Intervention de Marie-Claire Ponthoreau

Réunion du 13 mars 2015 à 9h00
Groupe de travail sur l'avenir des institutions

Marie-Claire Ponthoreau :

À entendre les uns et les autres, je constate un élément positif : l'idée qu'il existe un vrai problème concernant la responsabilité politique, en particulier celle du Président de la République, est partagée. Elle n'aurait sans doute pas fait l'objet d'un tel consensus il y a une vingtaine d'années. Désormais, la chose est dite : c'est très encourageant.

Je suis d'accord pour considérer qu'un aspect du problème relève du comportement des hommes et des femmes politiques, au-delà des institutions. Une réforme institutionnelle ne suffira donc pas à le résoudre.

Madame Buffet, je n'ai pas voulu mettre en cause le fait que l'élection permette aux forces politiques de participer au débat d'idées, ce qui est particulièrement important pour les petites formations, dont les candidats ont toute légitimité pour se présenter malgré leurs faibles chances d'être élus. Je ne parlais absolument pas de ce cas de figure, mais de Lionel Jospin qui avait été Premier ministre, qui se présentait à l'élection présidentielle et qui était battu au premier tour. Dans cette situation, il avait sa part de responsabilité.

Il convient de rappeler que l'on observait alors une emprise des petites formations politiques, justement, sur l'élection présidentielle : si ma mémoire est bonne, il y avait au moins seize candidats au premier tour. C'est précisément l'expression des dysfonctionnements de la Ve République que nous sommes en train d'évoquer. Pourquoi un tel investissement de toutes les formations politiques dans l'élection présidentielle, sinon parce que celle-ci est le moment démocratique par excellence, où les petits partis peuvent accéder aux moyens de communication de masse et à des moyens financiers pour eux exceptionnels ? Mais qu'a-t-on observé à l'élection qui a suivi ? Les grands partis avaient compris qu'il fallait filtrer les candidatures et éviter d'accorder le parrainage à tous les candidats qui prétendaient participer à l'élection.

Dans cette perspective, l'un des points à discuter me paraît être l'élection du Président de la République au suffrage universel direct. Si nous en sommes là, c'est effectivement que cette élection a de lourdes conséquences sur le fonctionnement de nos institutions. L'exemple de 2002 le montre, elle est, je le répète, le moment démocratique de notre vie politique. C'est un problème : pourquoi tout devrait-il tourner autour de l'élection du Président ? Pourquoi cette obsession présidentielle ?

Les hommes et les femmes politiques de notre pays devraient s'interroger sur ce point, mais cette situation vient aussi des conditions de gouvernabilité, qui se sont extraordinairement compliquées dans notre démocratie d'opinion. L'élection présidentielle est l'occasion pour les médias de mettre en avant des duels entre hommes et femmes politiques ; notre vie politique se résume en partie à cela.

En ce qui concerne la question du président Bartolone, tout est lié, me semble-t-il : il est difficile d'aborder la responsabilité politique sans parler de l'architecture institutionnelle globale. Au regard de l'évolution de la Ve République, je persiste à penser qu'il n'y a pas eu de modification importante de ce point de vue, seulement une accentuation, en effet, du phénomène de dilution de la responsabilité. La pratique gaullienne a été évoquée par Olivier Beaud : depuis lors, s'agissant du Président de la République, le problème se pose dans les mêmes termes. L'instauration du quinquennat n'a fait que le confirmer et le renforcer.

Quant à la difficulté à coopérer soulignée par Denis Baranger, peut-être faut-il en effet se concentrer sur la question des relations entre la majorité et le Gouvernement : sans doute le défaut d'articulation entre eux complique-t-il la situation. On a le sentiment que le Parlement n'est là que pour enregistrer la volonté gouvernementale, et non pour effectuer le travail approfondi qui lui incombe en réalité et qui n'est pas assez visible. Ce problème est probablement lié au fait que l'on ne rend pas visible l'accord permanent entre la majorité parlementaire et le Gouvernement dont le principe sous-tend le régime parlementaire : ces éléments de délibération n'apparaissent pas, le Parlement n'est pas le lieu où l'on en discute. Comment articuler le Président de la République, d'une part, et, de l'autre, le Gouvernement et la majorité parlementaire alors que le Président est de fait le chef de la majorité ?

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