Intervention de François Rochebloine

Séance en hémicycle du 11 juin 2015 à 9h30
Expérimentation d'un service civique de défense — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Rochebloine :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, jamais les militaires n’ont été aussi populaires dans l’opinion publique française avec, selon des enquêtes récentes, 82 % d’opinions favorables. Il est vrai que la contribution de nos armées à notre sécurité collective – extérieure, mais aussi intérieure – est particulièrement déterminante et nous ne pouvons que souligner le professionnalisme, l’engagement et le dévouement dont font preuve nos troupes au quotidien sur de nombreux théâtres d’opérations. C’est d’ailleurs l’occasion pour nous de saluer l’action exemplaire menée par nos hommes, souvent dans des conditions très difficiles et particulièrement exposées. Nous devons également honorer la mémoire de tous ces soldats tombés au champ d’honneur.

Les opérations extérieures conduites par la France au Mali, en Centrafrique et en Irak illustrent actuellement le rôle vital que joue l’armée dans la défense de la liberté et de la démocratie par une lutte sans merci contre la barbarie et le fondamentalisme.

Au-delà de ces opérations extérieures, les Français sont conscients que l’action de nos hommes sur le territoire national est absolument essentielle afin de protéger notre pays contre les menaces terroristes, qui n’ont jamais été aussi élevées qu’aujourd’hui. La République se doit de mener un combat implacable face à ces ennemis, qu’ils agissent sur son sol ou qu’ils se trouvent à des milliers de kilomètres de notre pays.

Toutefois, et paradoxalement, face aux difficultés budgétaires que connaît la France, le premier poste d’économies suggéré par nos concitoyens reste la défense.

Pour sortir de cette apparente contradiction, il est nécessaire de revivifier le lien entre les armées et la Nation – je dirais même qu’il nous faut envisager, dans ce climat de danger et d’incertitudes au plan international, un véritable réarmement moral de notre pays.

La suppression du service militaire, en 1996 – à laquelle, pour ma part, je m’étais opposé –, a mis fin à ce qui, pour des générations entières de Français, a constitué un rite de passage et joué un rôle d’intégration. Ce service militaire tendait à favoriser l’objectif d’égalité en remettant temporairement les compteurs à zéro et il oeuvrait à la fraternité entre des jeunes d’horizons différents par le partage d’une expérience commune.

La fin de cette institution de la République, qui n’était certes plus adaptée dans le contexte d’un redimensionnement et d’une professionnalisation de l’outil de défense, a laissé un vide qui, jusqu’à présent, n’a pas été comblé.

La création du service civique, en 2010, a offert à tous les jeunes volontaires de 16 à 25 ans l’opportunité de s’engager en faveur d’un projet collectif d’intérêt général, avec pour objectif de renforcer la cohésion nationale. Ce dispositif a connu un succès certain et ce sont 150 000 jeunes qui devraient ainsi accomplir leur service civique en 2017.

Nous avons aujourd’hui l’opportunité d’aller plus loin avec la proposition qui nous est faite par M. Fromion. En effet, bien que prévu par les textes, l’accomplissement de missions de service civique au sein du ministère de la défense demeure très faible – moins d’une centaine de jeunes ont accompli un tel service en 2013.

La proposition de loi déposée par nos collègues du groupe Les Républicains vise donc à inclure beaucoup plus largement la défense dans ce dispositif, en expérimentant un service civique de défense. S’inscrivant dans la logique du service civique, mais adapté aux spécificités du milieu militaire, il vise à proposer aux jeunes Français une nouvelle forme d’engagement, sous statut militaire et au service des forces armées.

Ce service militaire renouvelé serait mixte, organisé sur la base du volontariat et dirigé en priorité vers des jeunes en difficulté, qui peuvent tirer le plus grand bénéfice d’une telle expérience d’un point de vue tant professionnel que personnel.

Nous avons des exemples de dispositifs dont nous pouvons nous inspirer. Je pense ainsi au service militaire adapté – le SMA –, qui est un dispositif d’insertion ayant fait ses preuves dans les territoires ultramarins. Il forme à un grand nombre de métiers liés au domaine militaire et remet scolairement à niveau des volontaires de 18 à 25 ans, au nombre d’environ 6 000 par an. Au terme du SMA, chaque bénéficiaire choisit la voie qu’il désire emprunter : intégrer l’armée ou poursuivre un autre projet professionnel. Voilà la réussite.

Ces jeunes, souvent sans formation d’origine, parfois désocialisés, expriment là une volonté de faire évoluer leur situation sociale et professionnelle ; et cette volonté, avec le soutien de l’armée, porte ses fruits : tous les ans, ils sont près de 80 % à s’insérer professionnellement à l’issue de leur service militaire adapté. Dans des territoires où le chômage est un fléau, de tels résultats semblaient inespérés. Pourtant, il s’agit là de l’une des initiatives les plus efficaces pour ces jeunes.

C’est pourquoi il est aujourd’hui essentiel d’élargir en métropole ce dispositif déjà vertueux dans les Outre-mer. À ce titre, ce texte va dans le bon sens et le groupe UDI a également formulé des propositions en ce sens.

Il s’agit de remplir un double objectif : permettre à ces jeunes de s’engager dans une cause citoyenne et les aider à s’intégrer dans la vie professionnelle.

À l’issue de leur service militaire volontaire, ces jeunes pourraient être guidés vers une carrière dans les forces armées ou formés à des métiers actuellement en manque de main-d’oeuvre – ce n’est malheureusement pas ce qui manque. N’oublions pas que la défense joue un rôle fondamental d’ascenseur social, en étant le premier recruteur de personnes non diplômées.

En outre, le projet de loi actualisant la programmation militaire pour les années 2015 à 2019, adopté par notre assemblée ce mardi, prévoit également l’expérimentation d’un service militaire volontaire, qui s’inspire lui aussi directement du SMA. Nous saluons cette démarche du Gouvernement, en de nombreux points semblable à l’initiative du groupe Les Républicains et aux propositions du groupe UDI. Nous nous félicitons qu’un tel consensus se dégage sur les bancs de notre assemblée, sur un sujet qui doit, sans aucun doute, nous rassembler par-delà les clivages politiques.

Alors que plus de 150 000 jeunes sortent chaque année du système scolaire sans qualification et que le chômage des jeunes atteint malheureusement des records, de plus en plus de jeunes se trouvent dans des situations de grande précarité. Il est donc de notre devoir de tout mettre en oeuvre afin que ces derniers retrouvent des perspectives.

À une époque où tant de jeunes manquent de repères et de perspectives, ce dispositif apparaît comme le moyen de redonner du sens et de leur rendre confiance en l’avenir. C’est pourquoi, vous l’aurez compris, le groupe UDF

(Murmures et rires sur divers bancs)

soutiendra la proposition de loi déposée par notre collègue Yves Fromion, particulièrement compétent en la matière.

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