Intervention de Christian Estrosi

Séance en hémicycle du 12 février 2015 à 15h00
Croissance activité et égalité des chances économiques — Article 49

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristian Estrosi :

Vous voyez donc que c’est une vente qui se fait aux dépens de l’État.

Par ailleurs, l’aéroport international de Nice ne se trouve pas au coeur de n’importe quel territoire. Il est au coeur du périmètre d’une opération d’intérêt national, ce qui n’est d’ailleurs pas le cas de celui de Lyon.

Cette opération d’intérêt national, qui a vu le jour il y a cinq ou six ans, en matière d’éco-industrie, de croissance verte, d’université, de formation et d’implantation d’entreprises ayant investi, comme IBM, Cisco, Veolia, GDF-Suez, des pépinières d’entreprises, des incubateurs, a été planifiée parce qu’il y avait une stratégie de la collectivité et de l’État et non pas parce qu’il y avait un actionnaire majoritaire ayant d’autres intérêts que l’attractivité du territoire.

Si nous sommes en train d’aménager le pôle multimodal, avec une gare ferroviaire, une gare de tramway, une gare routière et des infrastructures routières, ce qui en fait le plus performant d’Europe en coeur d’agglomération et en coeur d’opération d’intérêt national, c’est parce que c’est la collectivité qui a réalisé les plus gros investissements, ce qui permet aujourd’hui à l’État de spolier l’acteur local en en tirant le meilleur parti sur le dos du contribuable local.

Monsieur le ministre, vous nous avez expliqué que, si elle le voulait, la collectivité pouvait devenir propriétaire d’une partie de l’aéroport. Nous avons déposé un amendement pour lui permettre de disposer d’un droit de préemption, il a été refusé au titre de l’article 40. Il serait intéressant que vous déposiez vous-même en séance un tel amendement.

En outre, c’est bien un fusil à un seul coup. Vous avez parlé du dividende retiré chaque année par l’État. Moi, je vous parle de celui qui ne sera plus jamais récupéré par l’État. Lorsque vous préparez le projet de loi de finances qui est présenté devant le Parlement, vous comptez dans les recettes celles de Lyon, de Nice, d’autres plateformes et d’autres actifs de l’État. L’année prochaine, vous ne pourrez plus le faire puisque vous ne serez plus propriétaire de ces participations. C’est à tout jamais que c’est terminé.

Dernier argument, vous avez dit tout à l’heure que c’était la DGAC qui protégeait Air France et évitait qu’un certain nombre d’autres compagnies aériennes ne viennent lui faire concurrence.

Or, lorsqu’il y a des demandes d’ouverture de lignes, de la part d’Emirates, par exemple, entre les Emirats et l’aéroport international de Nice, c’est la DGAC, associée à Aéroports de Paris, qui fait un blocus, non pas pour empêcher qu’il y ait de nouvelles lignes en direction de la France afin de protéger Air France mais pour les faire ouvrir au bénéfice de Paris, contre Nice. C’est donc que vous jouez Paris contre Nice. Voilà pourquoi vous ne voulez pas vendre Paris, pour continuer à être complice de la DGAC et d’Aéroports de Paris.

Je me demande d’ailleurs si Aéroports de Paris ne serait pas d’accord avec vous pour déposer une offre et faire de l’aéroport de Nice et de celui de Lyon leur petit hub régional, ce qui leur permettra de récupérer les grandes lignes des compagnies aériennes étrangères en faisant simplement une petite redistribution régionale. D’ailleurs, lorsqu’Air France ferme le mois prochain la ligne entre Nice et Tel Aviv, alors que les avions qui font l’aller-retour tous les jours sont pleins, au bénéfice de compagnies low cost comme easyJet, ce n’est pas Air France que l’on défend, ce sont au contraire des compagnies aériennes étrangères, avec la DGAC.

Voilà un argument de plus que vous avez essayé de défendre et qui tombe, monsieur le ministre. En tout cas, je pense avoir fait la démonstration devant la représentation nationale que pas un seul de vos arguments ne tenait, et je me repose la question que je me suis posée lundi soir : quelqu’un ne serait-il pas passé par votre bureau pour choisir par avance celui qui pourrait être le repreneur de l’actif majoritaire de l’aéroport de Nice et de celui de Lyon, ce qui, quelque part, constituerait une sorte de délit d’initié ?

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