Intervention de Bernard Accoyer

Séance en hémicycle du 11 juin 2015 à 9h30
Maintien des classes bilangues pour l'apprentissage de l'allemand — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBernard Accoyer :

Cette priorité en faveur de l’apprentissage privilégié de la langue du partenaire a d’ailleurs été réaffirmée, quarante ans après, par la déclaration commune franco-allemande du 22 janvier 2003 lors d’une réunion solennelle de nos deux assemblées, Bundestag et Assemblée nationale, à Versailles.

Ainsi, depuis cinquante-deux ans, les pouvoirs publics ont poursuivi une politique volontariste d’apprentissage de l’allemand dans les écoles françaises, ce volontarisme trouvant son pendant outre-Rhin dans les actions d’enseignement du français conduites par l’État fédéral et par les Länder.

L’allemand est la troisième langue vivante enseignée en France, alors que le français constitue la deuxième langue vivante parlée en Allemagne. Les liens ainsi tissés entre les jeunesses des deux pays ont nourri l’espérance de réconciliation, de paix, de développement et de progrès sur notre continent après le cataclysme des deux guerres mondiales.

Deuxième méconnaissance, celle de la richesse et de la diversité culturelles européennes. L’anglais ne peut s’imposer, au détriment de la diversité linguistique européenne, comme la seule langue permettant aux jeunes européens de communiquer entre eux.

Avec la suppression des sections bilangues, que deviendraient les sections européennes, les classes AbiBac dans les lycées, les échanges scolaires et autres types de rencontres de jeunes, les programmes de coopération culturelle, les cursus de l’université franco-allemande ?

Les deux présidents des groupes d’amitié France-Allemagne, Pierre-Yves Le Borgn’, que je salue, et Andreas Jung l’ont rappelé récemment : « Là où la connaissance linguistique réciproque fait défaut, le débat philosophique et littéraire s’essouffle. »

En les citant, je veux aussi avoir une pensée pour notre regretté collègue Andreas Schockenhoff, longtemps président du groupe d’amitié Allemagne-France au Bundestag, inlassable militant de l’amitié entre nos deux peuples et nos deux pays, qui nous a quittés en décembre dernier, trop prématurément.

La troisième méconnaissance est celle des réalités économiques et sociales. L’Allemagne est notre premier partenaire commercial. Après l’anglais, l’allemand est en France, comme en Europe, la langue la plus demandée par les employeurs, à 62 % contre 23 % pour l’espagnol. L’apprentissage de l’allemand constitue donc aussi un formidable atout pour l’emploi des jeunes.

Madame la ministre, mes chers collègues, l’Histoire, la diversité culturelle européenne, l’économie : tout incite, par conséquent, à conforter l’enseignement de l’allemand en France, et non à conforter la suppression des sections bilangues, qui affaiblirait considérablement cet apprentissage par les élèves français.

Ces sections bilangues sont, dans les faits, devenues un outil privilégié, essentiel et incontournable. Depuis dix ans, elles ont indéniablement permis de stabiliser autour de 12 % des effectifs, et même plus, le nombre de collégiens apprenant l’allemand dès la sixième, alors qu’il était en baisse constante au cours des vingt années précédentes. Le nombre des sections bilangues a triplé en dix ans, permettant aux élèves d’avoir, en fin d’études, un niveau comparable dans les deux langues apprises en parallèle.

Madame la ministre, cet atout considérable pour beaucoup de jeunes Français serait pourtant remis en cause. Je ne veux pas croire que cela interviendrait sur la base de préjugés idéologiques, de surcroît infondés.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion