Certaines opérations de maintien de l'ordre sont plus difficiles que d'autres, compte tenu de l'intensité croissante de la violence dans certaines zones. Percevez-vous alors une tension psychologique au sein de vos unités avant leur entrée en mission, par exemple à Sivens ou à Notre-Dame-des-Landes ? Pouvez-vous être conduits à faire des choix dans la mobilisation de certains personnels ?
Le responsable du groupe opérationnel, avez-vous rappelé, décide en lien avec l'autorité civile ; mais un groupe est par définition composé d'individus. Si l'un d'eux vous paraît flancher, pouvez-vous aller jusqu'à l'écarter des opérations, au moins provisoirement ?
Commandant Éric Le Mabec. Une unité de CRS réunit des hommes qui, au-delà de leurs missions ponctuelles de maintien de l'ordre, vivent ensemble deux cents jours par an. La cohésion entre eux dépasse donc le cadre professionnel ; elle nous aide pour constituer des groupes sur la base de compétences techniques, mais aussi par affinités. Des liens d'amitié contribuent aussi, d'ailleurs, à la reconnaissance du lien hiérarchique.
Dans nos formations, nous rappelons aux fonctionnaires les conséquences judiciaires auxquelles les exposent des ripostes individuelles spontanées ; reste que, au cours de déplacements d'une durée moyenne de trois semaines, des défaillances individuelles peuvent intervenir, que nous nous efforçons de déceler en dehors des opérations. Notre système de relève permet aussi de remplacer des fonctionnaires sans porter atteinte au dispositif opérationnel. Si un responsable constate que l'un des fonctionnaires flanche, il décide alors de le mettre à l'abri pour préserver la sécurité de son groupe.