Intervention de Olivier Audibert Troin

Réunion du 16 décembre 2014 à 17h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaOlivier Audibert Troin, rapporteur :

Les blessés sont nombreux à quitter l'armée à l'issue de l'expiration de leurs droits à congés de maladie, par choix ou parce qu'ils ne sont plus aptes. Ils font face à plusieurs défis qui sont aussi des défis pour l'institution : leur reconversion et leur suivi. Leur reconversion est assurée par Défense mobilité et, nous l'avons constaté, beaucoup par les cellules d'aide et les blessés eux-mêmes qui souvent font preuve de beaucoup d'énergie pour se prendre en charge. Quant à leur suivi, il revient à l'office national des anciens combattants et des victimes de guerre (ONACVG) qui se positionne aujourd'hui comme interlocuteur privilégié en s'ouvrant à la nouvelle génération du feu et a signé pour cela des conventions avec l'armée de l'air et la marine, et bientôt l'armée de terre, afin de prolonger l'action des cellules d'aide. La volonté est immense et l'effort sera exigeant, notamment pour le suivi des blessés atteints de syndrome post-traumatiques, qui ne s'improvise pas. Nous attendons beaucoup de ce suivi dont nous nous félicitons car nous sommes convaincus qu'il faut à tout prix éviter de rompre le lien.

Nous allons vous parler maintenant du sas de fin de mission. Pourquoi maintenant, nous direz-vous ? Pourquoi pas avec le syndrome post-traumatique ? Parce que ce sas de décompression n'est pas un dispositif médical et qu'il s'adresse à tous les soldats projetés, à partir du moment où le commandement a estimé que les difficultés de la mission nécessitaient son activation. Le sas de Chypre avait été désactivé – les premiers soldats de Serval n'ont donc pu en bénéficier – puis réactivé avant de fermer définitivement et d'ouvrir à nouveau au Sénégal pour les soldats des opérations Barkhane et Sangaris. Ce passage fait partie intégrante de la mission et il fonctionne comme une zone tampon permettant de prendre ses distances physiquement et psychologiquement de la zone de combat. Autrefois les longs voyages en bateau offraient naturellement un éloignement graduel que ne permet plus la brutalité des voyages en avion si rapides. Le sas français est né en Afghanistan et, après quelques essais, le concept a été pérennisé dans sa forme actuelle que nous avons pu vivre de l'intérieur en nous rendant à Chypre lors d'une relève de retour de Centrafrique. Le sas se déroule dans un milieu ouvert fréquenté par des vacanciers. Il dure trois jours, ce qui est suffisant pour se détendre et suffisamment court pour ne pas être vécu comme une contrainte. L'hôtel est de bon niveau afin d'offrir un contraste et un repos après des conditions vie rustiques. Les activités obligatoires sont, d'une part, un débriefing collectif et une réunion d'information post-OPEX et, d'autre part, la réparation physique, car les soldats sont très fatigués. Elle consiste en des massages de dos et des séances de techniques d'optimisation du potentiel. Des activités ludiques comme une mini-croisière et une visite archéologique facilitent le retour à la vie civile. Des activités facultatives sont également proposées : séances d'information sur le retour en famille, entretiens individuels à la demande, plage, piscine, sauna, musculation, footing… Quelle que soit l'intensité des combats, et de manière quasi invariable, environ 3 % du personnel transitant par le sas de fin de mission demandent un entretien individuel auprès d'un psychologue et 1 % du personnel en transit est ensuite orienté vers une prise en charge médico psychologique. Nous avons pu apprécier l'efficacité de ce dispositif en parlant avec les soldats et en les observant durant 48 heures durant lesquelles nous les avons vus se détendre et se mettre à parler. Nous sommes revenus pleinement convaincus de l'utilité de ce dispositif. Nous étions d'ailleurs inquiets de savoir que le sas de Chypre allait fermer définitivement en raison de l'expiration du marché et d'une localisation géographique moins favorable depuis l'Afrique alors qu'elle était parfaitement adaptée à un retour d'Afghanistan. Nous avons été rassurés qu'un sas soit installé à Dakar, car l'opération Sangaris présente toutes les caractéristiques d'une mission difficile aux conséquences psychologiques potentiellement lourdes.

Venons-en maintenant au dernier point de notre rapport qui traite de l'arme la plus efficace contre la blessure : sa prévention. Elle est assurée notamment par la protection des soldats et l'évolution des matériels. Le blindage des véhicules a fait beaucoup pour sauver des vies, tout comme le gilet pare-balles. Des études amont sont menées pour l'amélioration constante des matériels. L'institut de recherche biomédicale des armées conduit des recherches sur les chocs hémorragiques et la reconstruction tissulaire pour les grands brûlés. L'avenir est également fait du développement de nouvelles technologies de l'information au profit de la médicalisation de l'avant, avec le programme Infostructure santé lancé en 2012. Il permettra de fournir aux médecins des forces sur le terrain trois outils d'optimisation de la chaîne santé autour du blessé en opération : un système d'information et de régulation médical entre le théâtre d'opération et la métropole, un centre de télémédecine et un module épidémiologique.

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