Intervention de Gilles Leclair

Réunion du 24 mars 2015 à 8h30
Commission d'enquête sur la surveillance des filières et des individus djihadistes

Gilles Leclair, préfet, directeur de la sûreté de la compagnie Air France :

Air France, compagnie privée, ne dispose d'aucun moyen pour imposer ses exigences à l'étranger. Si les autorités régaliennes locales s'opposent aux mesures que nous voulons prendre, nous sommes désarmés. La menace de la fermeture de la ligne constitue alors notre seul moyen de pression – nous venons de l'utiliser avec les autorités mauritaniennes qui ont cédé après deux mois de discussions relatives à l'aéroport international de Nouakchott.

Certains pays refusent d'admettre qu'ils n'assurent pas la sécurité de leur aéroport dans des conditions satisfaisantes, même si nous le leur démontrons. Je me suis récemment rendu à l'aéroport international de Port Harcourt, au Nigeria, où Air France prend des mesures de sécurité maximales. La directrice de l'aviation civile locale a tenté de me persuader que ces dispositions n'étaient pas nécessaires en m'emmenant faire le tour des lieux. Nous n'avions pas fait deux cents mètres que nous découvrions un grillage effondré. Plus loin, dans la partie critique de la zone réservée, nous avons constaté que des personnes non badgées n'étaient pas contrôlées au PARIF – « poste accès réservé inspection filtrage ». « Ne vous inquiétez pas : ceux-là nous les connaissons », m'a répondu sans broncher la directrice lorsque je lui faisais remarquer que nous avions raison de prendre des mesures de sécurité.

Il faut faire une différence entre les escales rouges d'Afrique et celles du Proche et du Moyen-Orient. La plupart des pays africains résistent un peu mais finissent par accepter nos préconisations. Certains autres refusent d'entendre parler de mesures complémentaires. On n'imagine pas d'en obtenir à Riyad si cela se révélait nécessaire – ce qui n'est pas le cas aujourd'hui car l'aéroport est bien contrôlé. Actuellement, nous nous battons avec la Tunisie pour renforcer les mesures au PIF.

Le futur décret relatif aux vols entrants nous permettra de disposer d'un argument juridique pour persuader nos interlocuteurs. De la même façon, les Américains nous imposent leurs emergency amendments sous couvert de la réglementation de la Transportation security administration (TSA), l'agence nationale américaine de sécurité dans les transports. Cet été, ce fut par exemple le cas pour le contrôle des batteries de portables, que j'ai déjà évoqué. Le décret permettra d'imposer des critères standards à toutes les compagnies aériennes qui desservent la France – un avertissement pourra être suivi d'une interdiction de vol vers l'Hexagone.

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