Intervention de Olivier Schrameck

Réunion du 31 mars 2015 à 11h00
Commission d'enquête sur la surveillance des filières et des individus djihadistes

Olivier Schrameck, président du Conseil supérieur de l'audiovisuel, CSA :

L'atmosphère de cette réunion était très positive. Les représentants audiovisuels se sont déclarés heureux d'avoir pu y confronter leurs expériences. Face à des événements inopinés, d'une violence extrême, il arrive en effet que les rédactions se trouvent isolées pour décider de la conduite à tenir. Or cet échange leur a permis de se rendre compte que les problèmes qu'ils avaient eus à résoudre étaient analogues. Par ailleurs, cette réunion n'avait pas du tout été conçue comme une réunion susceptible de les mettre en cause. Encore une fois, j'avais très clairement distingué, à la demande du collège, cette démarche de réflexion professionnelle et la démarche pouvant conduire à des avertissements, voire à des sanctions.

Il s'agissait en outre de savoir si, de son côté, le CSA pouvait utilement compléter une recommandation émise en novembre 2013 sur le traitement des conflits internationaux et des attentats terroristes. La majorité de nos interlocuteurs ont montré une réelle réticence à une intervention a priori du CSA sous cette forme ; ils ont insisté en revanche sur la nécessité d'avoir des indications précises et concrètes de la part des pouvoirs publics. Aux termes de la loi, pendant le déroulement des événements, la compétence revient aux pouvoirs publics, la nôtre ne s'exerçant qu'a posteriori, après visionnage des reportages ou séquences relatifs aux événements. Au cours de la réunion s'est donc posée la question de la répartition des responsabilités entre les rédactions elles-mêmes, qui se réclament de la responsabilité éditoriale, les pouvoirs publics, qui peuvent imposer certaines restrictions, et le CSA, conduit à observer le résultat.

Je signale toutefois que l'autorité judiciaire est intervenue puisque le procureur a donné des consignes dès le premier jour pour qu'on ne divulgue pas l'identité des frères Kouachi – vous vous souvenez qu'on a retrouvé la carte d'identité de l'un d'eux dans la voiture qu'ils avaient abandonnée – et que ces instructions, données vers dix-sept heures, n'ont été respectées que quelques heures. Les représentants des médias que nous avons rencontrés nous ont expliqué que la pression était trop forte pour eux – pour reprendre leurs termes – du fait de la divulgation de ces informations sur les réseaux internet. Aussi, vers vingt et une heures, la plupart d'entre eux avaient-ils donné l'identité des frères Kouachi, décision qui a pu contribuer au changement de la démarche des pouvoirs publics qui, dès lors, ont lancé un avis de recherche fondé sur l'identification préalable des terroristes.

L'approche a donc été très positive, je le répète, mais, par contrecoup, nos interlocuteurs ont été surpris et même quelque peu choqués par le nombre d'observations a posteriori que nous avons faites. Ils ont pu penser que notre volonté de dialogue, de confrontation d'expérience, impliquait une acceptation de tout ce qui s'était passé, ce qui ne nous a pas paru possible au regard des problèmes que j'ai mentionnés.

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