Intervention de Alain Vidalies

Séance en hémicycle du 12 décembre 2012 à 15h00
Proposition de loi relative aux juridictions de proximité — Discussion générale

Alain Vidalies, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement :

Des questions plus intéressantes ont été soulevées sur de l'avenir des juridictions, et particulièrement de la proximité.

Il apparaît qu'il y a un discours commun à tous les élus, quels que soient leurs engagements, qui révèle une véritable connaissance de ce que sont les besoins de nos concitoyens en matière de justice. Comme je l'ai souligné dans mon intervention liminaire, il existe une forme de rupture entre les généralités sur le fonctionnement de la justice et les questions que posent les « vrais gens », que nous rencontrons dans nos permanences. Ce ne sont pas les dernières modifications de la procédure pénale qui les préoccupent : c'est leur dossier de surendettement qui n'est toujours pas traité et le risque de voir leurs biens ou leur maison saisis, ce qui constituerait pour eux un drame immense. C'est de leur procès aux prud'hommes qu'ils viennent nous parler ; et à cet égard, s'il y a bien une chose inacceptable dans le fonctionnement actuel de la justice, ce sont les délais de jugement dans la justice du travail. Vous me permettrez, pour avoir consacré à ces questions à peu près autant de temps qu'Alain Tourret et pendant autant d'années, de souligner à quel point la situation est devenue impossible – je ne parle pas toutefois pas de ma région où les choses sont à peu près acceptables. Je reçois des lettres, je rencontre des gens qui m'expliquent qu'il leur a fallu deux à trois ans pour obtenir une décision de départition ou une décision de la chambre sociale. Il y a également toutes ces affaires de tutelle, que nombre d'entre vous ont évoquées.

Ce sont à toutes ces questions que renvoient les juridictions de proximité. Bref, la vraie justice pour les vrais gens trouve sa réponse dans la proximité. Et c'est tout à l'honneur de la représentation nationale d'avoir tenu un même discours sur ce sujet.

Je veux maintenant répondre aux divers intervenants sur les engagements pris par Mme la garde des sceaux, qui a mis en place autour de la direction des services judiciaires un groupe de travail chargé de réfléchir à l'évolution de l'organisation judiciaire de proximité, au travers notamment du tribunal de première instance. Les conclusions de ce groupe sont attendues pour juin 2013. Il s'agira d'améliorer fortement le service public de la justice pour permettre aux justiciables de disposer de toutes les offres juridictionnelles à partir de n'importe quel site judiciaire de leur département. Les élus locaux seront bien sûr associés à cette réflexion avant même le débat parlementaire.

Les communes ayant perdu une juridiction du fait de la réforme de 2008 bénéficieront d'une attention toute particulière, au regard de l'impact de la réforme judiciaire sur les bassins économiques et sociologiques. Mme la garde des sceaux se montrera spécialement attachée à la présence du service public de la justice sur tout le territoire et veillera à ce que l'impact de la réforme de 2008 soit des plus limités.

M. Tourret a évoqué des perspectives de réforme, en proposant notamment que les attributions des affaires familiales aillent aux juges d'instance. En fait, cela rejoint exactement, même si votre approche est plus nuancée, la réflexion de Mme la garde des sceaux à travers la création du tribunal de première instance, au plus près de nos concitoyens. J'aurais dû ajouter cette dimension à l'énumération des domaines pris en charge par la justice au quotidien que j'évoquais tout à l'heure. Le groupe de travail prendra bien évidemment cette piste en compte.

Colette Capdevielle a soulevé le problème très préoccupant, sur le plan juridique comme sur le plan humain, des tutelles et de leur avenir. Ayant été le responsable au sein du groupe socialiste de ces questions, je sais qu'on ne parle pas assez de ces questions qui concernent pourtant des centaines de milliers de personnes et qui, par définition, en concernera de plus en plus. La protection des plus faibles : quelle plus belle mission pour la justice que de protéger ceux qui ne sont plus en mesure de se protéger eux-mêmes ! C'est tout l'enjeu de la législation relative aux tutelles, mais aussi des moyens mis à la disposition de ceux qui ont à l'appliquer.

La loi du 5 mars 2007 posant l'exigence d'une révision des mesures de protection a déjà fait l'objet d'un premier report de deux ans dans le cadre de la loi du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit. Les 305 tribunaux d'instance devront faire face avant le 1er janvier 2014 à un réexamen systématique des 731 671 mesures de protection – ce qui signifie qu'autant de personnes au moins sont concernées. Mme la garde des sceaux est bien consciente des efforts des tribunaux d'instance ainsi que des choix que certains ont dû faire pour privilégier tel ou tel contentieux au détriment des autres pour tenter d'être à jour dans ce réexamen des mesures ; cependant, nous respectons trop le travail du Parlement pour annoncer plus d'un an avant l'échéance de ces renouvellements qu'il faudrait recourir à un nouveau report. D'après l'évaluation effectuée par les services de la Chancellerie, nous devrions parvenir au 31 décembre 2012 à un renouvellement de près de 75 % des mesures. Mais il est évident qu'il ne faudra prendre aucun risque juridique : ce pourcentage est une moyenne nationale et il recouvre des situations fort diverses. Un bilan portant sur le dispositif de protection des majeurs doit être effectué. La garde des Sceaux s'est engagée à le mener.

Pour finir, je renouvelle mes remerciements à l'ensemble des orateurs, au rapporteur en particulier, pour avoir participé à ce travail qui honore la représentation nationale. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP.)

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion