Intervention de Joseph Thouvenel

Réunion du 6 mai 2015 à 9h00
Commission des affaires sociales

Joseph Thouvenel, vice-président confédéral de la CFTC :

La CFTC est globalement favorable au projet de loi, tout en étant consciente que si la modernisation du dialogue social est bonne pour notre économie, elle n'en constitue pas pour autant une révolution susceptible de créer tous les emplois dont nous avons besoin. Ne nous leurrons pas. Les négociations entre partenaires sociaux se sont soldées par un échec, lié sans doute au manque de temps. Un sujet d'une telle importance et d'une telle technicité demande un travail de fond et l'aide d'experts : démonstration a été faite que trois mois ne suffisaient pas pour cela.

On a beaucoup parlé, avant ces négociations, des questions de seuil, mais beaucoup moins après, preuve qu'il s'agissait essentiellement d'une stratégie de communication : les seuils, en effet, comptent pour quantité négligeable dans les problèmes que rencontrent nos entreprises. M. Alexandre Saubot, le représentant du patronat dans la négociation, dont je tiens à saluer ici les qualités de négociateur – c'est un homme avec qui il est possible de parler franchement et, si les négociations ont échoué, ce n'est certainement pas de sa faute –, a récemment expliqué sur BFM TV qu'en tant que chef d'entreprise, le principal problème auquel il était confronté était les 8 200 obligations qu'il devait remplir. Nous avons vérifié : en réalité, il est soumis à 8 900 obligations, dont aucune n'est sociale ; elles sont fiscales et environnementales.

Pour en revenir au projet de loi, nous considérons que la création de commissions paritaires permettant aux salariés des très petites entreprises (TPE) d'être représentés à l'extérieur de l'entreprise est une bonne chose. Se pose néanmoins la question de leur composition. Il est question d'y faire siéger dix représentants des employeurs et dix représentants des salariés, lesquels se répartiraient proportionnellement à l'audience régionale obtenue par leur organisation aux élections professionnelles dans les TPE. Or la CFTC refuse de valider des élections auxquelles ne participent que 10 % des salariés concernés, ce qui s'explique en partie par le fait que nous n'avons pas obtenu des pouvoirs publics de bénéficier de tous les moyens – accès aux médias, panneaux d'affichage – nécessaires à une véritable campagne électorale pour l'organisation de ces élections. Nous demandons donc que sur les dix représentants des salariés, cinq soient issus des organisations syndicales interprofessionnelles représentatives.

Nous pensons, par ailleurs, qu'il conviendrait d'élargir les missions de ces commissions pour y inclure, d'une part, la conciliation qui, organisée au niveau régional, départemental ou au sein du bassin d'emploi, permettrait d'éviter bon nombre de procédures contentieuses, et, d'autre part, la gestion d'oeuvres sociales, dont les salariés des TPE ne bénéficient pratiquement pas.

Nous sommes favorables à l'idée de marier dans une DUP, pour les entreprises de cinquante à trois cents salariés, le CE, les délégués du personnel (DP) et le CHSCT, dès lors que sont maintenues dans leur intégralité les missions, les prérogatives et les moyens de ces trois instances : malheureusement, la notion de moyens ne figure pas dans le texte de loi. Cela étant, c'est une mesure de bon sens, tout comme la fusion des instances par accord majoritaire dans les entreprises de plus de trois cents salariés, qui va dans le sens d'une simplification de la représentation.

Nous saluons également la valorisation des parcours professionnels des représentants syndicaux, tout en souhaitant qu'elle soit étendue, au-delà des délégués syndicaux, à l'ensemble des personnes occupant des fonctions de représentation dans l'entreprise.

Enfin, nous ne sommes pas contre la possibilité de faire appel à des représentants mandatés en l'absence de délégué syndical. Cela étant, nous estimons que la négociation doit, à un moment ou à un autre, aboutir devant la commission paritaire de branche, qui joue un rôle de filtre en validant, ou non, les accords atypiques. Certes, toutes ces commissions ne fonctionnent pas, mais celles pour qui c'est le cas ont fait la démonstration de leur utilité. Quant aux branches qui ne sont pas capables de mettre en place des commissions paritaires qui puissent valider ces accords, il n'y a qu'à leur interdire la signature d'accords atypiques !

Quoi qu'il en soit, nous ne doutons pas que ce projet de loi, auquel je redis que nous sommes globalement favorables, pourra être encore amélioré par voie d'amendements.

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