Intervention de Jean Leonetti

Réunion du 17 février 2015 à 17h30
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean Leonetti, corapporteur :

Le débat sur l'hydratation et la nutrition, en 2005, a abouti à un consensus pour reconnaître qu'il s'agissait d'un traitement. Une hydratation et une nutrition artificielles représentent une intervention sur le corps de l'autre. Cet acte consiste à ouvrir l'estomac pour y poser une sonde gastrique, c'est mettre une perfusion dans une veine. Selon la loi du 4 mars 2002, cela nécessite l'accord du patient. Il ne s'agit donc pas d'un soin simple mais d'une thérapeutique. La preuve en est que, passé un certain temps, on est conduit à remplacer la sonde gastrique par un tube placé dans l'estomac, c'est une gastrostomie, un geste chirurgical. Sauf à considérer que l'intervention chirurgicale n'est pas un traitement, il y a un problème. Aussi, placer quelqu'un sous respirateur constitue-t-il un traitement ? Vous allez répondre oui. Arrêter un respirateur dans certaines conditions est-il licite ? La réponse est oui lorsque, par exemple, il y a des lésions cérébrales irréversibles. Pourquoi serait-il moins naturel de faire circuler de l'air dans un poumon que d'ouvrir un estomac et y placer un tube pour faire passer des nutriments ?

Certes, la symbolique de l'hydratation et de l'alimentation peut ne pas être la même, cependant, je n'ai jamais entendu dire que l'arrêt d'un respirateur entraînait un étouffement désagréable du malade. M. Schwartzenberg a raison, nous sommes dans le cadre d'une anesthésie générale. Or, sous anesthésie générale, on ouvre des crânes ou des thorax, on coupe des jambes et jamais personne ne s'est réveillé en faisant état de sensations désagréables. Depuis la loi du 4 mars 2002, l'arrêt d'un traitement de survie, qui peut être interrompu ou ne pas être mis en oeuvre, propose la mise en place d'une sonde gastrique qui peut être refusée par le patient. C'est bien qu'il s'agit d'un traitement. En revanche, le texte présenté aujourd'hui, fait au médecin l'obligation, qui, auparavant, n'était qu'un devoir, de sédater profondément le malade afin d'éviter tout désagrément.

Lorsque l'on pratique une sédation, il est logique de ne pas appuyer à la fois sur le frein et l'accélérateur et de maintenir une vie de manière lente et excessive. On ne peut cependant pas dire qu'il y a une souffrance. En revanche, si on arrête l'hydratation d'une personne à qui on n'administre pas une sédation, Dominique Tian a raison, il s'agit d'un soin que le malade ne peut pas refuser. On ne peut pas dire qu'il ne s'agit pas d'un traitement. Cela le Conseil d'État ne l'a pas décidé : il a simplement constaté que, dans la loi du 22 avril 2005, cela est interprété comme un traitement. Il a alors fallu adapter la terminologie, faute de quoi, prendre un cachet d'aspirine relèverait du traitement alors que la pose d'une sonde gastrique relèverait du soin.

Dans la mesure où cela figure déjà dans la loi, nous aurions pu ne pas l'écrire dans le présent texte. Mais le retirer à ce stade risquerait de créer une confusion entre le soin et le traitement sur le plan juridique et judiciaire.

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