Intervention de Marie-Anne Chapdelaine

Séance en hémicycle du 16 décembre 2014 à 15h00
Réforme de l'asile — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Anne Chapdelaine :

Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la rapporteure, mes chers collègues, au-delà de nos sensibilités, il y a, je n’en doute pas, l’héritage des Lumières, l’une des pépites de notre patrimoine politique. J’ose croire en effet que la tradition humaniste et civilisée d’accueillir celui qui vit sous le joug de la barbarie, celui qui est en souffrance sur sa propre terre, transcende nos rangs et nos opinions.

Hier, le Président de la République s’en est fait une fois de plus brillamment l’écho lors de son intervention inaugurale à la Cité nationale de l’histoire de l’immigration. Le projet de loi relatif à la réforme de l’asile, sur lequel nous sommes amenés à voter aujourd’hui, est dans cette veine. Il est au nombre des sujets qui donnent à notre pays le rang qui lui incombe dans le concert des nations. Et tenir ce rang est nécessaire, pour faire face aux tumultes qui percutent et violentent les valeurs que nous défendons.

En parlant de tumultes, je pense aux guerres de toutes sortes qui obligent des millions de femmes ou d’hommes à vivre quotidiennement sous le joug de la barbarie, à ces millions d’enfants qui font leurs premiers pas sur un tapis de bombes ou un champ de ruines.

Si j’insiste tant, ce n’est ni par angélisme, ni par sentimentalisme mais parce qu’il me tient à coeur de rappeler que notre débat n’a rien d’abstrait : il nous oblige à regarder sans fard une réalité cruelle, qui, à son tour, nous contraint à reconstruire des réponses politiques efficaces.

Notre texte répond à cette nécessité de protection. Il est parfaitement travaillé car il a fait l’objet d’une large consultation et de justes arbitrages. Il propose un toit, un droit, un accueil, une protection et des obligations à celles et ceux qui sont injustement chassés et persécutés.

Ses principales mesures incluent un traitement adapté des demandes d’asile, afin d’éviter que le système ne soit saturé par des demandes qui détournent la procédure d’asile. C’est aujourd’hui le cas et cela nuit en tout premier lieu aux personnes qui craignent réellement des persécutions.

Le projet de loi prévoit également la refonte des procédures, en améliorant les garanties procédurales par l’abrogation de la procédure dite prioritaire ; la possibilité pour le demandeur d’être accompagné par un tiers à l’entretien à l’Office français de protection des réfugiés et apatrides – OFPRA –, conformément à la directive européenne « Procédures » ; l’instauration d’un schéma national d’hébergement, qui sera décliné dans chaque région en schéma régional.

Enfin, l’Office français de l’immigration et de l’intégration – OFII – sera chargé de piloter ce schéma et de proposer aux demandeurs des solutions d’hébergement en centres d’accueil de demandeurs d’asile ou en hébergement d’urgence des demandeurs d’asile.

Et si nous proposons ces mesures, c’est parce que nous constatons, – et nous le déplorons – que la majorité précédente ait fait le choix de l’inaction, après avoir décidé de céder aux sirènes de la démagogie. Pour preuve de ma démonstration, sachez qu’entre 2007 et 2012, le gel de la construction de places en CADA a fait de l’hébergement d’urgence, voire de la rue, le principe de la politique d’accueil des demandeurs d’asile.

À trop vouloir loucher sur son voisin de droite, notre droite républicaine s’est assise sur son propre héritage politique. Plutôt que de légiférer à tout va, comme nous en avons trop souffert dans un passé proche, nous proposons une réforme globale, élaborée et conçue à partir d’une large concertation. Notre projet est clair, juridiquement cohérent et porteur d’une ambition républicaine.

Aussi, je tiens à saluer ici le travail de la rapporteure Sandrine Mazetier – dont c’est aujourd’hui l’anniversaire ! – et de Pascale Crozon, responsable pour le groupe SRC. Leur mobilisation n’aura eu d’égale que leur détermination.

Monsieur le président, je conclurai mon propos en évoquant à nouveau la barbarie et en citant Hugo Grotius, philosophe et juriste des Pays Bas qui posa au XVIIe siècle les fondements du droit international, pour qui « le propre des Barbares est de repousser les étrangers ».

Mon groupe politique, parce qu’il fait encore une fois le choix de la civilisation contre la barbarie, votera donc pour ce projet de loi.

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