Intervention de Bernadette Laclais

Réunion du 17 mars 2015 à 17h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBernadette Laclais, rapporteure :

Le titre II du projet de loi, que j'ai l'honneur de rapporter, est consacré à des mesures tendant à simplifier le parcours de santé des patients.

Quatre des seize articles qu'il comporte ont mobilisé toutes les attentions. Ils se sont traduits par des évolutions qui ne remettent pas en question l'objectif principal : l'amélioration de l'accès aux soins.

À l'article 18, le tiers payant a suscité bien des débats ainsi que des oppositions. Certains ont évoqué le risque de la gratuité et d'un recours inflationniste aux soins inutiles. On sait pourtant que le tiers payant ne sera appliqué qu'en cas de respect du parcours de soins. Il vise à faire diminuer les renoncements aux soins et à permettre à un plus grand nombre de nos compatriotes d'être soignés « au bon moment ».

Les inquiétudes sur la mise en oeuvre sont légitimes et doivent être prises en compte. Vous avez, madame la ministre, entendu la demande des professionnels qui ont le droit de bénéficier du tiers payant en un seul geste : un « clic » doit suffire à garantir au médecin qu'il sera payé en temps et en heure. Vous avez par ailleurs déposé un amendement qui institue des obligations de résultat pour l'assurance maladie. Mais je souhaiterais savoir quelle sera la situation du côté des organismes complémentaires. Le tiers payant n'est transparent que si le professionnel n'a pas à se soucier de la différence entre les deux. Les mêmes obligations doivent être appliquées à tous les payeurs : simplicité de l'utilisation, lisibilité des droits et garantie du paiement.

À l'article 12, l'instauration du service territorial de santé au public a également été beaucoup débattue. Si tous s'accordent sur la nécessité de décloisonner les pratiques et de mieux se coordonner, des inquiétudes ont été soulevées sur le rôle du médecin généraliste, la place de l'Agence régionale de santé (ARS) au regard du principe de subsidiarité ou l'architecture trop administrative du service territorial. Les amendements déposés par le Gouvernement ont donc infléchi le dispositif. La place du médecin généraliste est mieux affirmée, avec l'instauration des équipes de soins primaires, et la coopération entre professionnels consacrée avec la mise en place des communautés professionnelles territoriales de santé. Le rôle de l'ARS est, quant à lui, mieux identifié : l'agence doit s'assurer de l'égalité et de la continuité de la prise en charge des patients, en liaison avec les acteurs du système de santé, dans le cadre du territoire démocratique sanitaire de l'article 38. Les améliorations que je souhaite apporter à l'article 12, notamment la question de la prise en compte des soins palliatifs sur le territoire, seront donc logiquement discutées au titre IV.

La réinstauration d'un bloc de service public hospitalier (SPH) à l'article 26 a aussi beaucoup été commentée. L'approche matérielle du service public répartie entre quatorze missions a vécu. Le service public, dont la quintessence relève des fameuses lois de Rolland, ne saurait se réduire à un choix à la carte. Je rappelle que le rapport Couty évaluait à 80 % l'activité de service public assurée par les hôpitaux et ne relevant pas des quatorze missions décrites par le code de la santé publique. Alors qu'elle fait l'objet d'exigences exorbitantes du droit commun, il ne m'apparaît pas anormal de considérer que la mission de SPH relève avant tout de l'hôpital public. Mais parce que notre tradition de service public autorise aussi l'association du secteur privé, il ne m'apparaît pas non plus anormal d'y associer ce dernier dans le respect des mêmes exigences. L'amendement déposé par le Gouvernement réaffirme ce principe et procède à des améliorations bienvenues. Je propose cependant d'aller plus loin afin que l'accès à des soins palliatifs puisse être amélioré par la mise en place de solutions sans hébergement via l'hospitalisation à domicile. La coopération des établissements de santé du SPH avec les centres de santé gagnerait aussi à être davantage soulignée.

Dernier enjeu, et non des moindres : la mise en place des groupements hospitaliers de territoire (GHT). Le GHT constitue une nouvelle forme de coopération conventionnelle fondée sur une adhésion obligatoire des établissements publics de santé, un projet médical partagé et une mutualisation de fonctions. Or le dispositif proposé a nourri quelques craintes et s'est traduit par le dépôt d'un amendement gouvernemental de rédaction globale. Celui-ci précise l'architecture sur plusieurs points : gouvernance, place des centres hospitaliers universitaires (CHU) et des centres hospitaliers spécialisés, de l'hospitalisation à domicile, et clarification de la place des établissements privés. Pour ma part, je considère que le dispositif pourrait être amélioré en précisant notamment la place particulière des élus au sein de la gouvernance. J'ajoute qu'il aurait paru pertinent que la loi permette, par option, d'aller plus loin, c'est-à-dire, pour ceux qui le souhaitent, jusqu'à la fusion.

Les douze autres articles de ce titre du projet de loi ont été beaucoup moins commentés. Ils n'en sont pas moins importants, car ils visent à améliorer l'accessibilité aux soins.

Celle-ci passe par une meilleure organisation des soins. L'article 13 vise ainsi à définir la politique de santé mentale, dont la psychiatrie de secteur constitue un volet important. Tous les professionnels ont souligné la nécessité de concevoir une nouvelle organisation territoriale de proximité fondée sur les besoins des usagers. Je proposerai quelques améliorations à la commission, comme la prise en compte du caractère pluriprofessionnel de la prise en charge des patients ou la préservation des conseils locaux de santé mentale, dont l'apport est largement reconnu.

Enfin, l'article 25 constitue un virage majeur dans l'échange et le partage de l'information. Il introduit la notion d'équipe de soins, constituée des professionnels de santé et médico-sociaux, au sein de laquelle pourront circuler les données nécessaires à la prise en charge du patient, dont le consentement est présumé. La définition de l'équipe de soins pourrait être complétée afin d'inclure les professionnels de santé, très investis dans la prise en charge de la douleur. Cet article refonde par ailleurs le DMP, désormais intitulé « dossier médical partagé » et dont la mise en oeuvre relèvera de l'assurance maladie. L'accès permanent au DMP est réaffirmé à côté du possible masquage des données par le patient et de son accès à la liste des professionnels autorisés à le consulter. Plusieurs points mériteraient d'être améliorés, parmi lesquels le contenu du DMP – dons d'organes et directives anticipées pourraient figurer dans ce dossier – ou le droit à l'oubli, dont je ne méconnais pas les difficultés que son instauration peut poser pour les professions médicales.

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