Intervention de Pierre Burban

Réunion du 6 mai 2015 à 9h00
Commission des affaires sociales

Pierre Burban, secrétaire général de l'Union professionnelle artisanale, UPA :

Les salariés ne sont pas des problèmes pour les entreprises ; ils sont leur richesse.

Par ailleurs, c'est une évidence qu'il est plus difficile de dialoguer directement avec le patron dans une grande entreprise que dans une petite. Mais ce n'est pas le chef d'une entreprise du CAC 40 qui gère le personnel et les complexités du droit du travail. Le droit du travail issu des années 70-80 est très complexe, car on imaginait à l'époque que l'avenir, c'étaient les grands groupes. On voit aujourd'hui que ce n'est pas le cas. Nos amis syndicalistes salariés se plaignent de ne pas pouvoir recruter d'adhérents dans nos entreprises, mais ils ont laissé le terrain en jachère, pensant de la même façon que tous les bons économistes. Or les deux chocs pétroliers ont inversé la tendance, et les grands groupes sont en train de fondre en termes d'effectifs salariés, en particulier dans l'hexagone. Même s'il faut mettre un bémol en cette période de crise, la création d'emploi se fait dans les petites et très petites entreprises.

Nous avons l'expérience des CPRIA et, sans penser détenir la vérité, nous estimons que c'est le meilleur moyen. Il ne faut pas faire peur. Trop souvent, en droit, on veut construire des palais, alors qu'il faudrait commencer par construire des maisons. Le système dont nous avons pris l'initiative fonctionne bien et se développe. Restons pragmatiques : apprenons déjà aux représentants des petites entreprises à dialoguer avec les représentants des salariés, et on fera oeuvre utile. Le dialogue social n'est en rien contrarié dans ces catégories d'entreprises. D'ailleurs, dans le préambule de l'accord du 12 décembre 2001, ce dialogue est qualifié de direct. Et très souvent, les salariés ne veulent pas d'intermédiaire. Dans certaines entreprises de plus de onze salariés où le DP est obligatoire, ils disent même élire ce délégué comme si c'était celui de l'employeur, préférant discuter avec le patron en cas de problème personnel ou de rémunération. Le dispositif est adapté, il organise un nécessaire dialogue complémentaire de ce dialogue naturel pour tout ce qui touche aux questions de formation et de conditions de travail.

Le monde économique n'est pas celui des Bisounours. Les TPE sont confrontées à la concurrence et aux difficultés de recrutement malgré un chômage très important. Aujourd'hui, il faut offrir aux salariés un environnement, sinon identique à celui qu'ils trouveraient dans les grandes entreprises, au moins similaire. Le dialogue direct et la hiérarchie moins lourde sont des atouts pour les petites entreprises. Et, à travers ces commissions paritaires, nous avons mis en place des dispositifs d'activités sociales et culturelles, qui permettent d'améliorer l'attractivité des postes que ces catégories d'entreprises peuvent offrir.

Pourquoi n'élever le seuil qu'à vingt-six salariés et pas à quarante-neuf ? Nous serions tout à fait d'accord pour aller jusqu'à quarante-neuf, mais nous vivons dans un pays de symboles et on pourrait nous reprocher de vouloir supprimer les DP – en tout état de cause, compte tenu des constats de carence, on n'enlèverait pas grand-chose. Il est vrai qu'en portant le seuil à vingt-six, on en créerait un nouveau. Pas tant que cela en réalité, puisque de vingt-six à quarante-neuf salariés, ce sont deux délégués du personnel que l'on élit.

S'agissant du passage de quarante-neuf à cinquante salariés, je vous demande de raisonner de manière pragmatique. Alors qu'à quarante-neuf personnes, il faut deux délégués du personnel, dès qu'on franchit le seuil de cinquante, c'est le grand soir ! De deux délégués du personnel, on passe à huit, mais on doit aussi élire un CHSCT, un CE, voire un délégué syndical. Je ne parle pas là par idéologie. Aujourd'hui, plus l'entreprise est petite, plus elle doit faire d'efforts par rapport à une grande entreprise. Il faut donc s'interroger, sachant que beaucoup d'entreprises de cinquante salariés ne sont pas dans les clous du code du travail.

Pour ce qui est de laisser les représentants entrer dans l'entreprise, cela reviendrait à leur reconnaître la faculté d'y dicter leur loi. Ce n'est pas ainsi qu'il faut procéder, mais bien, comme l'a dit Alexandre Saubot, en instaurant un dialogue basé sur la confiance entre représentants des entreprises et représentants des salariés. Il faut y aller de manière pragmatique et dans un esprit constructif. Chaque année, nous réunissons l'ensemble des représentants salariés et patronaux des CPRIA et nous faisons le bilan. À voir le dernier en date, le système fonctionne, il est constructif et les idées n'y manquent pas.

S'agissant de la composition des commissions, pourquoi imposer par la loi que les représentants des organisations syndicales de salariés soient issus obligatoirement des entreprises de moins de onze salariés ? Une solution pratique serait d'augmenter le seuil. Certes, il est plus facile de laisser partir un salarié dans une entreprise qui en compte quarante-neuf que lorsqu'on n'en a qu'un. Mais je pense qu'il faut aussi laisser la responsabilité aux organisations syndicales de salariés. On ne peut pas dire qu'il y aura une influence de l'employeur puisque ce sont les confédérations syndicales qui vont désigner les représentants. Ce sera à elles de les choisir dans ces catégories d'entreprises, ce qui évitera le blocage du système qui arrivera nécessairement si l'obligation est faite par la loi.

J'aurai un avis plus nuancé sur la représentativité patronale, à propos de laquelle la loi du 5 mars 2014 a fait l'objet de nombreux débats. Il me semblait que l'on tenait compte du nombre de salariés, et l'UPA estime que c'est totalement légitime. Faut-il revoir cette loi alors qu'elle n'est pas appliquée ? La procédure va s'enclencher à partir de 2017, à la proclamation des résultats sur la base des cotisants 2015. C'est donc aujourd'hui que tout se joue. Revenir sur cette loi, pourquoi pas s'il le faut, mais il faudrait peut-être lui laisser le temps de s'appliquer.

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