Intervention de Véronique Massonneau

Réunion du 17 février 2015 à 17h30
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaVéronique Massonneau :

Nous voilà réunis pour débattre du texte qui a servi à justifier, il y a trois semaines, le renvoi de celui que je défendais ici même. Vous comprendrez, mes chers collègues, que je serai donc doublement attentive à ce que notre commission prenne le temps d'aborder consciencieusement les nombreuses questions de fond que soulève cet important sujet de la fin de vie.

Il s'agit bien d'ouvrir de nouveaux droits pour les patients. Vous conviendrez, et je m'adresse particulièrement à l'opposition, que les soins palliatifs – qui existent depuis 2002 – ne constituent pas un nouveau droit. S'il vous plaît, ne réduisons pas ce débat à une opposition simpliste et totalement erronée entre les soins palliatifs et le droit de choisir sa fin de vie y compris par l'euthanasie. Cette vision manichéenne est fausse et elle ne fait pas avancer le dialogue. Je regrette que certains amendements de l'opposition soutiennent cette posture clivante et stérile.

Chers collègues, je vous invite plutôt à déposer une proposition de loi concernant les soins palliatifs, et pas une proposition de résolution qui n'a pour but que de nier le choix du patient et défaire chacun de la liberté de disposer de son corps. Déposez une proposition de loi qui permette enfin que les soins palliatifs ne soient plus uniquement opposés à d'autres choix possibles de fin de vie de façon pavlovienne, mais qu'ils soient bien considérés à leur juste valeur. Les écologistes, qui ont déjà initié de telles propositions, seront alors prêts à soutenir la vôtre. Ce n'est pas le sujet du jour et vous comprendrez que les écologistes écarteront les amendements qui iraient dans ce sens.

Aujourd'hui, il s'agit d'ouvrir de nouveaux droits pour les personnes en fin de vie, comme l'annonce l'intitulé de ce texte. Quels sont donc ces nouveaux droits ? Les directives anticipées, désormais opposables et mentionnées sur la carte Vitale, ont une valeur exécutive et non plus seulement consultative. Cette mesure figure dans la proposition de loi que j'ai défendue ici, et je ne peux que saluer cette avancée. En fait, il s'agit du seul réel nouveau droit proposé par ce texte, et qui ne concerne que les cas où la personne est inconsciente et a rédigé des directives anticipées.

Quant à la mise en place d'une sédation profonde et continue jusqu'à la mort, elle existe déjà. Il en va de même pour l'arrêt de l'alimentation et de la nutrition du patient, ce que le Conseil d'État a requis dans le cas de Vincent Lambert. Pour cet homme dont la situation faisait polémique, en l'absence de directives anticipées, l'hydratation et l'alimentation artificielles auraient pu être suspendues depuis longtemps.

Des médecins utilisent déjà la sédation à visée ultime. En revanche, ce texte ne laissera plus le médecin libre de choisir d'y avoir recours ou non à la place de son patient. Il y sera contraint si le patient le demande et si sa situation le justifie. Monsieur Leonetti, vous avez évoqué des pratiques particulières qui perdurent, comme celle de réveiller son patient pour vérifier qu'il souhaite toujours poursuivre la sédation. Je ne reproche rien aux médecins ; je comprends très bien qu'ils puissent craindre d'être poursuivi en justice, d'autant que les interprétations possibles sont nombreuses compte tenu du caractère flou de la législation actuelle.

Il s'agit de sécuriser le médecin pour mieux garantir le choix du patient mais, chers collègues, peut-on dire sincèrement qu'il s'agit d'un nouveau droit ? Il s'agit plutôt d'une amélioration de l'écriture d'un texte qui a déjà dix ans, qui est toujours mal appliqué car ambigu. Je dirais même que c'est le service minimum. Comment pourrions-nous nous contenter de cela ? Les nombreux concitoyens qui m'ont parlé de leur cas personnel, souvent douloureux, attendent une véritable avancée. Je n'imagine pas me retrouver en face d'eux et leur dire dans les yeux qu'ils doivent se satisfaire de ce texte.

Croyez-vous sincèrement que cette proposition endiguera un phénomène dramatique : ces Français qui vont mourir à l'étranger, comme des clandestins, dans des pays où leur choix est réellement respecté ? Si nous, écologistes, ne pouvons pas nous opposer à ce texte, nous ne pouvons pas non plus l'approuver en l'état.

Nous attendons donc que notre commission le fasse évoluer afin qu'il corresponde concrètement aux attentes des Français, comme le candidat Hollande le leur a promis. De nombreux amendements très intéressants ont été déposés, ce dont je me réjouis. Votons en conscience et débattons avec un seul souci : le respect de l'ultime liberté de chacun.

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