Intervention de Éric Ciotti

Réunion du 25 mars 2015 à 9h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Ciotti, rapporteur :

Je voudrais essentiellement apporter des réponses juridiques aux points qui ont été soulevés, ou plutôt aux questions qui ont été posées, de manière pertinente et équilibrée, et sans a priori, par M. Alain Tourret et par M. Dominique Raimbourg. Tous deux ont souligné la légitimité de ce débat. Ce dernier a même proposé qu'à l'issue du vote, nous puissions élargir la problématique en constituant une mission de réflexion.

Nous sommes en effet en face de problèmes soulevés par la jurisprudence de la Cour de cassation. Au demeurant, les propositions que je formule restent dans le cadre précis et contraignant fixé par la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, qui s'est récemment prononcée à propos du tir d'un gendarme dirigé contre une personne menottée tentant de s'évader. Nous en avons tiré les conséquences, en établissant des critères nouveaux de responsabilité, avec l'objectif de rapprocher policiers et gendarmes.

Tout à l'heure, Jean-Frédéric Poisson faisait état du statut militaire de ces derniers. Je rappelle toutefois que, depuis 2009, ils sont rattachés au ministère de l'Intérieur. Il est difficile de concevoir que des dépositaires de l'autorité publique, confrontés à la même menace et agissant sous la même autorité ministérielle, soient soumis à deux régimes juridiques différents.

Dans son intervention, notre collègue Raimbourg a exprimé plus de doutes que de certitudes, car nous sommes en face d'un problème complexe. Aussi voulons-nous améliorer les possibilités d'interprétation, sans rien supprimer, pour les gendarmes, du code de la défense nationale. Nous souhaitons seulement préciser trois critères, des critères supplémentaires visant à harmoniser le statut de tous les dépositaires de la force publique utilisant la force armée. Je reprends la formule pour Alain Tourret, qui s'inquiétait d'une rédaction trop large de la proposition de loi – un amendement répondra à sa préoccupation, en restreignant la rédaction.

Monsieur Collard, vous avez caricaturé la proposition de loi, dont seul le 3° de son article unique concerne les sommations. En recourant à la notion de danger imminent, elle couvrirait une situation telle que celle qui s'est produite à Charlie Hebdo. La direction générale de la police nationale s'est penchée sur l'hypothèse d'un tueur fou ayant, tel Breivik, rangé son arme, et se trouvant dans la rue après avoir tué un nombre important de personnes. Cette notion de danger imminent recouvre des cas nouveaux. Mme Monéger, directrice de l'Inspection générale de la police nationale (IGPN), entendue dans le cadre de mes travaux préparatoires, était gênée de devoir convenir que des cas ne sont aujourd'hui en effet pas prévus. Nous parlons de ceux où la police a préalablement connaissance que cette personne a déjà tué.

Ensuite, nous évoquons les violences graves. Cela concerne les situations où un dépositaire de l'autorité publique ferait l'objet d'une attaque violente, tel le gendarme Nivel ou le commissaire Illy à Sarcelles, pris à partie par une quinzaine d'assaillants, toutefois non armés. Enfin, nous abordons la question des sommations. Monsieur Collard, vous parlez d'un huissier… Libre à vous de caricaturer le contenu de ce texte.

Monsieur Raimbourg, vous vous inquiétez de la définition des armes portées par les individus en question : elles peuvent être de tout type, mais doivent être en lien avec le danger, ce qui prévient les dérives que vous craignez. Je rappelle que la proposition n'établit pas de présomption de légitime défense, ce qui serait contraire à la Constitution, car cela induirait a contrario une présomption de culpabilité. Tel n'est pas l'objectif de cette proposition.

Nous ne faisons que sécuriser le cadre d'interprétation des magistrats. Il y a eu des condamnations qui nous conduisent à vouloir que la jurisprudence actuelle, qui n'est pas protectrice pour les policiers, puisse changer. Lorsque le danger est imminent, que des armes sont employées et que la nécessité est établie, les conditions sont remplies au regard de la jurisprudence de la Cour de cassation comme de la Cour européenne des droits de l'homme.

Heureusement, madame Pochon, que M. Raimbourg a sauvé l'argumentation de la majorité. Sans vous faire de procès d'intention, j'ai noté que vous avez dit, sans doute par simple maladresse, que vous déplorez « quand même » la mort de policiers en service.

Plusieurs membres du groupe socialiste. Faux procès ! Vous avez mal entendu ! C'est lamentable.

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