Intervention de Marylise Lebranchu

Séance en hémicycle du 19 mars 2015 à 15h00
Faciliter l'exercice par les élus locaux de leur mandat — Présentation

Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique :

Madame la présidente, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les députés, je remercie le rapporteur, Philippe Doucet, d’avoir associé Philippe Gosselin à son travail pour aboutir à ce statut de l’élu qui est un message non seulement aux élus de France, mais aussi aux citoyens. Ce texte va ouvrir des portes à beaucoup de personnes qui estimaient jusqu’alors que leur vie professionnelle ne leur permettait pas d’accéder à un mandat.

Nous sommes en effet réunis pour concrétiser un travail collectif dont l’objectif est d’améliorer les conditions d’exercice des mandats locaux, de diversifier les profils de nos élus et donc de renforcer la vitalité de notre démocratie.

Ce texte, qui s’inscrit dans le cadre de la refondation de la vie politique voulue par le Gouvernement, est le témoignage de la rencontre de deux volontés : en soutenant le travail des parlementaires, nous avons également donné suite aux états généraux de la démocratie territoriale dont cette proposition de loi des sénateurs Jacqueline Gourault et Jean-Pierre Sueur est issue.

Le Sénat et l’Assemblée nationale ont enrichi le texte tout au long d’un parcours législatif constructif et fructueux. Permettez-moi de saluer la qualité de ce travail parlementaire, trop peu souvent reconnue par les gazettes. À l’issue de la commission mixte paritaire, le texte a, je crois, atteint un point d’équilibre satisfaisant, qui permettra de mettre en oeuvre des dispositions importantes pour les élus locaux et pour l’accès de nos concitoyens, dans leur diversité, aux mandats électifs locaux.

Un aspect intéressant de ce texte est qu’il est, dans sa majeure partie, d’application immédiate. Dès les prochaines élections, les élus seront protégés par ce statut et les citoyens sauront quels élus ils ont vraiment, à tous points de vue, même si j’ai pu sentir au Sénat quelques réticences – que je peux comprendre – concernant notamment la charte de l’élu local. C’était faire oeuvre de transparence totale que d’adopter le texte en l’état.

Dans la grande majorité des cas, être élu local, c’est d’abord être bénévole. Contrairement aux élus des conseils régionaux et départementaux, les élus communaux et intercommunaux ne perçoivent pas d’indemnités. Nombreux sont ceux qui donnent de leur temps sans en tirer profit. Leur accorder la valorisation des acquis de l’expérience est bien le moins que l’on puisse faire pour eux !

Vous êtes réunis sur ce texte alors que l’exercice d’un mandat électif est de plus en plus exigeant, la vie politique difficile et la démocratie fragilisée. Nous voyons tous la défiance envers les élus s’installer. Il y a danger et la lecture du statut par les citoyens peut briser cette spirale infernale.

On dit souvent qu’il « faut » que les femmes se présentent aux élections. Mais les femmes ne sont pas égales aux hommes dans l’accès aux mandats électoraux. Comment s’engager dans la vie locale lorsque le soutien matériel et moral fait défaut, lorsque le bagage intellectuel, la formation dont on a bénéficié rendront difficile le retour à la vie active ?

Il faut souligner l’investissement des élus, souvent bénévoles, et, quand elles existent, la faiblesse des indemnisations. Il faut garantir à la population qu’elle sera représentée par des élus issus de l’ensemble de la société française, dans sa diversité. N’oublions pas qu’exercer un mandat local, c’est se mettre au service non seulement de ses électeurs, mais aussi de la France tout entière.

Dans le cadre de la refondation de la vie politique, impulsée par le Président de la République, des textes relatifs à la transparence de la vie publique, à la lutte contre l’évasion fiscale, à l’instauration de la parité pour les conseillers départementaux ou encore à la fin du cumul des mandats ont été votés. Ce sont des avancées majeures qui ont pu être accomplies en faveur de l’exemplarité, un édifice que vous consolidez aujourd’hui avec ce texte.

Les dispositions techniques permettront à de nouveaux citoyens d’accéder à un mandat sans pour autant devoir renoncer à leur carrière professionnelle, de bénéficier réellement d’un droit à la formation et de la validation des acquis de l’expérience. Administrer une collectivité locale, c’est acquérir des connaissances importantes en matière de gestion ou de droit de l’urbanisme, c’est comprendre les problèmes sociaux et maîtriser la médiation. Ces acquis méritent d’être validés, pour ouvrir l’accès à une voie professionnelle plus intéressante, si possible, que celle qui a dû être abandonnée après l’élection.

Ces questions sont celles non seulement des élus, mais aussi des citoyens, et je vous remercie d’y avoir répondu. Le texte prévoit aussi que des sanctions seront appliquées en cas d’absence des élus. J’ai entendu récemment qu’il en irait de même dans une autre assemblée. Cela ne choque personne. À chaque fois que l’élu n’est pas là où on l’attend, il ne remplit pas son mandat.

Philippe Doucet l’a rappelé, le délai de six mois après la fin du mandat était insuffisant pour se former, retrouver un travail et, pour une personne travaillant en libéral, se réinstaller, retrouver sa clientèle, rééquilibrer son budget. Je salue aussi la prise en charge des frais de garde d’enfants pendant les sessions des assemblées délibérantes – il est vrai que les séances en commission des finances dépassent parfois les horaires des garderies. C’est un clin d’oeil aux femmes, mais surtout aux pères qui doivent désormais partager le temps de garde des enfants. Il n’est pas question de « prendre en otage » ces petits qui, grâce à cette possibilité, apprendront que servir l’intérêt général est un engagement qui se fait non pas au détriment de sa famille, mais dans l’intérêt des futurs citoyens qu’ils sont.

Les solutions pragmatiques que vous avez apportées sont indispensables et permettront une remarquable articulation des droits et devoirs des élus locaux. Sans doute ce texte nous donnera-t-il le moyen d’encourager nos concitoyens à se présenter aux élections. On a les élus que l’on mérite, ai-je coutume de dire en souriant ; encore faut-il que les élus puissent représenter la France, dans la diversité des parcours individuels et professionnels. Je vous remercie d’avoir porté cette proposition de loi.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion