Intervention de Alexis Bachelay

Réunion du 24 mars 2015 à 17h00
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlexis Bachelay :

Le chantier du Grand Paris et son réseau de transport constitue un enjeu qui, au-delà de l'agglomération parisienne, revêt une dimension nationale. À nos yeux, le sujet essentiel est celui des déchets liés à ce chantier qui, en termes d'environnement, devront être traités de façon exemplaire. Comme vous le savez, avec mon collègue Yves Albarello, nous avons publié en décembre dernier un rapport parlementaire sur la mise en oeuvre de la loi du 3 juin 2010 relative au Grand Paris. Dans ce rapport, nous consacrons un chapitre à cette question et nous avons suggéré d'approfondir ce travail par une table ronde pour l'organisation de laquelle je remercie le président Jean-Paul Chanteguet.

Les chantiers du Grand Paris vont produire des volumes considérables de déchets, ce qui soulève des interrogations sur la nature et la gestion de ceux-ci auxquelles plusieurs réponses viennent, certes, d'être apportés mais qui appellent encore des éclaircissements.

Entre 2015 et 2030, l'ensemble des chantiers pourrait produire au moins 60 millions de tonnes de déblais de nature très diverse. Or la question qui nous est posée est de savoir ce que nous allons faire de ces monceaux de matériaux et déchets. Il importera également de montrer l'exemplarité de ces chantiers alors que la Conférence des parties de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (COP 21) se tiendra à la fin de l'année à Paris, au moment des premiers coups de pioche de la ligne 15 Sud.

Aujourd'hui, nous ne pouvons que constater l'insuffisance des capacités de stockage au regard des volumes attendus de déchets. Ainsi, dans les conclusions de notre rapport, nous nous interrogeons sur la bonne anticipation de notre capacité à stocker ces déchets à proximité des chantiers. Faute de quoi, nous serions conduits à exporter des déchets hors de la région Île-de-France, ce qui représenterait de nombreux inconvénients en termes de pollution, de transport et de coûts.

À ce sujet, je voudrais saluer les déclarations de la SGP dont le président a rappelé que celle-ci se donnerait les moyens de régler ce problème en lien avec la région.

Par ailleurs, la question des déblais appelle d'autant plus de vigilance que la quantité prévisible de terres polluées est importante et difficile à évaluer. M. Yves Albarello y reviendra sans doute : selon les chiffres de la Direction régionale et interdépartementale de l'environnement et de l'énergie (DRIEE) Île-de-France, dans notre région, historiquement très industrialisée, les surfaces concernées par le risque de pollution des sols d'origine industrielle sont supérieures à 5 000 hectares pour l'agglomération parisienne, dont 1 500 hectares pour Paris et la petite couronne. Or les projets qui composent le Grand Paris requièrent la reconversion de nombreuses emprises foncières dont certaines comportent des pollutions. En outre, la mise en oeuvre du projet pourrait conduire à la découverte de sites pollués non identifiés jusqu'à présent. Je souhaiterais donc connaître quelles sont les études d'anticipation conduites dans ce domaine.

Un autre aspect essentiel à traiter est la gestion des déchets. Cela passe par la sensibilisation des acteurs, notamment avec la formation des professionnels qui doivent être orientés vers une meilleure prise en compte de ces problèmes. Bien entendu, le tri constitue le premier et principal traitement devant être appliqué aux déchets produits par la réalisation du chantier. Il est également primordial que les mélanges des déblais pollués et non pollués soient évités afin de prévenir tout risque de contamination et d'optimiser la part des volumes valorisables.

L'objectif est de limiter l'empreinte environnementale du transport des déchets. Il est alors nécessaire de privilégier les modes de transports non polluants en évacuant le maximum de déchets non recyclés in situ par voie fluviale ou par voie ferrée, ce qui a été évoqué par M. Philippe Yvin. À cet effet, la construction de la ligne 15 Sud verra la création de deux plates-formes ferroviaires et de deux plates-formes portuaires qui permettront cette évacuation.

D'autre part, et M. Erwan Le Meur l'a évoqué, les déchets doivent être recyclés et valorisés. Il convient en premier lieu de limiter les déplacements des déchets. En ce sens, la mise en place d'espaces de stockage temporaires, près des chantiers, est utile. À cet égard, je fais confiance au travail entre les professionnels et la Société du Grand Paris dont je constate qu'il est en cours.

Une partie des déchets pourra être réutilisée, le gypse, par exemple, pour combler des carrières, la terre pour des travaux de terrassement et des granulats extraits pour fabriquer le béton. Ainsi, l'économie circulaire doit être un volet essentiel.

Ensuite, le Grand Paris devra se mettre en conformité avec la loi sur la transition énergétique qui fixe des objectifs comme la valorisation de 70 % des déchets du BTP dès 2020 et je souscris à l'idée d'en faire l'un des objectifs du chantier.

Autre préconisation, celle d'exiger des entreprises associées au chantier qu'elles recourent davantage aux matériaux recyclables. Nous avons regretté dans le rapport qu'un certain nombre d'ingénieurs se tournent, par culture, vers les matériaux naturels, plutôt que vers les recyclables, y compris quand ils ont les mêmes propriétés techniques et sont 30 % moins chers. C'est pourquoi je m'adresse au donneur d'ordres qu'est la SGP pour qu'elle insiste davantage sur les matériaux recyclables dans les appels d'offres alors qu'ils en sont parfois exclus dès le départ. Cela aurait pour vertu supplémentaire, l'économie de matériaux naturels.

Aujourd'hui, nous nous réjouissons de l'avancée des travaux du Grand Paris, et notamment de la construction de la ligne 15 Sud. En même temps, l'avancée soutenue de ces travaux et le respect des calendriers ne doivent pas nous soustraire au strict respect des normes environnementales que nous nous sommes fixées. Aussi devons-nous demeurer très attentifs à ces questions : malgré les contraintes calendaires, l'exemplarité environnementale doit être au rendez-vous du chantier du Grand Paris.

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