Intervention de Marisol Touraine

Réunion du 18 mars 2015 à 16h15
Commission des affaires sociales

Marisol Touraine, ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes :

Les députés de l'opposition ont déclaré que l'article 9 était important et qu'il fallait donc le supprimer. J'ai entendu que le dispositif proposé était illégal, que le Conseil d'État l'estimait infondé : or celui-ci a simplement considéré qu'un décret ne suffirait pas et qu'il faudrait passer par la loi. C'est bien pourquoi nous vous soumettons aujourd'hui ce projet, car, s'il n'y avait pas eu besoin de la loi, ces salles de consommation de drogue à moindre risque auraient déjà été mises en place par décret.

L'objectif du Gouvernement n'est pas de banaliser, de faciliter la consommation de drogue, mais de prendre en compte des situations qui existent, qu'on les supporte ou pas, qu'on les voie ou pas, et dans lesquelles se retrouve un nombre non négligeable de personnes. Même si tous ne sont pas concernés par les expérimentations que nous proposons, on compte en France plus de 80 000 usagers de drogue par voie intraveineuse et cent morts par overdose chaque année. Parmi ces personnes, des femmes et des hommes restent exclus de tout ; c'est à eux que s'adresse le dispositif.

Certes, des centres existent déjà, comme les CAARUD, mais certains individus restent réfractaires à tous ces dispositifs, et c'est pourquoi nous proposons des solutions qui ne marcheront sans doute pas dans tous les cas – si nous avions la certitude de pouvoir sortir de l'engrenage de la drogue la totalité des personnes accueillies, nous serions très heureux et nous n'hésiterions pas –, mais nous ne pouvons nous résigner à ce que des femmes et des hommes ne trouvent pas de solutions, d'accompagnement, de soutien, et continuent de se droguer, non seulement dans des entrées de parking, mais aussi dans des jardins publics – dans les bacs à sable desquels on a retrouvé des seringues. Est-ce là l'avenir que nous voulons proposer ?

Notre démarche est donc à la fois volontariste, réaliste et pragmatique. Et, puisque nous n'avons pas de certitudes, comme nous ne nous soumettons à aucune idéologie – le mot a été employé –, les dispositifs que nous proposons sont évolutifs. Nous voulons répondre à la réalité des situations et non pas brandir l'étendard du bien contre celui du mal. L'expérimentation sera de six ans au maximum, et seules les villes, les structures candidates mèneront ces expérimentations, toutes soumises à un cahier des charges. Nous sommes donc loin d'une France qui se couvrirait de salles de consommation de drogue à moindre risque : il faut savoir raison garder.

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