Intervention de Dominique Schnapper

Réunion du 30 janvier 2015 à 9h00
Groupe de travail sur l'avenir des institutions

Dominique Schnapper :

Est-il acceptable, avez-vous demandé, que, les jeunes votant si peu, les vieux décident pour eux ? Vous touchez un problème social et politique incontestable. Il faut lutter contre l'abstention, j'en suis bien d'accord.

Le vote obligatoire permettrait-il de corriger ce dysfonctionnement ? J'aimerais que cela soit le cas. Je crains toutefois que sa mise en place ne conduise pas à faire augmenter la participation des plus jeunes, car leur abstention me semble due à des phénomènes plus profonds sur lesquels une simple disposition législative ne peut avoir de prise.

Outre le problème de la socialisation des jeunes, la fermeture du système politique français est en cause : notre classe politique est trop étroite, du fait du cumul des mandats. Certes, il est normal que celle-ci ne soit pas à l'image de la société tout entière, mais, lorsque de nombreuses catégories – les descendants de migrants, les jeunes, les femmes – ont le sentiment d'être exclues de la représentation, un dysfonctionnement se produit au regard des exigences démocratiques. J'accorde beaucoup d'importance au fait que la « marche des beurs » de 1983, fondée sur de grands principes républicains, ait laissé à ses participants le sentiment d'avoir été manipulés et de n'avoir pas reçu la place qu'ils réclamaient dans le système politique.

Mme Lazerges souligne que l'on ne peut pas tout refuser, et le vote obligatoire, et le vote électronique. Je suis tout à fait prête à reconnaître l'effet de génération dans ma propre réflexion.

M. Tusseau a insisté sur la différence entre l'appartenance à un groupe particulier et l'appartenance à la communauté des citoyens. Ce n'est sans doute pas le lieu de développer les nombreuses réflexions que m'inspire cette question.

Il a encore appelé de ses voeux l'invention de nouveaux rituels politiques. Nous n'ignorons pas l'importance qu'ils peuvent avoir, et en particulier celui du vote. Mais il faudra du temps pour que s'imposent de nouveaux rituels, et ils devront être portés par la légitimité et la nécessité. Pour l'instant – mais l'avenir est ouvert –, j'ai l'impression qu'internet ne favorise pas ce processus, car les rituels politiques exigent la présence physique des participants. Je fais cependant toute confiance aux jeunes générations pour qu'elles sachent se montrer créatives.

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