Intervention de Catherine Lemorton

Réunion du 3 juin 2015 à 9h30
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCatherine Lemorton, rapporteure :

Monsieur Bapt, une expérimentation est en cours en Poitou-Charentes qui conduit à rémunérer, sur le FIR, l'établissement des certificats de décès à hauteur de quatre-vingt-dix euros. Il conviendra d'évaluer cette expérimentation.

S'agissant de la différence de rémunération, selon les régions, de l'effection et de la régulation, il faut savoir que les problématiques territoriales sont différentes. Lorsqu'une jeune femme médecin libéral accepte en Picardie, qui souffre de pénurie médicale, d'assurer la régulation, il est normal qu'elle gagne davantage que ses confrères qui refusent de l'assurer et restent chez eux. Qu'elle touche 120 euros par heure pour une prestation de six heures ne me paraît pas injustifié. Il convient toutefois, vous avez raison, d'évaluer les différentes tarifications.

Madame Le Callennec, l'opposition, en 2009, souhaitait la création d'une agence nationale dont le rôle aurait été de coordonner toutes les ARS : c'est la majorité de l'époque qui n'en a pas voulu. Cette instance nous fait aujourd'hui défaut.

S'agissant du coût des urgences, je tiens tout d'abord à souligner le fait que nos concitoyens n'abusent pas de celles-ci. Ils ne se déplacent pas la nuit sans raison. Il a été observé une augmentation de 30 % de la fréquentation des urgences depuis 2003, c'est-à-dire depuis que les médecins n'ont plus l'obligation d'exercer une garde. Comment ne pas faire le lien ? Quand bien même nos concitoyens connaîtraient les coûts respectifs de la permanence des soins ambulatoires et des urgences, si aucun médecin de garde ne peut s'occuper d'eux, ils iront aux urgences.

Il faut savoir qu'en 2013, 118 points d'accueil d'urgence relevaient d'établissements de santé privés à but lucratif sur un total de 734. On dénombrait par ailleurs aux alentours de 580 points d'accueil relevant d'établissements publics de santé, pour lesquels ce service fait partie intégrante de leur mission.

Monsieur Touraine, vous avez raison, il faut améliorer l'information des futurs médecins dans leur cursus et déverrouiller les obstacles empêchant les médecins remplaçants de participer à la permanence des soins ambulatoires. Le rapport insiste aussi sur la nécessité de développer la coordination médicale et paramédicale entre les EHPAD. Les acteurs doivent être davantage responsabilisés.

Madame Orliac, vous avez évoqué la disparité des enveloppes FIR : celles-ci, comme je l'ai dit, font l'objet d'une discussion en PLFSS puisqu'elles constituent désormais un sous-objectif de l'ONDAM. Il convient de les évaluer région par région.

Monsieur Sebaoun, vous avez raison, les associations de permanence de soins des médecins libéraux comme SOS Médecins présentent quelques défaillances en termes de régulation. Il suffit d'un appel pour déclencher le départ d'un véhicule. La Cour des comptes l'a déjà signalé. Je tiens à rappeler que, dès 2003, il a été souligné que l'instauration du volontariat avait pour contrepartie le contrôle de l'État. Le manque de régulation au sein des associations de médecins pose un vrai problème.

Monsieur Perrut, les patients ne vont pas par plaisir à l'hôpital : ils préféreraient sans aucun doute être accueillis dans une permanence de soins ambulatoires où ils n'auraient pas à attendre deux ou trois heures avant d'être pris en charge. L'attractivité financière n'est donc pas la seule raison pour laquelle les services des urgences des hôpitaux sont embouteillés. Si nos concitoyens s'y rendent, c'est soit parce qu'ils n'ont pas d'autre solution soit parce qu'ils n'ont pas l'information nécessaire pour faire appel à la PDSA.

Madame Delaunay, vous avez bien expliqué le problème des EHPAD.

Le risque de dérive des transports sanitaires existe, c'est vrai. Néanmoins, il convient de résoudre le problème d'accès à une MMG en l'absence de tout moyen de locomotion ou si la personne n'est plus capable de conduire, comme c'est le cas pour une simple entorse, par exemple. Je ne suis pas certaine que nous devions nous reposer sur la solidarité entre voisins : ce serait un peu jouer à la roulette russe – souvenons-nous de la canicule de 2003. Notre système repose sur la solidarité nationale, qui doit jouer à plein.

Monsieur Richard, la régulation est également pratiquée par des médecins libéraux dans les centres 15 – j'ai cité l'exemple d'un jeune médecin picard. Ces médecins intègrent ces structures la nuit et pratiquent la régulation aux côtés de leurs confrères hospitaliers.

M.Door et moi-même en sommes convaincus : il faut développer les pratiques avancées. Madame Boyer, vous avez évoqué l'article 51 de la loi HPST. Chacun ici connaît le poids des corporatismes dans le système de santé : ils s'opposent à toute avancée en matière de transfert de tâches. C'est ainsi que les gynécologues s'opposent à tout transfert d'une de leur compétence aux sages-femmes, le collège des oto-rhino-laryngologistes (ORL) s'est opposé à la délégation aux pharmaciens des diagnostics rapides des angines à streptocoques, il a fallu reculer sur la vaccination par les pharmaciens prévue dans le cadre du projet de loi de modernisation de notre système de santé – ma liste n'est pas exhaustive. Nous manquons tous de courage devant le corporatisme médical, et ce, alors même que les professionnels de santé pourraient se former dans le cadre du développement personnel continu pour acquérir de nouvelles compétences.

Vous avez raison : il faut savoir si l'argent de la permanence des soins ambulatoires est bien distribué.

Madame Poletti, au sein de cette commission, beaucoup de députés, de droite comme de gauche, sont derrière vous. Je peux vous communiquer un récent sondage IPSOS : 91 % de nos concitoyens identifient un problème de mauvaise répartition des médecins sur le territoire et 71 % aimeraient de ce fait les priver de la liberté d'installation. J'envoie un message au corps médical : lorsque l'opinion des Français se retournera, du fait qu'ils solvabilisent le système et qu'ils auront besoin d'un médecin près de chez eux, la bataille ne dépendra plus des députés : elle sera perdue. Les élus devront répondre à la population. Je vous remercie, madame Poletti, de votre intervention – je suis du reste heureuse qu'elle provienne de vos bancs. Je rappelle que, pour ma part, je n'ai fait que rappeler le message que le Président de la République et la ministre de la santé délivrent depuis 2012. Je pense que si tous les groupes parlementaires avaient pu, sans pression, examiner la proposition de loi visant à limiter la liberté d'installation des médecins déposée par M. Folliot, de l'Union des démocrates indépendants, et signée par certains députés du groupe des Républicains, elle aurait été adoptée. Je le dis comme je le ressens au sein de nos murs.

Madame Iborra, c'est vrai, l'installation des médecins a un coût. Il est vrai, aussi, que le déplacement des médecins n'est pas la seule réponse, ce qui ne fait que mettre davantage en lumière l'importance de la régulation, dans le cadre de laquelle nos concitoyens sont bien soignés : il faut le leur faire comprendre. Un président de syndicat m'avait affirmé que la régulation était pratiquée gratuitement : non, la régulation, qui permet d'éviter des visites et donc des dépenses, a un prix. En Picardie, je le rappelle, elle est rémunérée entre quatre-vingt-dix et cent-vingt euros de l'heure.

Vous avez eu raison de réitérer votre demande de mission d'information. Le champ que vous avez défini est peut-être insuffisamment large. Il pourrait être envisagé une mission courte de trois mois.

Monsieur Barbier, votre propos n'avait rien de corporatiste : il entre dans le cadre de l'article 51 de la loi HPST. Leur maillage territorial permettrait aux pharmaciens d'effectuer du bon travail y compris dans le cadre de la permanence des soins ambulatoires. Du reste, les commissaires qui, ici, sont pharmaciens, pourraient citer des cas où, sans provoquer d'accident, ils se sont substitués aux médecins à la demande de ces derniers, qui étaient surchargés. Le pharmacien est sous-utilisé en PDSA.

Madame Khirouni, je ne suis pas favorable à l'instauration d'une PDSA spécifique à la pédiatrie. Les parents s'inquiètent facilement pour leurs enfants, surtout la nuit – on peut les comprendre –, et, de plus, ils exercent souvent une pression sur les médecins : pour leur permettre d'aller travailler le lendemain, la crèche doit accueillir leur enfant – toutes les conventions collectives ne prévoient pas de jour d'absence « enfant malade ». La demande d'urgence provient de ces deux causes. Plutôt que d'instaurer une PDSA pédiatrique, il faut insister sur la régulation téléphonique, qui permet de rassurer et conseiller les parents. Un mal de tête chez un enfant n'est pas nécessairement le symptôme d'une méningite.

Madame Bouziane, il existe deux catégories de médecins étrangers : ceux qui sont ressortissants de l'Union européenne et ceux qui ne le sont pas et qui doivent subir des examens, notamment de langue. Des médecins se sont émus que des équivalences de diplômes aient pu être accordées à des médecins étrangers dont les compétences n'étaient pas suffisantes. Faisons attention à ce que de tels cas ne se reproduisent pas.

Madame Le Houerou, je tiens à le répéter : sans poser la question de la généralisation du tiers-payant, il convient de l'instaurer dans les MMG, à charge pour celles-ci, comme l'a souligné M. Door, de se doter des équipements nécessaires.

Madame Boyer, je vous rappelle que les supermarchés ne sont toujours pas autorisés à vendre des médicaments. J'espère que tous les parlementaires, de tous bords politiques, pourront encore tenir longtemps sur le sujet : c'est une question de santé publique.

La délégation des tâches fluidifierait non seulement la permanence des soins ambulatoires mais le système de santé dans son ensemble.

Monsieur Issindou, je n'ai fait, je le répète encore, que rappeler le message du Président de la République : aucune coercition ne sera exercée sur les médecins, en matière d'installation comme de permanence des soins ambulatoires.

Aujourd'hui, l'installation d'une maison de santé pluridisciplinaire qui, aux yeux de certains, constitue l'unique réponse à la désertification médicale, coûte, toutes aides confondues des collectivités territoriales, des ARS, des CPAM et de l'État, entre 500 000 et 2 millions d'euros. Pourrons-nous continuer longtemps encore à en installer ?

Monsieur Liebgott, vous avez souligné avec raison l'intérêt d'une campagne de communication. En direction des personnes âgées, le mieux est d'utiliser le canal de la télévision ou celui de la radio. Toutefois, cette information ne répondra à leur angoisse que si elles ont un médecin à proximité de chez elles, notamment en zone rurale. Il faut savoir qu'un grand nombre de médecins traitants ne prennent pas leur retraite, par devoir.

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