Intervention de Catherine Coutelle

Séance en hémicycle du 8 avril 2015 à 21h45
Modernisation du système de santé — Article 17

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCatherine Coutelle, présidente de la délégation aux droits des femmes :

Au cours de ce débat, nous nous sommes écoutés : continuons ainsi. Je pense que ce soir, malheureusement, dans cet hémicycle, les femmes qui ont avorté n’ont pas beaucoup eu la parole. Certains de mes collègues ont cité des femmes, en s’appuyant sur un article du journal Le Monde ayant compilé les témoignages de soixante-dix femmes. Parmi ces témoignages, trois sont d’une tonalité différente des autres, mais la très grande majorité d’entre eux sont semblables à celui-ci : le délai de réflexion « sous-entend que nous, femmes, lorsque nous décidons d’avorter, n’avons pas réfléchi, pas pesé le pour et le contre, en mesurant notre responsabilité, et qui demande un grand courage. » Une autre femme écrit : « c’est comme si la loi me disait : tu es sûre ? tu es sûre ? Je l’avais perçu à l’époque comme une ingérence moralisatrice dans la mise en oeuvre d’une décision que j’avais déjà prise après mûre réflexion. » Cet article mentionne près de soixante-dix témoignages semblables, mais on pourrait en trouver bien d’autres.

Ce que nous voulons dire, c’est que lorsqu’une femme veut avorter, sa décision a été mûrie. Certes, il y aura encore des femmes qui ne sont pas sûres, mais je ne suis pas certaine que vous compreniez bien comment les choses se passeront après l’entrée en vigueur de cet article. Quand une femme décidera d’avorter, elle se rendra chez un médecin ou chez une sage-femme – car, si les délais sont respectés, cela pourra être un avortement médicamenteux. À ce moment-là, elle recevra une information : cela fait partie du plan présenté par Mme la ministre. Les agences régionales de santé devront faire passer à tous les médecins des informations.

Supposons que cette femme tombe sur un médecin qui fait jouer sa clause de conscience, et refuse de pratiquer l’avortement. Que fera ce médecin ? Il fermera sa porte, et la femme s’en ira ? Non, il devra lui donner les informations nécessaires pour qu’elle puisse avorter dans un endroit où elle sera accueillie. La première visite est donc une visite d’information.

Ensuite, cette femme prendra un deuxième rendez-vous pour pratiquer l’avortement lui-même. Il est bien évident que cela n’aura pas lieu dès le premier rendez-vous. Elle ne pourra pas avorter simplement après avoir pris un rendez-vous par téléphone – à condition qu’on ne l’ait pas culpabilisée par téléphone, parce que cela arrive encore, à de nombreuses reprises, nous en avons des témoignages. Cette femme prendra donc un deuxième rendez-vous, avant lequel elle aura à sa disposition toutes les informations sur les différentes modalités d’avortement. Cela n’est pas au médecin de choisir les modalités de l’avortement, c’est à la femme, en conscience, de choisir si elle veut un avortement médicamenteux ou instrumental – sachant qu’il y a des délais pour l’un et pour l’autre. Je vois M. Debré qui me fait signe qu’il y a des délais : il a parfaitement raison, mais il faut que les choses soient bien expliquées à la femme concernée, car un moment vient où l’on ne peut plus pratiquer l’IVG.

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