Intervention de Brigitte Allain

Réunion du 4 mars 2015 à 9h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBrigitte Allain :

Ce texte a trait à des droits qui me semblent fondamentaux et qui me tiennent particulièrement à coeur : l'égal accès de tous au service public et l'accès de tous les enfants à une alimentation variée, équilibrée et suffisante. Travaillant régulièrement sur les questions d'alimentation, j'ai en effet récemment été nommée rapporteure de la mission d'information sur les circuits courts et la relocalisation des filières agroalimentaires.

La cantine est bien sûr un vecteur de sociabilisation, d'échange et d'apprentissage de la collectivité. Mais, plus que cela, j'ai constaté lors de mes auditions qu'elle représente un enjeu majeur en termes d'éducation au goût, au partage, à l'alimentation et au civisme, qu'elle est un lieu hautement éducatif, où l'on assimile le principe de respect envers son voisin de table et la pratique du tri des déchets, où l'on apprend à apprécier et à ne pas jeter la nourriture.

Des efforts importants ont été accomplis ces dernières années pour introduire l'art culinaire ainsi que les produits bio et les produits locaux dans nos restaurants hors domicile, notamment avec la reprise en gestion directe des cuisines. Soutenus par le programme national nutrition santé et le programme national pour l'alimentation, et animés d'une forte volonté de progresser, les élus, directeurs d'écoles, intendants et parents d'élèves font évoluer les repas vers des assiettes plus équilibrées.

Le lien entre la qualité de l'alimentation et la catégorie socioprofessionnelle des parents est réel : les enfants issus des familles aux revenus modestes sont plus nombreux à souffrir de troubles de l'alimentation tels que l'obésité que des enfants nés de parents cadres ou de parents exerçant des professions intermédiaires. Il est donc stigmatisant et parfaitement inadmissible d'exclure certains enfants des restaurants scolaires sous le prétexte que leurs parents ne travaillent pas. Il est suffisamment traumatisant pour un enfant de grandir dans une famille en situation difficile sans qu'on lui fasse subir une exclusion supplémentaire.

Peut-on prendre le risque de priver un enfant de nourriture ? Que prétend-on lui enseigner si ce besoin fondamental n'est pas assouvi ? Comment un enfant peut-il ne pas ressentir l'injustice d'un tel rejet par une institution de la République ? Nous nous devons de refuser toutes les discriminations et les exclusions, violences morales subies plus vivement par les personnes les plus fragiles et notamment par les enfants. La Convention internationale des droits de l'enfant rappelle ces principes d'égalité et d'accès à l'alimentation. Elle interdit les sévices corporels et psychiques quels qu'ils soient. Être exclu du repas pris en commun constitue une maltraitance physique et morale. Il s'agit donc d'un enjeu de santé publique, d'égalité sociale et de civisme. Aucun enfant ne doit être victime de la condition sociale de ses parents. Aucun enfant ne doit se voir refuser l'accès au restaurant scolaire sous prétexte de quelque différence que ce soit – handicap, maladie ou régime alimentaire spécifique. Les écologistes défendront d'ailleurs un amendement en ce sens, que présentera Barbara Pompili.

Proposée par le groupe RRDP, cette proposition de loi recueillera sans aucun doute le soutien des écologistes, même si l'obligation de recourir à la loi pour rappeler le principe constitutionnel d'égal accès des usagers aux services publics nous interroge sur la société dans laquelle nous vivons.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion