Intervention de Monique Orphé

Séance en hémicycle du 26 mai 2015 à 21h30
Dialogue social et emploi — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMonique Orphé :

Ces avancées marquantes vont en impulser beaucoup d’autres, longtemps après l’inscription du droit de grève et du droit syndical dans le préambule de la Constitution de 1946 et la loi sur les conventions collectives de 1950. Les avancées sociales ont notamment été marquées par la volonté d’instaurer une véritable citoyenneté au sein de l’entreprise.

Force est de constater que, malgré les nombreuses réformes accomplies, les relations sociales restent encore trop souvent tendues, la méfiance régnant entre les salariés et le patronat. Telle est la raison d’être du projet de loi, que nous examinons aujourd’hui, visant à rendre plus performant le dialogue social dans l’entreprise et soutenant l’activité et le retour à l’emploi.

Il s’inscrit également dans cette volonté de développer de nouveaux rapports sociaux dans le monde du travail en améliorant la qualité du dialogue social et en garantissant de nouveaux droits aux salariés, notamment les plus modestes. Ce projet de loi répond à la fois à une exigence démocratique et à une exigence d’efficacité économique.

C’est donc un texte de progrès social : il garantit la représentation de tous les salariés, il vise à soutenir l’activité des travailleurs modestes avec la création de la prime d’activité, il tend à favoriser le retour à l’emploi et poursuit l’effort engagé pour sécuriser les parcours professionnels des travailleurs, qu’ils soient en emploi ou en recherche d’emploi.

Dans les départements d’outre-mer en général et à La Réunion en particulier, le tissu économique est assez spécifique. Il est composé en grande majorité de très petites entreprises. En 2010, sur les 44 500 établissements recensés, 39 000 sont des micro-entreprises et emploient donc moins de 10 salariés. Ce texte va fortement affecter la vie des petites entreprises ultramarines et donner à un nombre important de salariés une représentation syndicale par la création des commissions régionales interprofessionnelles.

Je m’attacherai à développer ici trois dispositions du texte qui, je le pense, apporteront de réelles avancées pour les populations ultramarines.

La première est inscrite dans le titre Ier, relatif à l’amélioration de l’efficacité et de la qualité du dialogue social au sein de l’entreprise. En France, 4,3 millions de salariés de très petites entreprises étaient privés d’une représentation, ce qui signifiait concrètement qu’ils n’avaient pas de conseils et d’informations sur leurs droits, qu’ils n’avaient pas accès à la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, et ne disposaient pas de lieu où débattre des questions relatives aux conditions de travail et à la santé au travail.

Désormais, le texte de loi met fin à cette inégalité entre salariés d’entreprises de tailles différentes avec une disposition qui sera applicable à l’outre-mer et bénéficiera à une proportion plus importante de salariés ultramarins que de salariés métropolitains. En effet, à La Réunion, 95 % des entreprises emploient entre 3 et 10 salariés et représentent 30 % de l’ensemble des salariés du privé alors que cette proportion est de 19 % dans l’hexagone.

Cependant, si cette nouvelle mesure marque une avancée en matière de dialogue social, des spécificités locales doivent également être prises en compte et traitées. Je parle notamment de l’application de conventions collectives ou d’accords de branche non étendus à nos territoires.

La deuxième disposition du texte à laquelle je souhaite me référer relève du titre III, relatif à la sécurisation des parcours et au retour à l’emploi.

Permettez-moi de rappeler tout d’abord que le taux de chômage moyen dans les départements d’outre-mer s’élève à 25,4 % et que les jeunes de moins de vingt-cinq ans sont parmi les publics les plus fragiles. À La Réunion, si la courbe du chômage s’est stabilisée voire inversée pour ces derniers, la situation est plus préoccupante pour les plus de cinquante ans, qui restent pénalisés par leur âge même quand ils ont de l’expérience.

Le projet de loi crée le contrat de professionnalisation « nouvelle chance » adapté aux besoins des demandeurs d’emploi de longue durée peu qualifiés et qui sera plus long que le contrat de professionnalisation classique. C’est une opportunité pour faire face au chômage endémique ultramarin et une formidable possibilité pour ces personnes éloignées depuis de longues années de l’emploi de se former correctement et ainsi de rompre avec la spirale de l’exclusion et de la précarité.

La formation est un des enjeux majeurs de ce nouveau dispositif et nous avons une obligation de résultat pour que ce soit une réussite. J’aurai l’occasion de soutenir trois amendements sur ce sujet, dont le premier propose que le Gouvernement remette un rapport évaluatif concernant l’impact de ce nouveau contrat sur la situation des demandeurs d’emploi de longue durée.

Je souhaite terminer mon intervention en évoquant la création de la prime d’activité, fruit de la fusion entre la PPE et le RSA activité, en saluant le travail mené par Christophe Sirugue. Cette avancée dans la modernisation de la protection sociale engagée par le Gouvernement est favorable pour les territoires ultramarins, très touchés par les bas revenus. La prime d’activité va donc concerner les départements d’outre-mer.

Je présenterai deux amendements qui ont obtenu le soutien du Gouvernement : un amendement technique sur le travail indépendant en outre-mer et un amendement ayant pour objet de ramener de dix-huit mois à six mois le délai d’adoption de l’ordonnance étendant et adaptant la prime d’activité à Mayotte.

La réforme occasionnant des gagnants et des perdants, j’aimerais vous poser la question suivante, monsieur le ministre : pourriez-vous me confirmer que la prime d’activité ne sera ni imposable ni intégrée dans le calcul des aides au logement ?

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion