Vous devez être identifié pour donner une opinion sur cet élement

Intervention de Georges Fenech

Réunion du 20 mai 2015 à 10h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGeorges Fenech, rapporteur :

Afin d'éviter toute confusion, je voudrais apporter une explication au sujet de l'application de la loi dans le temps. Il ne faut pas confondre les lois pénales de fond et les lois de procédure. Les premières s'appliquent pour l'avenir sauf lorsqu'elles sont plus douces – c'est la rétroactivité in mitius. Les lois de procédure sont en revanche d'application immédiate : c'est ce qu'énonce l'article 112-2 du code pénal selon lequel sont applicables immédiatement à la répression des infractions commises avant leur entrée en vigueur les lois relatives à la prescription de l'action publique et à la prescription des peines, lorsque les prescriptions ne sont pas acquises. Avant 2004, cette règle s'appliquait sauf lorsque les lois avaient pour résultat d'aggraver la situation de l'intéressé mais cette précision a été supprimée. Autrement dit, les lois de procédure sont d'application immédiate. Quel serait l'intérêt de faire une réforme qui s'appliquerait dans cinquante ans ? Sur ce sujet, la seule discussion qui aura sans doute lieu portera sur les crimes de guerre. Il nous faudra nous rapprocher de la Chancellerie pour travailler ce point.

Je voudrais revenir sur ce qu'a dit Philippe Gosselin, qui voit un paradoxe entre les notions de droit à l'oubli, que l'on revendique aujourd'hui, et de devoir de mémoire. Je ne vois pas de paradoxe. Le droit à l'oubli s'applique lorsque le coupable a été identifié : une fois qu'il a payé sa dette, il peut bénéficier de l'oubli. Dans l'hypothèse où l'individu n'est pas identifié, la société et la victime se souviennent du crime. Il n'y a donc pas de paradoxe.

M. Philippe Houillon a évoqué l'affaire d'Outreau – il avait été rapporteur de la commission d'enquête, vous vous en souvenez – qui a été l'objet d'une erreur judiciaire. La question de la prescription ne se pose pas en la matière.

M. Houillon a surtout insisté sur la notion de justice moderne et s'est demandé s'il était normal que l'on puisse juger vingt-cinq ans après les faits. Cela pose en effet la question de la lenteur de la procédure judiciaire et des nullités. Le problème a été soulevé par le premier président de la Cour de cassation et par M. Van Ruymbeke. Il y a des réflexions à la Cour de cassation et au tribunal de grande instance de Paris sur le sujet. Nous leur avons d'ailleurs appris qu'ils menaient des réflexions parallèles. Aujourd'hui, il faut réfléchir aux moyens de lutter contre l'usage abusif des moyens de nullité. Lorsque le juge clôture son instruction, il fait face à une avalanche de moyens de nullité formés par des avocats spécialisés. Ce sont des moyens dilatoires et la procédure est prolongée de dix-huit mois, deux ans, trois ans… J'en profite pour dire au président de la commission des Lois que nous serons amenés, avec Alain Tourret, à le solliciter de nouveau pour travailler sur ce sujet.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion