Intervention de André Chassaigne

Séance en hémicycle du 30 janvier 2015 à 9h30
Croissance activité et égalité des chances économiques — Article 9

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Chassaigne :

…et seraient opposés à toute modernité, à toute évolution, en considérant que la réponse aux besoins ne peut passer que par la marchandisation. Je ne partage pas cette approche, même si je peux comprendre que d’autres la défendent.

Monsieur Fromantin, pourquoi transférer à des organismes certificateurs des missions que la fonction publique peut assurer ?

C’est là une question de fond qui traverse nos débats, non seulement depuis ces bancs, mais aussi du fait du ministre, M. Macron.

Monsieur le ministre, vous adressant avant-hier à nos collègues de droite, vous avez déclaré : « Si cette réforme avait été réalisée avant, sous la précédente législature, peut-être discuterions-nous aujourd’hui de l’étape d’après ». Nous sommes plusieurs sur ces bancs à avoir interprété vos propos comme un souhait de voir cette étape se traduire par une privatisation complète du permis de conduire. Pouvez-vous préciser s’il s’agit là d’une position partagée au sein du Gouvernement, plus particulièrement par le ministre de l’intérieur, ou de votre position propre ? Toujours est-il que vos propos ont laissé croire qu’il s’agissait de votre projet.

Vous avez indiqué que vous défendiez aujourd’hui une position de compromis pour respecter l’engagement pris par le ministre de l’intérieur auprès des inspecteurs, que vous désignez à demi-mot comme le verrou de la réforme. Vous portez ainsi l’idée – mais c’est votre philosophie – que, selon vos propres mots, par nature, le service public et les fonctionnaires bloquent toute évolution permettant de répondre aux besoins. Dans ces débats, monsieur le ministre, vous avez maintes fois exprimé la conviction – certes avec honnêteté intellectuelle – que le service public doit disparaître au profit du privé. Vous présentez les défenseurs du service public comme des idéologues éloignés du réel – même si cela peut s’expliquer par les échanges particulièrement vifs que nous avons pu avoir ou par des images que j’ai moi-même pu utiliser.

Or, il y a une autre réalité que celle du profit et de la rentabilité. Il y a d’autres valeurs qui irriguent notre société, des valeurs qui sont non pas rétrogrades, mais, au contraire, modernes et progressistes : les valeurs d’égalité et de solidarité. Ce sont ces valeurs qui animent notre attachement au service public et elles sont bien plus modernes que le retour à la marchandisation de toutes les activités de notre société, qui nous ferait revenir au début du XXe siècle ou au XIXe siècle, et ça c’est rétrograde !

Nous allons proposer durant les débats de supprimer, en toute logique après les propos que je viens de tenir, les mesures d’externalisation de l’épreuve du code de la route et d’une partie du permis poids-lourd. Nous estimons en effet que vous tirez ici prétexte de l’objectif de réduction des délais – auquel nous souscrivons – pour transférer au privé une activité publique. Comme l’a rappelé notre rapporteur, 110 000 places ont déjà été libérées en réduisant la durée de l’épreuve pratique de 35 à 32 minutes, ce qui a permis de faire passer le rythme d’examen de 12 à 13 candidats par jour et par inspecteur. Si nos calculs sont bons, nous n’avons plus que 90 000 places à libérer pour couvrir les besoins, à quoi vous voulez ajouter 80 000 places supplémentaires pour éponger le stock. Il n’était pas nécessaire pour cela de passer par la loi et de privatiser une partie des épreuves du code de la route pour atteindre cet objectif. Ce chiffre de 90 000 places d’examen correspond approximativement à 34 postes d’inspecteurs en équivalents temps plein. Or, comme je l’ai dit voilà deux jours, les effectifs sont aujourd’hui inférieurs de 40 postes au plafond d’emplois. Il était donc parfaitement possible de recruter des inspecteurs et de régler ainsi la question du flux.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion