Intervention de Gaby Charroux

Séance en hémicycle du 9 juillet 2015 à 9h30
Débat d'orientation des finances publiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGaby Charroux :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure générale, chers collègues, le débat d’orientation des finances publiques constitue l’occasion d’interroger la représentation nationale sur la trajectoire de notre pays en matière de politique économique, financière et monétaire. Vous conviendrez que nous l’abordons dans des circonstances particulières. Comment ne pas évoquer, à l’orée de mon propos, le contexte politique européen et la situation de la Grèce ? Les négociations semblent patiner. Si la Grèce était privée de liquidités, elle se dirigerait vers une faillite financière et une sortie inacceptable de l’euro, que certains appellent néanmoins de leurs voeux.

Dimanche dernier, les Grecs nous ont offert une bouffée d’oxygène en s’opposant de manière ferme et incontestable à une nouvelle cure d’austérité aussi injuste qu’inefficace que les créanciers entendaient leur imposer. Ils nous ont donné une leçon de démocratie en organisant un référendum dans des conditions ô combien difficiles, et ce au nez et à la barbe de toute l’oligarchie financière, économique, politique et médiatique de notre continent, qui ne voulait pas que la parole soit donnée au peuple. Victimes des désastreuses politiques d’austérité, les Grecs nous donnent également une leçon de courage et montrent qu’il est possible, avec de l’audace et de l’ardeur, de changer le cours des choses et de respecter les engagements pris envers les électeurs et la population.

En replaçant la démocratie au-dessus des marchés et de la finance et en plaçant l’humain au coeur d’un projet de société en lieu et place des ratios et autres chiffres comptables, les Grecs montrent aussi un chemin d’exigence aux décideurs politiques que nous sommes vers davantage de démocratie et de respect de la parole politique. Le non massif du peuple grec exprimé par référendum éclaire d’un jour nouveau la situation grecque mais aussi celle de l’Europe. Les positions prises ici même hier par M. le Premier ministre et par tous les groupes de gauche défendant le maintien de la Grèce dans la zone euro le confirment. La dette publique est une question primordiale en Grèce mais elle l’est aussi dans les autres pays européens, dont la France.

Depuis l’éclatement de la crise des subprimes, l’endettement public a considérablement augmenté et atteint dans nos économies occidentales des niveaux insupportables. La France n’échappe pas à ce constat dramatique. La dette publique dépasse désormais le montant vertigineux de 2 000 milliards d’euros. Cette année encore, elle augmentera. Il est prévu un déficit public de l’ordre de 3,8 % du PIB, en amélioration nette mais qui reste à un niveau bien supérieur à la croissance attendue. Outre la question primordiale du montant total de la dette et des déficits publics, il faut évoquer la question spécifique des intérêts de la dette et tirer la sonnette d’alarme. En raison de la faiblesse des taux d’intérêt et de l’hypothèse d’une inflation nulle, le programme de stabilité pour 2015 prévoit une réduction d’environ 2 milliards d’euros de la charge des intérêts des administrations publiques. Nous nous réjouissons d’une telle évolution.

Certes, la France bénéficie actuellement de conditions de financement tout à fait favorables grâce auxquelles elle finance ses déficits à moindres frais, mais pour combien de temps ? Compte tenu de la situation en Europe et de l’état des marchés financiers, il n’est pas exclu et il est même plutôt probable que notre pays soit confronté très prochainement à une remontée des taux qui pourrait s’avérer particulièrement douloureuse. Je citerai afin d’illustrer mon propos les chiffres de l’Agence France Trésor selon laquelle une hausse de 100 points de base de tous les taux d’intérêt en 2015 entraînerait une augmentation de la charge des intérêts de 2,4 milliards d’euros cette année, de plus de 5 en 2016, de plus de 7 en 2017 et de près de 13 en 2020 ! Ces chiffres font en effet froid dans le dos.

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