Intervention de Gilles Carrez

Séance en hémicycle du 9 juillet 2015 à 9h30
Débat d'orientation des finances publiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGilles Carrez, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je regrette qu’il ait fallu attendre le débat d’orientation sur les finances publiques pour avoir enfin quelques précisions sur les six premiers mois d’exécution du budget de 2015.

Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État d’avoir apporté quelques éléments mais ils n’ont fait que renforcer mes inquiétudes, qui sont nourries de la base de 2014 à partir de laquelle ont été établies les prévisions pour 2015 et de ce que vous venez de dire.

D’après ce que nous connaissons maintenant de l’année 2014, c’est une véritable succession d’échecs.

La croissance aura été de seulement 0,4 point quand elle aura été en moyenne en zone euro de 0,9 point.

On avait prévu de baisser le déficit public global à 3,6 points de PIB, on est à 4 points en 2014.

Contrairement à ce que vous avez dit, monsieur le ministre, les dépenses n’ont pas été diminuées en valeur courante. Si l’on sort les éléments extérieurs, la dette d’un côté, les pensions de l’autre, et si l’on prend en compte à leur juste mesure les PIA, on a une petite augmentation. Je reconnais qu’il y a un ralentissement par rapport aux années antérieures, mais nous avons tout de même 850 millions de plus sur le budget de l’État.

Sur les recettes, il y a tout de même une très grande inquiétude. Presque 11 milliards de recettes fiscales ne sont pas au rendez-vous, et cela s’explique, pour les neuf dixièmes d’entre elles, par la croissance spontanée, c’est-à-dire que nous payons l’overdose fiscale, qui induit des modifications de comportement.

Tout cela a entraîné une aggravation du déficit de l’État, d’exécution à exécution, de 10 milliards d’euros.

Les prélèvements obligatoires ont continué d’augmenter, puisque l’on est passé de 44,7 à 44,9 points de PIB, ce qui est tout de même notre record historique. Jamais la France n’avait atteint un tel niveau.

La dépense publique, en comptant, c’est vrai, les crédits d’impôts, dont le CICE, passe de 57 à 57,5 points de PIB. Là aussi, c’est un record historique.

On ne peut donc pas dire que l’on parvienne à faire refluer la dépense. Quand on raisonne en valeur absolue, en 2014, elle a encore progressé d’une bonne vingtaine de milliards d’euros. C’est beaucoup trop rapide.

À partir d’une base 2014 aussi dégradée, notre budget 2015 présente d’énormes fragilités.

Pour la croissance, il est prévu en moyenne 1,5 % en zone euro, et nous sommes à 1,1 %. Nous continuons donc à décrocher par rapport aux autres pays de la zone euro.

Pour le déficit global, vous prévoyez 3,8 points de PIB, contre 4 points en 2014. C’est l’un des efforts les plus faibles, si ce n’est le plus faible, de toute l’Union européenne dans les pays qui sont à plus de 3 %. Il n’y a que la Croatie qui soit dans la même situation que nous. L’effort est donc vraiment extrêmement limité.

Je veux surtout appeler votre attention, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, sur le fait que nous sommes les seuls, pour le budget de l’État à rester en déficit primaire, c’est-à-dire que, lorsqu’on enlève les intérêts de la dette, l’État continue à dépenser davantage qu’il n’a de recettes. Même l’Italie n’est pas en déficit primaire.

Cela conduit à parler d’un aspect que vous n’avez pas évoqué à la tribune, à savoir l’endettement. Notre endettement a fortement progressé à nouveau en 2014 et, à la fin de 2015, nous allons dépasser probablement les 97 % du PIB, ce qui veut donc dire que, au rythme où nous allons et compte tenu des orientations, nous atteindrons très certainement les 100 % du PIB avant la fin de la législature.

L’un des signaux d’ailleurs auxquels il faut être attentif, c’est que nous allons emprunter en 2015 pas loin de 200 milliards d’euros, entre la couverture du déficit…

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