Intervention de Guillaume Larrivé

Réunion du 5 février 2015 à 9h00
Commission d'enquête sur les missions et modalités du maintien de l'ordre républicain dans un contexte de respect des libertés publiques et du droit de manifestation, ainsi que de protection des personnes et des biens

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGuillaume Larrivé :

Je salue le professionnalisme des fonctionnaires de la police nationale et des militaires de la gendarmerie placés sous l'autorité fonctionnelle du préfet de police.

Je souhaite, monsieur le préfet de police, partager plusieurs interrogations nées ces dernières années sur la pertinence des directives données par la chaîne de commandement et son sommet, c'est-à-dire vous-même et le ministre de l'intérieur. J'ai fait part de ces interrogations mardi à Bernard Cazeneuve, qui, s'agissant de faits remontant à 2013, m'a renvoyé à la présente audition, au motif qu'il n'était pas en fonction à l'époque.

En 2013, un projet de loi présenté par le Gouvernement a suscité un grand débat dans notre pays, provoquant l'émotion de centaines de milliers de nos compatriotes. Il s'agit du projet de loi sur le mariage et l'adoption par des personnes de même sexe. Des manifestations très nombreuses ont eu lieu dans toute la France. Elles ont fait l'objet de saisines du Défenseur des droits au titre de sa compétence en matière de déontologie de la sécurité. J'ai moi-même saisi le Défenseur des droits, au titre de la loi organique du 29 mars 2011, sur des faits intervenus le lundi 27 mai 2013 aux abords du lycée Buffon, visité par le Président de la République ce jour-là.

L'une de ces saisines a fait l'objet d'une décision du Défenseur des droits en date du 24 novembre 2014. Ces faits ne sont pas couverts par une instruction judiciaire, la plainte déposée par les manifestants ayant été classée sans suite. Le 14 juillet 2013, une dame, Mme X., se rend sur les Champs Élysées avec son mari et ses enfants pour assister au défilé militaire et afficher son opposition au projet de loi. Elle agite deux fanions, aux couleurs non pas de je ne sais quel groupuscule subversif mais de la Manif pour tous. Le premier fanion lui est arraché des mains par un militaire de la gendarmerie nationale. Elle range le second dans la poussette du bébé. Une fouille administrative de la poussette est effectuée par une fonctionnaire de police, contraignant cette dame à en retirer l'enfant. La fonctionnaire confisque le fanion, omettant de signaler à sa propriétaire qu'elle pouvait le récupérer à la sortie du périmètre contrôlé. Ces faits sont rapportés dans un article du Monde, qui cite la décision du Défenseur des droits. Ce dernier indique que toute personne portant un vêtement orné du logo de la Manif pour tous avait été priée de l'ôter.

Le Défenseur des droits, dans son avis, pense qu'il y a eu une disproportion de l'emploi de la force ce jour-là. Il ne met aucunement en cause l'action individuelle des militaires et fonctionnaires de police, mais il s'interroge, monsieur le préfet de police, sur les consignes que vous avez données. Il indique que le caractère non dangereux de simples fanions n'est pas contestable et il considère que retirer le fanion à cette dame n'était pas opportun. Il s'interroge donc sur l'équilibre entre le maintien de l'ordre et le respect des libertés.

J'ai quatre questions à vous poser sur ces faits. Quelles instructions vous ont été données par le ministre de l'intérieur de l'époque pour gérer ces manifestations ? Quelles instructions avez-vous ensuite personnellement données à la chaîne de commandement de la préfecture de police ? Avez-vous la conviction, eu égard à ce qu'a écrit le Défenseur des droits, d'avoir respecté l'équilibre nécessaire entre le maintien de l'ordre et la liberté d'expression ? Enfin, quelles conséquences tirez-vous de ce que le Défenseur des droits identifie comme un dysfonctionnement de la chaîne de commandement ?

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