Intervention de Geneviève Roy

Réunion du 6 mai 2015 à 9h00
Commission des affaires sociales

Geneviève Roy, vice-présidente de la Confédération générale des petites et moyennes entreprises, CGPME, chargée des affaires sociales :

Je commencerai par vous dire ce que pense la CGPME de l'article 1er du projet de loi, qui tend à créer des commissions paritaires interprofessionnelles au niveau régional. Notre organisation s'y est toujours opposée, parce que, dans nos entreprises, le dialogue est direct. Deux tiers des entreprises de moins de onze salariés ne comptent que cinq salariés. Par conséquent, quand on a quelque chose à dire au patron, il suffit de pousser sa porte, voire d'aller le trouver dans l'atelier. Institutionnaliser la démarche au travers de ces commissions va, à notre avis, détériorer ce dialogue direct.

Les salariés membres de ces commissions seront issus des TPE-PME. Pour une entreprise qui compte moins de cinq salariés, ce sera une personne de perdue, entre les réunions de cette commission et les cinq heures en plus du temps consacré à ces séances – sauf « circonstances exceptionnelles » dont on ne sait d'ailleurs pas grand-chose. Cela veut dire que la force de travail s'en va, que le chef d'entreprise ne peut pas l'en empêcher. De ce point de vue, nous n'avons rien à redire ; simplement, cela pose un problème d'organisation. Imaginez une entreprise dont le seul salarié serait membre d'une commission ! Le problème est donc énorme en termes d'organisation et de fonctionnement de l'entreprise.

Pour l'instant, ces commissions n'ont que deux missions : informer les salariés et les employeurs, et parler de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC). Pour ce qui est de l'information, nous pensons préférable de la laisser aux syndicats de salariés et aux branches. Quant à la GPEC, si c'est une bonne chose de s'intéresser à la formation et aux conditions de travail, là encore, les branches étaient en capacité de le faire, même si elles s'organisaient en filières.

Nous ne souhaiterions pas voir ajouter une mission de médiation, ou plutôt de conciliation. Si cette mission était inscrite dans la loi, le chef d'entreprise risquerait d'être contraint, par le médiateur ou le conciliateur, de donner des documents qu'il peut ne pas avoir envie de communiquer.

Il y a aussi une ambiguïté sur la composition du collège patronal. La répartition entre les trois organisations interprofessionnelles se ferait à l'aune de la représentativité régionale, sauf que, jusqu'à maintenant, personne ne l'a mesurée. Cela reste, pour la CGPME, un problème important de représentativité.

Nous avons aussi une difficulté avec le financement des cinq heures supplémentaires : le texte ne le prévoit pas et aucune ligne budgétaire correspondante n'existe au fonds de financement des organisations professionnelles d'employeurs et syndicales de salariés. Nous sommes donc dubitatifs et restons très opposés à cette partie du texte.

Les articles 13 et 14 entament une rationalisation des consultations et des négociations. C'est un petit pas sur lequel nous mettons quelques bémols. Le point le plus important pour la CGPME – aider les entreprises à passer de quarante-neuf à cinquante et un salariés – n'est pas traité. Le texte ne prévoit rien s'agissant des trente-quatre obligations liées au passage de ce seuil, qui doivent toujours figurer dans le rapport au comité d'entreprise (CE). Il ne traite pas non plus de la superposition de ces obligations avec celles prévues par la base de données économiques et sociales (BDES). Nous aurions aussi souhaité voir évoluer les choses sur ce point. On nous dit que cela relève du domaine réglementaire. C'est une manière de botter en touche s'agissant d'un élément essentiel pour permettre de faire grandir les entreprises.

La nouvelle délégation unique du personnel (DUP) est un petit pas qu'il faut relativiser. L'exposé des motifs énonce clairement que toutes les institutions, les compétences et les missions demeurent, que les moyens actuels des élus seront globalement préservés, et l'article L. 2326-4 en est la traduction. Il y aura peut-être moins de réunions, mais il ne s'agit que d'un petit allégement. Nous aurions souhaité que le texte aille plus loin.

D'autres dispositions ne vont pas forcément dans le sens de la simplification. Ainsi, à l'article 15, relatif à la négociation en l'absence de délégué syndical, avant de négocier avec un élu du personnel comme le prévoit actuellement le code du travail, l'employeur devra négocier en priorité avec un représentant élu du personnel mandaté par une organisation syndicale. Cette disposition nous semble alourdir et rigidifier le code du travail.

La CGPME n'oppose pas les très grandes entreprises aux plus petites – le tissu économique a besoin de toutes –, mais il faut comprendre qu'une entreprise de plus de 300 salariés ne se gère pas comme une plus petite. Si l'on peut imaginer laisser l'accord d'entreprise aux premières, pour les secondes, le niveau pertinent est celui de la négociation de branche.

Nous avons donc un regard extrêmement posé sur l'article 1er. Les autres articles constituent un tout petit pas dans le bon sens, mais je le répète, nous regrettons que le texte ne soit pas allé plus loin.

La partie du projet de loi concernant les intermittents du spectacle, avec son dispositif en trois temps, est d'une lourdeur extrême. D'abord, les confédérations définissent un document d'orientation, donnant notamment une trajectoire financière mais pas d'enveloppe fermée – ce qui, pour nous, était un point important. Ce document est ensuite envoyé aux représentants patronaux et salariaux des secteurs employant des salariés intermittents du spectacle, pour servir de base aux négociations. Après quoi, les confédérations interprofessionnelles se prononcent sur l'accord obtenu, l'approuvant en tout ou partie ou le repoussant. Dans ce cas, on renvoie à une négociation classique. Au moment où l'on parle de simplification, on aurait pu se passer d'une telle lourdeur !

J'en arrive au compte personnel de prévention de la pénibilité. Nous ne voyons pas en quoi l'article 19 clarifie certaines obligations. Nous souhaiterions savoir ce que vous pensez introduire dans la loi pour assouplir ce dispositif, que nous avons beaucoup de mal à appliquer, que ce soit dans les grandes entreprises ou les TPE-PME, les chefs d'entreprise se refusant à devoir tracer tous les jours la durée d'exposition aux risques de leurs salariés. Cela reste un sujet extrêmement compliqué dans les entreprises que nous représentons.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion