Intervention de Christophe Léonard

Réunion du 27 mai 2015 à 20h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristophe Léonard :

Dans le contexte budgétaire serré qui est celui de la France, la LPM pour les années 2014 à 2019 du 18 décembre 2013 a fixé le cap à suivre pour doter notre pays d'un modèle d'armées cohérent et opérationnel. Conformément aux réflexions issues du Livre blanc de 2013 sur la défense et la sécurité nationale, ce cap a tenu compte du contexte international complexe et de la nécessité de corriger la trajectoire incertaine de la LPM précédente. La LPM 2008-2014 incarnait en effet pour beaucoup un contre-exemple puisqu'elle s'est traduite non seulement par des militaires au moral en berne du fait du logiciel de paie Louvois, responsable de milliers d'erreurs dans le versement des soldes, mais également par la désorganisation chronique des soutiens, la sous-dotation des bases de défense aux conséquences néfastes pour la vie quotidienne des soldats, la dérive haussière de la masse salariale avec sur la période 2009-2012 une augmentation de 3 % de la rémunération militaire globale quand, parallèlement, les effectifs baissaient de 9 %, le report de charges cumulé à la fin de 2012 de trois milliards d'euros et, enfin, un déclassement capacitaire en matière de drones et de ravitailleurs en vol, comme l'ont souligné nos interventions en Libye et au Mali.

Savoir où l'on va est une chose, mais savoir d'où l'on vient n'est pas inutile quand il s'agit de mesurer le travail déjà accompli avec la LPM 2014-2019 du 18 décembre 2013. Les données chiffrées l'attestent : la LPM initiale a sanctuarisé le budget à hauteur de 190 milliards d'euros courants jusqu'en 2019. Ce sont 30 millions d'euros investis chaque année dans les études amont et la recherche technologique, 17 milliards d'euros annuels d'investissement militaire et 17 000 jeunes recrutés tous les ans par une armée dotée de 225 avions de chasse, de quatre sous-marins nucléaires lanceurs d'engins, d'un porte-avions nucléaire, de quinze frégates de premier rang, de six sous-marins d'attaque, des capacités d'entrée en premier dans les trois milieux terrestre, aérien et maritime et de forces spéciales renforcées qui passent de 3 000 à 4 000 hommes, sans oublier, en matière de cyberdéfense, le lancement de satellites d'écoute électromagnétique CERES et la livraison de drones MALE – moyenne altitude longue endurance – puis tactiques. Ma liste n'est pas exhaustive.

Cette programmation initiale était susceptible de s'adapter aux menaces extérieures et intérieures. Son actualisation avait été prévue avant la fin de l'année 2015 : nous y sommes. Les attentats de janvier dernier ont rappelé que la France constituait une cible de choix pour le terrorisme. C'est pourquoi le Président de la République a ordonné le déploiement de l'armée sur le territoire national dans le cadre de l'opération Sentinelle et effectué des arbitrages pour réduire les déflations d'effectifs dans l'armée et donner notamment davantage de moyens aux services de renseignement.

Tel est l'objet du projet de loi d'actualisation de la LPM pour les années 2015 à 2019 que nous examinons ce soir.

Pour la première fois dans l'histoire, une LPM verra ses crédits augmenter en cours d'exécution. Le principe des ressources exceptionnelles est par ailleurs abandonné au bénéfice de véritables crédits budgétaires. Le texte prend également en compte une autre décision du chef de l'État, relative à l'intégration républicaine des jeunes en difficulté, puisqu'il instaure à titre expérimental un service militaire volontaire complété par l'appel renforcé à la réserve via l'assouplissement des conditions d'emploi des réservistes. Le Gouvernement profite en outre de cette actualisation pour se mettre en conformité avec la jurisprudence de la CEDH du 2 octobre 2014, enjoignant de reconnaître aux militaires le droit d'association – à ne pas confondre avec le droit syndical qui demeure interdit pour des raisons d'opérabilité des armées et de constitutionnalité.

En données chiffrées, ce texte acte une augmentation du budget de la défense de 3,8 milliards d'euros sur la période 2015-2019 par rapport à la trajectoire initiale, portant les crédits à 162,41 milliards contre 158,61 milliards d'euros courants : 2,8 milliards seront consacrés aux emplois, 500 millions à l'entretien programmé des matériels et 500 autres millions à des opérations d'armement. Il prévoit également une réduction de la déflation des effectifs de l'armée de 18 750 équivalents temps plein (ETP), l'adoption d'un nouveau contrat de protection permettant notamment le déploiement dans la durée de 7 000 hommes sur le territoire national – chiffre qui peut monter jusqu'à 10 000 –, la fixation des effectifs de la force opérationnelle terrestre à 77 000 hommes au lieu des 66 000 prévus initialement, le renforcement des effectifs dans le domaine du renseignement et de la cyberdéfense d'au moins 2 000 personnes, un effort important sur les équipements clés fortement mis à contribution, qu'il s'agisse des hélicoptères Tigre, des avions ravitailleurs et de transport militaire MRTT et C-130, des bâtiments multimissions et de soutien ou des capacités satellitaires.

Pour les députés du groupe SRC membres de la commission de la Défense et des forces armées, il est incontestable que la LPM initiale et son actualisation 2015-2019 traduisent la volonté du Président de la République, et donc de la France, d'élaborer depuis 2012 une stratégie de défense claire pour notre pays.

C'est pourquoi nous soutenons sans réserve ce projet de loi.

Enfin, à titre personnel, j'invite notre commission à réfléchir utilement à la doctrine d'emploi de nos forces dans le cadre de l'opération Sentinelle ainsi qu'à nos partenariats stratégiques et politiques dans le cadre de notre politique ambitieuse d'exportation d'armements au travers de l'avion de combat Rafale.

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