Intervention de Jean-Marc Falcone

Réunion du 12 février 2015 à 10h00
Commission d'enquête sur les missions et modalités du maintien de l'ordre républicain dans un contexte de respect des libertés publiques et du droit de manifestation, ainsi que de protection des personnes et des biens

Jean-Marc Falcone, directeur général de la police nationale :

La territorialisation des CRS est une question récurrente. Il existe 60 unités de CRS et 108 EGM. En principe, chaque préfet de zone peut compter sur un certain nombre d'unités. Mais, dans les faits, les six préfets de zone sont privés d'unités à leur main car ces derniers sont absorbés par des missions gérées par la direction générale de la police nationale (DGPN) afin de répondre aux besoins des préfets en matière d'ordre public.

La volonté de « fidéliser » les unités sur le territoire est louable. Mais, en l'état, il n'est pas possible de renoncer à la mobilité des unités, impérative au regard des besoins quotidiens. Pour pallier ce défaut de fidélisation, des sections départementales d'intervention implantées dans de grandes agglomérations bénéficient, dans le cadre des effectifs de sécurité publique, d'unités spécialisées pour assurer le maintien de l'ordre. La gestion au quotidien, « à la dentelle » disons-nous, des forces de l'ordre ne permet pas de fidéliser les unités. Toutefois, celles-ci peuvent être envoyées pour une période déterminée faire de la sécurisation en renfort de la sécurité publique en cas de pic de délinquance dans un territoire. Il est très difficile de maintenir ces forces sur un territoire.

On gagne toujours, lorsque cela est possible, à mener une concertation en amont avec les organisateurs, quoique ce terme ne soit pas vraiment adapté à une manifestation spontanée montée grâce à une chaîne de SMS. Mon expérience me fait dire qu'il y a toujours un intérêt à une discussion, ne serait-ce que pour appeler l'attention. La discussion peut ne pas aboutir mais l'emploi de la force se justifie plus aisément lorsque toutes les voies du dialogue ont été explorées.

Quant à la mutualisation des forces entre CRS et gendarmerie mobile, les doctrines et le temps de travail sont presque identiques. Les EGM ont encore un statut militaire grâce auquel ils peuvent participer à des opérations extérieures. Si les deux forces étaient réunies, il est probable que le nouveau statut ne le leur permettrait. En matière de répartition sur le territoire, je ne vois pas d'intérêt à une réunion des forces qui serait le prélude à une mutualisation totale entre la police et la gendarmerie, sur laquelle il ne m'appartient pas de me prononcer. Les deux forces s'en sortent bien telles qu'elles sont.

Je suis très allant pour filmer les manifestations. Le ministre nous a donné des instructions très claires sur ce point. Je rappelle que certains CRS sont équipés de leur propre dispositif vidéo et que les unités peuvent compter en leur sein des fonctionnaires vidéastes. Les images filmées présentent un triple intérêt : pour le bon déroulement de la manifestation, pour la justice et pour la protection des fonctionnaires – elles permettent d'établir la vérité en cas d'accusation de violences.

Monsieur Goujon, je n'ai aucun doute, les forces de l'ordre en France, avec les moyens et la formation – initiale et continue – dont elles disposent ainsi que l'adaptation permanente de la doctrine, sont armées pour intervenir et garantir l'ordre public.

Vous faites référence aux voltigeurs. Ces unités ont été dissoutes après le drame que vous connaissez. Elles n'ont pas été reconstituées car elles ne correspondaient plus à la doctrine du maintien de l'ordre. Celle-ci repose sur le maintien à distance des manifestants. Nous disposons des outils nécessaires – grenades qui peuvent être lancées à longue distance ou lanceurs d'eau. Il faut éviter le corps à corps. Cette doctrine appliquée dans d'autres pays est très dangereuse. Nous obtenons de très bons résultats avec notre méthode.

Quant à l'exécution des décisions de justice, la décision appartient à l'autorité politique. Les obstacles ne sont pas techniques ou matériels. On peut réussir à déloger les occupants de Notre-Dame-des-Landes ou de Sivens en y affectant les effectifs nécessaires pendant le temps nécessaire. La difficulté tient à l'équilibre qu'il faut trouver entre les troubles à l'ordre public que l'on souhaite faire cesser et les résultats de l'intervention pour atteindre cet objectif. Je crois que c'est précisément l'objet des travaux de votre commission.

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