Intervention de Marylise Léon

Réunion du 6 mai 2015 à 9h00
Commission des affaires sociales

Marylise Léon, secrétaire nationale de la CFDT :

Un des enjeux de ce projet de loi est notamment le regroupement des IRP. La CFDT n'est pas attachée à l'organisation actuelle des IRP, qui n'est pas toujours adaptée à la réalité des entreprises. Le problème est que le nouveau cadre proposé par ce texte risque de ne pas l'être non plus.

Pour autant, le cadre ne fait pas tout. À partir des règles qu'il établit, il appartient aux représentants du personnel et aux employeurs de définir, au sein de chaque entreprise, un mode de fonctionnement propre des instances représentatives. Le véritable enjeu aujourd'hui est de parvenir à articuler les questions sociales, économiques et environnementales, traitées séparément par les différentes instances. Le CE, par exemple, a déjà des prérogatives en matière de conditions de travail et d'organisation de celui-ci, mais elles ne sont pas de même nature que celles du CHSCT. Pour ce qui concerne la CFDT, ce travail de coordination se fait dans le cadre des sections syndicales d'entreprise, sachant néanmoins que, bien souvent, les décisions du CHSCT sont subordonnées aux décisions économiques et financières prises dans une autre instance.

Le regroupement des instances n'est pas forcément un problème, mais la capacité des mandatés à assumer un nombre très important de missions dépendra de la façon dont fonctionnera la future DUP élargie. Le fonctionnement du CHSCT est particulier, dans la mesure où, du fait de la responsabilité de l'employeur, qui a une obligation de résultat en matière de sécurité, son travail est basé sur la coconstruction, ce qui influe sur les relations sociales au sein de cette instance. Il faudrait que ce mode de fonctionnement puisse s'étendre aux questions économiques, domaine dans lequel les représentants du personnel ont tendance à être considérés comme des intervenants moins légitimes. Il y a là un réel enjeu, dont nous avons commencé à nous saisir avec l'accord sur la sécurisation de l'emploi.

En ce qui concerne l'annualisation et la mutualisation, je ne partage pas l'analyse selon laquelle elles augmenteraient de 15 % les heures de délégation. Aujourd'hui, il existe un nombre défini d'heures de délégation. Ces heures doivent être prises mensuellement et ne peuvent être mutualisées que dans le cadre du CHSCT. Le fait de les annualiser permettra simplement aux militants et aux représentants du personnel de prendre l'ensemble des heures qui leur sont allouées. Actuellement, on estime à 30 % le taux d'heures de délégation non utilisées, soit à cause des congés d'été, soit du fait des contraintes d'organisation du travail, soit encore parce que certains employeurs déploient des stratégies visant à empêcher les militants de prendre toutes leurs heures. Nous demandons donc non seulement que les moyens horaires soient maintenus mais également qu'ils puissent être mutualisés, c'est-à-dire répartis entre les représentants, et annualisés. Cela permettrait une meilleure visibilité et simplifierait la vie des entreprises, en substituant à un suivi mensuel de ces heures un suivi annuel. Pour éviter que des représentants ne prennent toutes leurs heures d'un coup, on peut envisager de fixer un plafond limitant à une fois et demie ou deux fois le quota mensuel le nombre d'heures de délégation pouvant être utilisées sur un mois.

Pour ce qui concerne les suppléants, leur statut est différent en fonction des instances : les DP suppléants ne siègent pas, tandis que les suppléants au CE le peuvent. Cette possibilité est précieuse aux yeux des organisations syndicales car, non seulement elle permet à ces suppléants d'acquérir une bonne connaissance des dossiers, mais elle constitue de surcroît une première étape vers la prise d'un mandat. C'est un moyen de pousser les jeunes vers les organisations syndicales et les instances du personnel en leur mettant le pied à l'étrier et en leur offrant une sorte de formation continue, à laquelle ils n'ont pas accès aujourd'hui.

La CFDT n'est pas favorable à l'inversion de la hiérarchie des normes. Si nous considérons qu'il faut donner de la marge de manoeuvre aux entreprises, les accords d'entreprise doivent s'inscrire, selon nous, dans le cadre défini par la loi ou les accords de branche.

Nous sommes, par ailleurs, extrêmement attachés à préserver le rôle des organisations syndicales dans le dialogue social, qu'il s'agisse de la négociation collective ou de la représentation du personnel. Dans cette optique, le fait que les représentants soient mandatés par une organisation syndicale est pour nous une garantie, non seulement sur le contenu de la négociation mais également sur le fait que le mandaté sera correctement accompagné par l'organisation qui l'a désigné.

En l'absence de mandatement et si la négociation est menée par des élus non syndiqués, nous recommandons un minimum de contrôle social, lequel peut être assuré par des commissions paritaires de validation des accords. Certes, celles-ci, quand elles existent, ne fonctionnent pas toujours bien, souvent du fait des organisations patronales, mais les maintenir peut être un moyen d'inciter les employeurs à considérer que leur intérêt est plutôt d'avoir recours à un salarié mandaté qu'à un élu non syndiqué.

La CFDT est très attachée à ce que les représentants respectent la parité et s'est d'ailleurs dotée en interne d'un plan d'action Mixité.

Vous nous avez interrogés sur la manière d'inciter les salariés à voter massivement. Si le nombre de salariés syndiqués est ce qu'il est dans notre pays, je rappelle néanmoins que la participation aux élections professionnelles est supérieure à 60 %, soit une forte mobilisation, et que, par ailleurs, l'action des organisations syndicales bénéficie à l'ensemble des salariés, qu'ils soient syndiqués ou non. C'est ainsi que 93 % d'entre eux sont couverts par une convention collective. Cela est rarement mis en avant, ce qui plaide pour une meilleure valorisation de l'action syndicale.

Nous sommes favorables à la création de la prime d'activité. Quant au compte personnel d'activité, il s'est invité de façon un peu surprenante dans ce projet de loi. Nous y sommes également favorables, à condition toutefois que nous prenions le temps de discuter de ce qu'il contiendra.

En ce qui concerne les intermittents, je ne reviendrai pas sur la question de la représentativité patronale, qui a fortement perturbé les dernières négociations. Nous sommes opposés aux dispositions portées par ce projet, car elles remettent en cause la solidarité interprofessionnelle du régime d'assurance-chômage. La CFDT défend la sécurisation des parcours et refuse de voir sanctuariser dans la loi un modèle qui risque d'aboutir à une généralisation de la précarité. En outre, nous nous interrogeons sur la manière dont seront désignées les organisations syndicales et patronales représentatives de l'ensemble des professions du spectacle.

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