. Ainsi, un fonds unique de résolution sera alimenté par des contributions des banques pendant huit ans. Le montant de cette contribution pour les banques françaises devrait être important – 15 milliards d’euros, soit 30 % du total. Il est à la hauteur des risques que font peser sur la France et sur l’Europe les quatre banques françaises de taille systémique – ces banques de taille si importante que leur chute briserait notre économie et entraînerait des dégâts bien au-delà de notre pays. En effet, les actifs de chacune de ces quatre banques équivalent à peu près au PIB de notre pays.

Le montant de cette contribution reflète la spécificité du modèle français, qui fait que sur les neuf banques européennes appartenant aux vingt plus grandes banques mondiales, quatre sont françaises et trois anglaises. Le gigantisme a un coût.

Cette contribution, nous l’espérons, saura inciter les banques à éviter les comportements à risques, d’autant que nous avons voté il y a quelques instants, dans le cadre du projet de loi de finances rectificative, la non-déductibilité de la taxe de risque systémique, puis de la contribution des banques au fonds de résolution unique européen. Rendre déductible de l’impôt sur les sociétés cette contribution aurait été en contradiction absolue avec l’idée de dégager le contribuable des conséquences des aventures risquées des banques. Cela n’était pas acceptable.

Nous nous félicitons également des mesures prises en faveur de la transparence des activités des industries extractives, une transparence essentielle pour mettre fin à la corruption et aux détournements de fonds accompagnant trop souvent ces activités.

Ce texte, ainsi que l’indiquait le rapporteur, a été précisé et enrichi par nos apports respectifs. Lors de la première lecture à l’Assemblée nationale, deux de nos amendements ont été adoptés. Ainsi, toute entreprise publiant des informations partielles ou erronées sera sanctionnée. Nous avons également renforcé les modalités de publication des informations relatives aux paiements effectués au profit des autorités publiques des États où elles opèrent. Ainsi, ces chiffres seront accessibles gratuitement et dans un format exploitable par les membres de la société civile.

Nous regrettons toutefois que la formulation utilisée dans le projet de loi reste ambiguë et ne respecte pas entièrement les dispositions de la loi d’orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale.

Les écologistes seront au côté des associations, comme Oxfam et le CCFD-Terre solidaire, qui travaillent sans relâche pour mettre fin à la corruption et à la fraude qui conduisent au pillage des richesses des pays du Sud, et pour s’assurer que cette mesure soit pleinement appliquée. Nous veillerons à ce que la transparence soit réelle et efficace. Si nous demandons plus de transparence aux banques et aux multinationales, ce n’est pas par fétichisme des chiffres mais parce que nous pensons que c’est aujourd’hui le meilleur moyen pour lutter contre l’évasion fiscale et la corruption.

Ce texte est la preuve que l’Europe peut être protectrice. Bien trop souvent, les décisions prises par une majorité néolibérale font de l’Europe un espace de mise en concurrence des salariés. Bien trop souvent, les États recherchent leurs intérêts propres, plutôt que l’intérêt de tous. Mais l’Europe n’est que ce que nous en faisons. Contre une finance déréglementée, contre le réchauffement climatique, l’Europe doit être une solution. Cela ne sera possible que si nous savons faire de l’espace européen un espace de coopération, où l’intérêt général prime sur l’intérêt particulier.

La décision de créer une union bancaire n’est qu’un petit pas vers une plus grande coordination des économies européennes. Mais les écologistes ne doutent pas que, petit pas à petit pas, nous finirons par construire une Europe plus forte et plus solidaire.

Sommes-nous vraiment à l’équilibre, monsieur le secrétaire d’État ? Nous avons avancé, mais tant que l’évasion fiscale restera importante, tant qu’elle menacera nos comptes publics et notre économie, tant que les injustices progresseront dans ce monde, nous ne serons pas à l’équilibre.

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