Intervention de Dominique Raimbourg

Séance en hémicycle du 24 juin 2015 à 21h50
Adaptation de la procédure pénale au droit de l'union européenne — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Raimbourg, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République :

Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, le texte que j’ai l’honneur de rapporter devant vous est un texte pénal qui a de nombreux aspects.

Il s’agit d’abord, vous l’avez rappelé, madame la ministre de la justice, de la transposition de trois directives pénales – une directive de 2008 sur la probation, une directive de 2009 sur le contrôle judiciaire, une directive de 2009 sur les conflits de compétences – et de textes sur les protections des victimes. Ces textes sont désormais transposés et ils représentent la plus grande partie de ce projet. Ils ont une grande importance symbolique. Ils traduisent l’effort permanent de l’Union européenne pour constituer un droit pénal européen. Ils sont le pendant du mandat d’arrêt européen.

Cet effort permanent pour constituer un droit pénal européen, un droit de procédure pénale européen, ce qui est extrêmement difficile, se traduit dans les textes par la difficulté même de la langue. Si je voulais caricaturer, je vous dirais qu’ils sont écrits en européen et non pas tout à fait en français, avec une lourdeur particulière du style et des périphrases, de façon que chaque terme, chaque membre de phrase puisse être compris dans les différentes langues de l’Union européenne, dans ses différentes institutions et ses différentes procédures. Pour autant, ces textes, d’une grande importance symbolique, nous devons les adopter pour adapter le droit à la réalité européenne.

À cette grande importance symbolique répondra vraisemblablement une faible importance numérique. Ces textes seront d’application assez peu fréquente statistiquement parlant, à l’instar du mandat européen – autour de mille mandats reçus et émis par an.

Au-delà de ce premier volet, le texte que nous vous présentons a aussi pour objet de mettre à jour certains aspects de notre procédure pénale. C’est ainsi qu’ont été adoptées par la commission des recommandations issues de la Cour de cassation visant essentiellement à régler des questions de délai et de point de départ de délais.

Troisièmement, notre commission a adopté des dispositions visant à parfaire nos dispositifs de lutte contre la surpopulation carcérale, à faciliter au procureur de la République le placement sous contrôle judiciaire, à faciliter l’aménagement des peines pour le juge d’application des peines et à étendre les pouvoirs du procureur de la République de citer à un peu plus de distance, pour éviter l’incarcération et faciliter le placement sous contrôle judiciaire.

Quatrièmement, ce texte témoigne d’un souci particulier porté aux victimes, par le biais d’une disposition appelée la « suramende ». Elle est une possibilité pour le juge de prononcer un complément d’amende, allant de 1 à 10 % du montant de l’amende principale, au profit des associations d’aide aux victimes, lesquelles ont bénéficié d’un soutien tout particulier de la chancellerie puisque leurs subventions ont été augmentées, tout comme le nombre de bureaux d’aide aux victimes, qu’elles contribuent très souvent à faire fonctionner. Aujourd’hui, nous sommes très près de couvrir l’ensemble des tribunaux de grande instance. Cela représente un effort très important, quand la situation des victimes doit faire l’objet de toute notre attention.

Cette disposition, qui me paraît nécessaire, avait été adoptée dans la réforme pénale du 15 août 2014, avant d’être annulée par le Conseil constitutionnel au motif qu’il s’agissait d’une atteinte au principe d’individualisation des peines, étant donné que le taux de la suramende était fixe. La rédaction que nous allons vous proposer permet de répondre à cette critique et met le texte à l’abri d’un tel reproche.

Le texte comporte des dispositions d’adaptation relativement à des questions qui se sont posées notamment à l’occasion de l’annulation par le Conseil constitutionnel de la possibilité de prononcer une garde à vue de quatre-vingt-seize heures, dès l’instant où l’on avait affaire à de la criminalité organisée qui ne concerne que des atteintes aux biens. Un certain nombre de possibilités sont rétablies, dans le respect de la décision du Conseil constitutionnel. Il contient également des dispositions diverses, pour que le droit s’applique de la façon la plus semblable possible sur l’ensemble du territoire français. Une proposition d’amendement vise notamment à créer un service pénitentiaire d’insertion et de probation – SPIP – à Saint-Pierre et Miquelon.

Enfin, le dernier volet du texte, qui n’est pas le moindre, est celui dont nous ont parlé Mmes la garde des sceaux et la ministre de l’éducation nationale : la répression des agressions sexuelles à l’encontre de mineurs, qu’elles soient commises au sein de l’Éducation nationale ou dans les institutions, associations ou clubs où l’on s’occupe de mineurs.

Le dispositif vous a été explicité par Mme la ministre. Elle vous en a dit toute la nécessité et combien nous sommes responsables de la protection de ces enfants. Dans les lieux où l’on dispense l’éducation, qu’elle soit nationale, sportive, religieuse ou laïque, dans tous ces endroits, les enfants doivent être en sécurité et à l’abri de prédateurs.

Notre système actuel a fait la démonstration de ses failles contre lesquelles nous devons résolument lutter, tout en nous tenant sur cette ligne de crête si ardue, entre le respect des principes d’une part et d’autre part le souci de ne pas porter gravement atteinte à des personnes qui ne sont pas encore définitivement condamnées et dont une petite fraction pourrait se trouver innocentée au terme de la procédure. Je pense que nos débats nous permettront de trouver cette ligne de crête si difficile à suivre.

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