Intervention de Myriam El Khomri

Séance en hémicycle du 26 mars 2015 à 9h30
Questions orales sans débat — Chômage des jeunes diplômés issus des quartiers populaires

Myriam El Khomri, secrétaire d’état chargée de la politique de la ville :

Monsieur le député, je partage votre opinion, notamment s’agissant des effets d’entraînement : si de jeunes diplômés se retrouvent au chômage, ce sont nos discours sur l’école qui en prennent un coup ! C’est pourquoi cette question est pour nous prioritaire.

Les jeunes diplômés résidant dans les quartiers prioritaires subissent un taux de chômage en moyenne deux fois supérieur à celui constaté dans leur unité urbaine. Le diplôme, dernière digue contre le chômage dans ces quartiers, ne protège plus suffisamment pour compenser les difficultés d’accès à l’emploi.

Les études menées sur le sujet font état de plusieurs facteurs susceptibles d’expliquer les difficultés particulières rencontrées par ces jeunes pourtant combatifs, et qui ont du talent et du potentiel.

Le premier, à mes yeux, est le manque de réseau personnel et professionnel, et les phénomènes de discrimination liés soit aux origines, soit au lieu de résidence. Ces jeunes ont aussi parfois des parcours scolaires plus difficiles et des orientations moins favorables, avec un faible taux d’accès à l’enseignement supérieur : seuls 19 % des jeunes des zones urbaines sensibles possèdent un diplôme de l’enseignement supérieur, alors que le taux est de 42 % dans l’ensemble du pays. Ils connaissent moins bien les filières proposées, et peuvent avoir le sentiment que l’enseignement supérieur n’est pas pour eux – il importe de désenclaver aussi les esprits. On observe en outre un moindre accès à l’apprentissage et aux études supérieures courtes, et, parfois, des problèmes de mobilité : améliorer l’accès aux transports dans ces quartiers est une exigence.

Afin de remédier à l’ensemble de ces difficultés, un certain nombre de mesures ont été prises, qui ont été renforcées lors du comité interministériel sur l’égalité et la citoyenneté du 6 mars dernier. La solution passe évidemment par un accompagnement très en amont, dès le plus jeune âge. C’est ainsi que le programme de réussite éducative – dont, je crois, beaucoup d’élus locaux et de parents sont satisfaits – permet à certains enfants de bénéficier de parcours individualisés adaptés à leurs besoins. De même, le dispositif des « Cordées de la réussite » promeut l’accès à l’enseignement supérieur, notamment dans les filières d’excellence, des élèves des collèges et lycées les plus méritants. Dans le même souci d’ouverture sociale, les classes préparatoires intégrées visent à diversifier le recrutement de la haute fonction publique en facilitant la préparation des concours d’accès.

Toutefois, vous l’avez souligné, la réussite des études ne garantit pas la réussite professionnelle. Pour surmonter ces obstacles, le ministère de la ville mène, en liaison avec le ministère de l’emploi et le service public de l’emploi, une politique volontariste visant, d’une part, à renforcer les dispositifs de droit commun – la politique de la ville ne peut rien sans le droit commun et la mobilisation de l’ensemble des ministères –, d’autre part, à engager des actions innovantes d’accompagnement et de soutien renforcé en direction des jeunes diplômés. Tel est l’objet du ciblage des contrats aidés, qui comprend notamment l’objectif d’une proportion de 30 % d’emplois d’avenir cette année, ou du dispositif des garanties jeunes. Tel est aussi l’objet de la création, dans le cadre du comité interministériel à l’égalité et à la citoyenneté, de 13 000 contrats « starter » ouverts aux jeunes de moins de 30 ans issus des quartiers prioritaires ; destinés uniquement aux entreprises du secteur marchand, ce nouveau contrat prévoit une aide de l’État équivalente à 45 % du SMIC brut, ce qui devrait favoriser le ciblage des contrats initiative emploi en direction des jeunes des quartiers.

Pour assurer la territorialisation de ces mesures, nous avons obtenu le fléchage de conseillers supplémentaires de Pôle emploi, chargés par exemple d’un accompagnement individualisé. Le comité interministériel du 6 mars a prévu la mise en oeuvre, en liaison avec l’APEC – l’Association pour l’emploi des cadres –, d’une initiative de ce type à destination des jeunes diplômés.

Afin de compenser le manque de réseaux professionnels, nous allons développer de façon massive les dispositifs de type « parrainage », qui constituent des solutions concrètes et efficaces, avec un taux de sortie positive – y compris vers un CDI – d’environ 65 %. Le Gouvernement a décidé d’intensifier le recours à ce dispositif, qui devrait bénéficier à 60 000 jeunes en 2017. Quand un jeune est parrainé par une personne appartenant à une entreprise, par exemple par l’intermédiaire d’une association comme « Nos quartiers ont du talent », il trouve un emploi en six mois, contre deux ans en temps normal.

Les discriminations auxquelles sont confrontés les résidents des quartiers prioritaires s’ajoutent aux phénomènes d’exclusion sociale et territoriale. Pour lutter contre elles, le Gouvernement promeut la généralisation des plans territoriaux de lutte contre les discriminations et le développement d’actions de recrutement innovantes, à l’image de celles engagées par les entreprises labellisées « Diversité » ou signataires de la charte « Entreprises

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