Intervention de Marc Trévidic

Réunion du 12 février 2015 à 14h15
Commission d'enquête sur la surveillance des filières et des individus djihadistes

Marc Trévidic, vice-président chargé de l'instruction au sein du pôle anti-terroriste au tribunal de grande instance de Paris :

Il est vrai qu'en 30 ans de lutte anti-terroriste, en France comme ailleurs, on a traité les effets et non les causes de la radicalisation, problème de société. Il faut, bien entendu, que les informations circulent, à condition d'admettre que les gens ne peuvent être étiquetés « radicalisé » ou « non radicalisé » car il y a des degrés et des stades de radicalisation. Dans certains cas le processus est très rapide, lent dans d'autres. On a des moyens d'action à un certain stade de l'évolution, difficilement ensuite. Mais quand quelqu'un est très véhément, les échanges d'informations avec le maximum de personnes sont logiques.

Il est vrai également qu'il ne faut pas se focaliser uniquement sur les maisons d'arrêt, car cette idéologie peut se répandre en de multiples autres lieux. Mais il ne faut pas imaginer que le code pénal peut à lui seul en combattre la diffusion – ce n'est pas parce que l'on fixe des interdits qu'une idéologie ne se répand pas.

Je pense que les djihadistes entreront dans la clandestinité parce qu'ils sont entrés dans une nouvelle phase. À l'effervescence brouillonne qui régnait en Syrie a succédé, avec l'État islamique, et aussi déplaisant que cela sonne à l'oreille, un État qui se structure, avec un territoire, des ressources, une économie, une hiérarchie, une administration et une police islamique. Cet État va, j'en suis certain, créer un service de renseignement et un « service action », et il a les moyens de former efficacement ceux qui en feront partie. Or, nous sommes leur ennemi prioritaire, celui qu'ils veulent abattre, et cela leur est beaucoup plus facile que de viser les États-Unis. Voilà pourquoi ce phénomène se produira nécessairement, que les volontaires se cachent dans la masse de ceux qui rentrent en France ou qu'ils se fassent passer pour des réfugiés syriens. Nous sommes leurs ennemis, ils ont les moyens de nous frapper ; pourquoi ne le feraient-ils pas ? Nous savions travailler ces questions ; maintenant, nous arrêtons tous ceux qui rentrent et, pendant que nous traitons leurs dossiers, j'ai la conviction que des projets d'envergure se préparent.

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