Intervention de Bernard Accoyer

Séance en hémicycle du 31 mars 2015 à 15h00
Modernisation du système de santé — Motion de renvoi en commission

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBernard Accoyer :

Ces mesures aboutiront en effet immanquablement à une consommation excessive, à un dérapage des dépenses. Par conséquent, la part des remboursements montera tandis que la part financée par les assurances complémentaires baissera et, sans qu’il n’y paraisse, puisque le tiers payant le masquera, ce qui est tout de même paradoxal, cela aboutira à une privatisation, ou à tout le moins à une baisse de l’engagement du régime obligatoire. En d’autres termes, vous anesthésiez le pays avec une mesure dangereuse qui va mettre l’assurance maladie en grande difficulté et, en interdisant l’utilisation de toute franchise, c’est-à-dire tout mécanisme responsabilisant, vous masquerez ce qui en découlera, à savoir le retrait du régime d’assurance maladie obligatoire.

Mes chers collègues, qu’en serait-il vraiment de la mise en oeuvre du tiers payant ? Les médecins, tout d’abord, sont déjà dans des situations très difficiles : comme vous le savez, c’est une des professions les plus frappées par le burn out. Or, un tel dispositif est ingérable pour eux, il est angoissant, chronophage. Comment voulez-vous que les médecins s’en sortent s’il leur faut harceler les 500 assurances complémentaires auxquelles ils devront s’adresser ?

L’inflation que cette mesure va entraîner, en termes tant de consommation que de coûts, n’est pas non plus prise en compte. D’ailleurs, l’expérience à laquelle vous vous référez sur ce point, le tiers payant pharmaceutique, mérite d’être rappelée. Lorsque ce mécanisme a été instauré, la consommation de médicaments a augmenté de façon importante. À ce jour, et vos dénégations n’y changeront rien, madame la présidente de la commission, les impayés mensuels moyens dans les officines sont encore de 3 000 euros. En redoutant et en refusant le tiers payant généralisé, les médecins ont donc simplement la connaissance des réalités que, dans le confort de votre ministère, vous ne voulez pas voir, madame la ministre, parce qu’il s’agit pour vous de prendre une décision emblématique, symbolique, dont vous voulez tout simplement faire votre marqueur.

En réalité, l’argument que vous avancez, selon lequel le reste à charge ou l’absence de tiers payant serait un frein à l’accès aux soins, ne tient pas. En effet, certains dispositifs existants – la couverture maladie universelle ou CMU, la CMU complémentaire, l’AME, l’aide pour une complémentaire santé ou ACS, le régime des affections de longue durée ou ALD – permettent d’appliquer le tiers payant intégral et d’assurer le libre accès aux soins pour tous. Et s’il faut, à titre exceptionnel, prendre un cas particulier en considération, les praticiens le font tous ; vous le savez aussi bien que nous tous.

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