Intervention de Jeanine Dubié

Séance en hémicycle du 16 décembre 2014 à 15h00
Réforme de l'asile — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJeanine Dubié :

Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la rapporteure de la commission des lois, mes chers collègues, le Président de la République avait fait de la réforme du droit d’asile l’un de ses engagements de campagne. Et nous avons accueilli avec satisfaction le discours qu’il a prononcé hier à la Cité nationale de l’histoire de l’immigration, dans lequel il a notamment rappelé que l’asile faisait partie de l’identité de la France. En tant que radicaux de gauche, nous souhaitons réaffirmer ici notre attachement à ce principe, qui est au coeur de notre pacte républicain.

Depuis le début de l’examen de ce projet de loi, le débat s’est focalisé sur les chiffres de l’asile, tant en termes de volume que de coût. Il est de notre responsabilité de rappeler les vrais chiffres. Oui, la France fait face à une augmentation du nombre de demandes d’asile, mais ces chiffres doivent être relativisés, non seulement par rapport à la population française, mais également par rapport aux autres pays européens.

Nous avons ainsi reçu, en 2013, 985 demandes d’asile pour 1 million d’habitants, alors que le ratio est de 1 575 demandes pour 1 million d’Allemands et de 5 680 demandes pour 1 million de Suédois. Telle est la réalité de l’asile. Mes chers collègues, ne cédons pas aux sirènes du populisme et des discours sécuritaires. Pensons à notre histoire et surtout à l’avenir.

Oui, il est effectivement nécessaire de ne pas perdre de vue la souffrance et les difficultés rencontrées par les demandeurs d’asile lorsqu’ils quittent leur pays. Derrière ces profils se cachent en effet des histoires personnelles et familiales complexes, et des départs parfois précipités de pays en conflit. Conscients de ces situations, il est nécessaire de faire en sorte que toutes les conditions soient réunies pour garantir à ces personnes une vie meilleure, respectueuse de leurs droits et de la liberté.

Voilà les objectifs que nous nous étions fixés en abordant l’examen de ce texte, et je veux croire que nos recommandations ont été globalement entendues. Faisant droit au constat d’un système en crise et conformément à ses obligations européennes, le Gouvernement a souhaité réformer le système de l’asile. Nous ne pouvons que nous en satisfaire.

Nos échanges ont permis d’élaborer un texte équilibré et cohérent, visant à une garantie effective du respect des droits et des libertés des demandeurs, à une amélioration des délais de traitement des demandes, ainsi qu’à un meilleur accompagnement des demandeurs d’asile dans leurs démarches administratives.

Le but affiché du présent projet de loi est ainsi de faire chuter le délai de traitement des demandes d’asile à neuf mois en moyenne. C’est un objectif ambitieux, qu’il nous faut atteindre.

En outre, nous accueillons favorablement la suppression de la domiciliation préalable, actuellement exigée du demandeur d’asile pour l’ouverture de ses droits.

Nous sommes aussi satisfaits de la mise en place d’un recours suspensif pour l’ensemble des demandeurs d’asile, quelle que soit la nature de la procédure – normale ou accélérée. De même, nous notons que la situation sanitaire et familiale des demandeurs d’asile sera prise en compte lors de leur orientation vers un hébergement directif en centre d’accueil de demandeurs d’asile – CADA.

Du droit au travail des demandeurs d’asile, il a été longuement débattu dans cet hémicycle. Il nous semblait important de donner aux demandeurs la possibilité de subvenir à leurs besoins par leurs propres moyens. Le travail est source d’émancipation et permet l’exercice de la citoyenneté. Nous sommes donc satisfaits de l’insertion d’une section 5 relative à l’accès au travail, après un délai de neuf mois.

Sur ces différents points, nous tenons d’ailleurs à saluer le travail de notre rapporteure, Sandrine Mazetier, qui, notamment par son écoute, a su faire entendre l’ensemble des sensibilités et nous rassembler, dans le seul but de la nécessaire refondation du droit d’asile.

S’agissant des demandeurs d’asile déboutés après l’expiration de tous les recours, nous comptons sur vous, monsieur le ministre, pour traiter ce point dans le cadre de l’examen du projet de loi relatif aux droits des étrangers en France.

Il n’en reste pas moins que, pour nombre de familles séjournant en France, dont les enfants sont scolarisés depuis de nombreuses années, ce qui contribue à leur intégration et à leur attachement aux valeurs de la République, il est nécessaire de trouver une réponse différente et plus appropriée qu’un renvoi dans leur pays d’origine.

Enfin, nous pensons qu’il faudra, à terme, réfléchir au niveau européen à une politique plus intégrée, harmonieuse et commune de l’asile. Les récents drames des migrants de Calais ou de Lampedusa témoignent d’un besoin de coordination des dispositions entre les différents États de l’Union européenne et de problématiques communes en cette matière.

Aussi, pour toutes ces raisons, les radicaux de gauche et apparentés voteront pour le projet de loi de réforme de l’asile que vous nous soumettez aujourd’hui.

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