Intervention de Jean-Louis Touraine

Séance en hémicycle du 3 avril 2015 à 15h00
Modernisation du système de santé — Après l'article 5

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Louis Touraine, rapporteur de la commission des affaires sociales :

Ce matin, Mme Greff nous appelait à prendre des mesures importantes et non des mesurettes. Je réponds à ses voeux en vous proposant que la vente de tabac ne soit plus autorisée aux générations nées après janvier 2001. En effet, le tabac ne peut pas être vendu aujourd’hui à ces jeunes qui sont mineurs mais il me semblerait souhaitable que cette mesure perdure au-delà de leur majorité. L’hécatombe liée au tabac est encore plus grave que nous le pensions car les dernières données publiées dans la presse internationale scientifique de haut niveau font état de 90 000 morts liés au tabac par an en France, ce qui représente 1 million de Français tués par le tabac en onze ans. Nous ne pouvons rester indifférents.

Il est important de suivre les recommandations aussi bien du Gouvernement français, que de l’Organisation mondiale de la santé ou de la Ligue contre le cancer, qui nous demandent d’évoluer vers un monde sans tabac. Or, il est difficile d’interdire ou de limiter la consommation des personnes actuellement très dépendantes. Plutôt que de risquer les conséquences néfastes d’une prohibition ou d’une action liberticide, je vous propose de s’adresser à des gens qui ne sont pas encore victimes de cette addiction grave qu’est le tabagisme, à l’instar de ce qui se discute en ce moment même en Grande-Bretagne, en Tanzanie et dans beaucoup d’autres pays. Définissons les conditions dans lesquelles peu à peu notre pays pourra sortir du tabac.

La mesure permettra à terme de protéger des générations entières et sauvera 1 million de vies de Français tous les onze ans. L’enjeu est crucial.

À elle seule, vous le savez, la mortalité liée au tabac est plus importante que celle liée aux accidents de la route, aux drogues, à l’alcoolisme, aux suicides, au SIDA réunis. Pour cette première cause de mortalité évitable, nous devons prendre des décisions à la hauteur des enjeux.

Je propose que l’on adopte cette mesure qui ne prendra sa pleine effectivité que lorsque les enfants d’aujourd’hui seront devenus adultes, ce qui laissera quatre ou cinq ans aux buralistes et au Gouvernement français pour organiser cet avenir qui verra la vente du tabac se réduire et les profits qui en découlent s’amenuiser.

Je sais que certains jugeront ce projet utopique mais ils pensaient la même chose, il y a quatre ans, de ma proposition de loi relative aux paquets neutres qui est aujourd’hui adoptée en Australie, en Irlande, en Grande-Bretagne et qui le sera demain en France.

J’espère qu’il en ira de même de ma proposition d’aujourd’hui et qu’à l’avenir, il paraîtra beaucoup moins fou de sortir du tabagisme que de se résigner à une telle mortalité et une telle morbidité en restant les bras croisés.

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