Intervention de Monique Orphé

Réunion du 17 mars 2015 à 17h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMonique Orphé, rapporteure pour la Délégation aux outre-mer :

Madame la ministre, la santé est un problème majeur qui concerne aussi les territoires d'outre-mer où il se pose parfois de façon particulière. Malgré les efforts déployés, de graves et persistantes inégalités y demeurent par rapport à l'hexagone. Ce disant, je m'appuie sur un rapport de la Cour des comptes de juin 2014, qui met en avant les nombreuses disparités et les retards importants, mais également sur les indices de développement humain des territoires d'outre-mer, en particulier l'indice santé : on relève des écarts de douze à vingt-huit ans entre les territoires ultramarins et ceux de la Métropole.

Malgré quelques rattrapages, le chantier reste vaste. Quatre exemples sont particulièrement illustratifs du chemin qui reste à parcourir.

D'abord, les taux de mortalité infantile, de grossesses précoces et de recours à l'IVG dans les outre-mer sont deux fois plus élevés que dans la Métropole, et les causes restent non identifiées en raison d'un manque de données sur ces sujets.

Ensuite, certaines pathologies sont inconnues en métropole, donc spécifiques aux territoires ultramarins – dengue, chikungunya, paludisme… D'autres ont une prévalence particulière, telles que l'infection à VIH, les hépatites virales, le diabète ou encore l'obésité. Or ces pathologies méritent une prévention accrue ou un dépistage précoce pour une meilleure prise en charge.

Le troisième exemple est celui des conduites addictives spécifiques. En effet, le plan de lutte contre les drogues 2013-2017 a noté dans les DOM une précocité de consommation, notamment de l'alcool, chez les jeunes et une polyconsommation des différentes substances. Lors de la présentation de mon rapport sur la santé à la Délégation aux outre-mer, de nombreux députés ultramarins m'ont fait part de leurs inquiétudes sur ce sujet. Nous devons prévenir plus efficacement ces conduites addictives, qui sont souvent source de violences diverses. Madame la ministre, vous êtes engagée dans la lutte contre le tabac, mais l'alcool, qui tue beaucoup plus dans nos territoires, doit aussi être un combat que vous devez mener à nos côtés.

Enfin, le dernier exemple est celui de la faible densité médicale dans les DOM. Ce constat est valable pour les praticiens hospitaliers, mais aussi pour les médecins exerçant la médecine libérale.

Face à l'ensemble de ces fléaux, le projet de loi relatif à la santé apporte un certain nombre de réponses.

Il convient d'observer, tout d'abord, que la plupart des mesures contenues dans le projet de loi, même si elles ne visent pas expressément les DOM, ont vocation à s'y appliquer. Il s'agit des articles 3, 4, 7, 26, 37 et 56, ce dernier visant spécialement les outre-mer. Néanmoins, ces mesures peuvent paraître générales et insuffisamment ciblées sur les questions spécifiques qui se posent dans les collectivités ultramarines.

Plusieurs de mes amendements sont de nature à apporter des remèdes aux problèmes rencontrés dans les territoires. La plupart ont été repris par mon groupe, ce dont je me félicite.

Le premier amendement prévoit l'intégration, de manière expresse, des problèmes ultramarins dans la stratégie nationale de santé.

Le deuxième tend à créer des pôles d'excellence en matière de recherche et de médecine tropicale dans les territoires ultramarins. Je propose que le Gouvernement favorise l'émergence de pôles d'excellence en matière de recherche et de médecine tropicale dans une ou deux zones géographiques concernant tout particulièrement les outre-mer.

Troisièmement, je propose de favoriser l'essor de la télémédecine à Wallis-et-Futuna. Compte tenu de l'éloignement du territoire et de sa faible densité médicale, il s'agirait là d'un moyen très opérant pour améliorer tant la prévention que l'offre de soins. Avec mon collègue Napole Polutélé, je propose également que l'ARS de Wallis-et-Futuna, en cas d'évacuation sanitaire du patient, transmette un document à sa signature et à la personne accompagnante, les informant des modalités et des conséquences, notamment financière, de ce transfert.

Le cinquième amendement prévoit l'obligation de faire figurer des données chiffrées concernant les départements ou collectivités d'outre-mer dans toute statistique déclinée au niveau local.

Le sixième amendement propose la remise d'un rapport par le Gouvernement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi, indiquant les modalités selon lesquelles il serait possible d'instaurer à Mayotte la CMUC.

Enfin, un amendement prévoit la possibilité pour les centres hospitaliers de développer des actions de santé visant à améliorer l'accès et la continuité des soins, ainsi que des actions liées à des risques spécifiques, dans les territoires de santé isolés ultramarins.

Je souhaite par ailleurs, madame la ministre, insister sur trois amendements d'appel sur lesquels j'aimerais que nous débattions.

Le premier tend à limiter la taille des surfaces publicitaires en faveur de l'alcool.

Le deuxième vise à améliorer les études statistiques concernant la santé dans les DOM.

Le troisième concerne l'interdiction de l'affichage publicitaire en faveur des boissons alcoolisées à moins de deux cents mètres des établissements scolaires.

Je souhaiterais conclure mon propos en vous demandant, madame la ministre, de prendre un engagement solennel en promettant à la représentation nationale que le Gouvernement procédera bien prochainement par ordonnance pour mettre en place un plan de rattrapage décliné dans chaque territoire ultramarin.

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