Intervention de Bernard Thibault

Réunion du 17 avril 2015 à 9h00
Groupe de travail sur l'avenir des institutions

Bernard Thibault :

Il ressort de l'excellente introduction de M. Winock retraçant l'évolution du bicamérisme dans notre pays que le débat sur le Sénat s'est toujours naturellement construit autour de ce qu'était l'Assemblée nationale. De fait, dès lors que l'on réfléchit à de possibles évolutions des prérogatives ou des missions du Sénat, il convient de réfléchir également à de semblables évolutions d'autres institutions de notre République, notamment de l'Assemblée nationale.

D'un point de vue pratique, je me demandais, monsieur Jeanneney, si nous nous référions aux mêmes études en ce qui concerne la composition socioprofessionnelle du Sénat, et j'aimerais savoir ce que vous pouvez nous dire sur ce point.

Parmi les évolutions possibles du Sénat, vous avez évoqué l'éventualité qu'y soient représentés certains groupes sociaux et professionnels. La pratique syndicale peut être très différente au sein des différents pays de l'Union européenne, ce que la lecture des constitutions de ces pays permet d'observer. Ainsi, en Allemagne, le président du seul syndicat du pays, le DGB (Deutscher Gewerkschaftsbund, ou confédération allemande des syndicats) – qui est systématiquement un homme, je le souligne au passage –, se voit-il reconnaître le statut de grand électeur et participe-t-il, à ce titre, à l'élection du Président de la République allemande. Comme on le voit, chez nos voisins d'outre-Rhin, la représentation syndicale se voit institutionnellement conférer une place très différente de celle qu'elle occupe chez nous.

Alors qu'en Autriche on peut être à la fois dirigeant d'une confédération syndicale de salariés et député, il me semble qu'en France les statuts de toutes les confédérations syndicales de salariés interdisent une telle pratique. Au-delà d'une simple différence d'ordre administratif ou juridique, on touche là en fait à la conception même de la mission syndicale, découlant de l'histoire des relations entre le syndicat et le politique, propre à chaque pays. L'évolution que vous proposez ne consiste donc pas simplement en un changement institutionnel, mais en une véritable révolution de conception concernant le syndicalisme lui-même.

Enfin, je voulais souligner l'interaction entre le Sénat et le CESE. Si je m'interroge au sujet d'un Sénat qui pourrait pour partie intégrer une représentation socioprofessionnelle ès qualités, il me paraîtrait intéressant de revaloriser le rôle du CESE, notamment en revoyant sa composition : ainsi, ce que vous suggérez au sujet de l'élection des membres du Sénat pourrait s'appliquer à ceux du Conseil, et il est permis d'espérer que, rendue plus représentative, cette assemblée ayant la faculté de s'autosaisir, et censée éclairer le Parlement et le Gouvernement, serait davantage mise à contribution qu'elle ne l'est actuellement. En d'autres termes, la faible représentativité du CESE diminue considérablement la puissance qui pourrait être la sienne.

Vous avez évoqué le fait que le CESE servirait de maison de préretraite à des syndicalistes…

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion