Intervention de Barbara Pompili

Séance en hémicycle du 18 juin 2015 à 16h00
Motion de censure

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBarbara Pompili :

En février dernier, monsieur le ministre de l’économie, vous pouviez encore affirmer avoir réuni, sur chacun des articles de votre projet de loi dans sa version d’alors, une majorité de députés en séance. À défaut d’avoir été toujours satisfaisante, et notamment d’avoir établi des équilibres sur lesquels toute la majorité aurait pu se retrouver, la discussion parlementaire en première lecture avait été – nous l’avions souligné – consistante, respectueuse et, sur un certain nombre de points, fructueuse.

En utilisant l’article 49 alinéa 3, vous reconnaissiez alors une réalité : sur l’ensemble de votre texte, il n’existait pas de majorité dans cette assemblée. Mais, au moins, la discussion sur chacun des articles avait-elle pu se dérouler dans des conditions normales, conformes à la vie parlementaire et respectueuses des droits du Parlement.

En coupant court au processus parlementaire en deuxième lecture, avant même que nous ayons pu mener à bien, en séance, l’examen du texte issu des travaux de la commission spéciale, vous ajoutez au constat d’absence de majorité sur l’ensemble du texte la reconnaissance d’un doute : un doute sur votre capacité à faire adopter sans coup férir toutes les dispositions modifiées depuis.

En effet, le caractère protéiforme du projet de loi, dont nous avions déploré l’absence de cohérence générale, s’est accru au fil du temps. Trois cent cinquante articles, dont une partie réécrite, voire introduite à la hussarde entre l’examen au Sénat et la commission spéciale à l’Assemblée. Comprenez que nous ne puissions pas applaudir l’artifice législatif qui coupe court à la nécessaire discussion au fond et jusqu’au bout, sans laquelle il n’y a pas de travail législatif sérieux.

Vous avez donc, avec ce texte de loi, adopté une méthode artificielle qui consiste à lier entre elles des mesures n’ayant rien à voir les unes avec les autres. Cette méthode se trouve aggravée par les ajouts opérés depuis la première lecture.

Des contenus – souvent contestables – en plus, des capacités d’amélioration parlementaire en moins, l’équation politique n’est pas à somme nulle. Elle est, du simple point de vue démocratique, négative. La philosophie du projet de loi en elle-même et la méthode adoptée ne pouvaient que conduire à une coagulation des oppositions.

Construire un texte fourre-tout, c’était tourner le dos à la recherche de compromis dynamiques. Vous aviez d’ailleurs, comme en préalable, intégré cette réalité en incluant dans votre projet de loi le recours – à nos yeux excessif – à des ordonnances, sur des sujets extrêmement sensibles comme le droit de l’environnement. Un mauvais calcul, car il est clairement contredit par l’expérience. Dans ces domaines, le travail parlementaire et la prise en compte des réalités du terrain permettent le plus souvent une oeuvre législative plus efficiente.

Certes, nous ne méconnaissons pas les avancées et les enrichissements apportés sur ce sujet depuis l’examen en première lecture, ainsi que le retrait du projet d’enfouissement de déchets nucléaires Cigéo, cavalier législatif funeste ajouté au Sénat.

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