Intervention de Gilda Hobert

Séance en hémicycle du 12 février 2015 à 15h00
Débat sur le rapport d'information sur l'évaluation de l'adéquation entre l'offre et les besoins de formation professionnelle

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGilda Hobert :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre système de formation professionnelle s’est construit par réformes successives à partir de 1971 pour répondre aux ambitions multiples qu’il a suscitées. Initialement, il avait vocation à assurer le développement personnel et la promotion sociale des salariés. Il a ensuite évolué, en raison de la crise économique des années 1980 qui a vu le développement d’un véritable chômage de masse, pour devenir un outil d’adaptation aux mutations économiques. La formation professionnelle est alors devenue une mesure de traitement social du chômage. Enfin, depuis 2009, la complexification de la vie professionnelle, de moins en moins linéaire, impose un objectif supplémentaire à notre système de formation professionnelle : la sécurisation des parcours. Mais aujourd’hui, force est de constater qu’en dépit du budget qui lui est consacré, les résultats escomptés ne sont pas à la hauteur des espérances. En effet, le système de la formation professionnelle demeure très complexe, cloisonné et illisible.

Le rapport d’information de janvier 2014 de nos collègues Jeanine Dubié et Pierre Morange, dont je veux souligner l’excellence, a dressé un état des lieux et formulé dix-huit propositions pour améliorer l’accès à la formation professionnelle. Il s’agit notamment de favoriser l’accès à la formation des publics les plus éloignés – salariés peu qualifiés et demandeurs d’emploi –, de simplifier les instances de pilotage, d’accélérer la réforme de l’intermédiation et de réguler plus efficacement l’activité des organismes de formation.

Ce rapport a montré que le système de formation professionnelle était source d’inégalités, puisque les salariés les moins qualifiés et les demandeurs d’emploi n’en bénéficient aujourd’hui que très peu. Ainsi, les faiblesses de notre système de formation initiale ont été mises en évidence. Rappelons que 130 000 jeunes quittent une formation sans qualification chaque année. En outre, le rapport a relevé un autre problème : le système de financement intermédié, à travers des organismes paritaires collecteurs agréés peu transparents, est propice aux conflits d’intérêts.

Toutefois, nombre de dispositions de la loi relative à la formation professionnelle, dont nous avons débattu l’année dernière, ont répondu à certains problèmes soulevés dans ce rapport. Depuis le 1er janvier 2015, tout actif dispose d’un compte personnel de formation – un CPF – qui lui permettra de bénéficier de cours jusqu’à sa retraite. Ce CPF remplace le droit individuel à la formation et permet notamment de bénéficier de formations courtes. Ce nouveau dispositif s’ajoute au congé individuel de formation et devrait faciliter l’évolution professionnelle des salariés.

S’agissant de la jeunesse, la réforme globale de l’apprentissage engagée en 2013 et la loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle ont permis de rénover le dispositif existant. L’objectif de créer plus de 500 000 places d’apprentissage d’ici à 2017, annoncé par le Gouvernement en automne dernier, est louable : il s’inscrit dans la continuité de politiques publiques axées sur l’emploi, le travail et la jeunesse à travers la formation professionnelle. Nous ne pouvons que nous en féliciter.

De même, nous saluons la volonté de flécher, à partir de 2015, une plus grande part de la taxe d’apprentissage vers les centres de formation d’apprentis, ainsi que l’augmentation sensible des recettes du compte d’affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage » entre 2014 et 2015, comme nous avons pu le constater lors de l’examen de la mission « Travail et emploi » du projet de loi de finances pour 2015.

Au-delà de ces aspects budgétaires, on peut toutefois s’interroger sur la vision que les jeunes ont de l’apprentissage et de la formation professionnelle en France. Chez nos proches voisins, par exemple en Suisse, l’apprentissage n’est pas considéré comme une voie de garage : ainsi, la proportion de jeunes optant pour ce type de formation est singulièrement plus élevée.

Au-delà des questions d’organisation ou de budget, il est aussi de notre responsabilité d’engager des politiques publiques qui encouragent la formation professionnelle pour les jeunes, mais également pour les moins jeunes, puisque la situation économique actuelle suscite davantage d’interrogations légitimes chez nos concitoyens.

L’époque où l’on n’exerçait qu’un seul métier tout au long de sa vie est bientôt révolue. Les objectifs et les besoins en formation sont en mouvement perpétuel. Il revient donc au législateur de mettre en place des politiques publiques de qualité, afin d’aider le salarié à répondre au mieux aux questions qu’il peut se poser tout au long de sa carrière : comment peut-il évoluer dans son entreprise, voire se reconvertir ou se mettre à niveau ? Que va lui apporter une nouvelle formation ? Si de nouveaux mécanismes ont été mis en place récemment, il reste à instaurer un dispositif permettant d’aider le salarié dans sa réflexion avant de s’engager dans telle ou telle formation. Il nous revient d’accompagner nos concitoyens le mieux possible par le biais de politiques publiques innovantes, claires et précises.

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