Intervention de Fleur Pellerin

Séance en hémicycle du 14 décembre 2012 à 9h30
Projet de loi de finances pour 2013 — Article 66, amendements 24 251

Fleur Pellerin, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique :

Je reviens à des éléments concernant le modèle financier du CIF, pour compléter ce qu'a dit M. Muet. L'absence de viabilité du CIF est effectivement démontrée, puisqu'il ne parvient pas à se financer seul. Ce n'est pas un problème de fonds propres qui se pose aujourd'hui, mais bien un problème de liquidités. Quant au résultat, faible au demeurant, il est engendré par une prise de risque qui est absolument déraisonnable. Pour l'illustrer, il suffit de constater que la moitié du portefeuille de crédits devra être refinancée d'ici à 2016. Si le coût moyen des nouvelles ressources à lever est supérieur de 50 points de base au coût historique, le résultat du Crédit immobilier de France devient négatif.

Quant à l'impact de l'extinction du CIF sur l'accession sociale à la propriété, je crois qu'il ne faut pas le surestimer. Sa clientèle est certes bien plus sociale que la moyenne des clients des banques, mais le CIF est très comparable, par sa clientèle, à un acteur comme le Crédit foncier de France. En particulier, une large part de la clientèle du CIF n'a rien de social. Enfin, il a une part de marché limitée, y compris sur la frange la plus sociale, où, d'après ses propres estimations, elle est de 20 %, lorsqu'elle est de 50 % pour le Crédit foncier ou de 30 % pour les autres banques mutualistes.

Je tiens à rappeler ici que le Gouvernement est très attaché à la préservation de l'accession sociale à la propriété, et étudie actuellement tous les moyens de s'assurer que la disparition du CIF n'y portera pas atteinte. Cela passe, en premier lieu, par la mobilisation des autres banques, dont il me semble absurde de présumer qu'elles ne pourront pas satisfaire la clientèle du CIF, puisqu'elles servent déjà, pour certaines d'entre elles, une clientèle similaire. Cette préservation passe aussi, bien sûr, par l'entrée d'autres banques sur ce marché. À cet égard, le Gouvernement mène des discussions très actives avec la Banque Postale, qui est un nouvel acteur du crédit immobilier, et qui a annoncé, comme l'a rappelé le rapporteur général, son intention de se développer, notamment dans le secteur de l'accession sociale, et de reprendre une partie des équipes du CIF. La Banque Postale est très bien armée pour ce faire, avec un réseau qui est plus étendu que celui du CIF, avec des conseillers spécialisés en immobilier, et avec les liens qu'elle est en train d'établir avec le logement social et le monde des promoteurs.

L'activité du CIF doit par ailleurs, il me semble important de le souligner, être bien distinguée de celle de ses actionnaires, les SACICAP. La difficulté de financement de leurs missions existe, et elle s'impose à nous dans tous les cas. Quand bien même la poursuite de l'activité du CIF dans le domaine du crédit à l'accession sociale serait envisageable, ce ne serait que sous la forme d'un nouvel établissement, dès lors que le CIF n'est pas viable, comme je l'ai dit. Dans ce contexte, la Commission européenne ne pourrait pas accepter, comme l'indique clairement sa jurisprudence, que les SACICAP ne perdent pas leurs fonds propres, et toute perspective de dividendes. Le Gouvernement, là encore, s'attachera à trouver d'autres moyens de pérenniser les missions sociales des SACICAP, qui sont très importantes. Je souhaite souligner que ces moyens doivent impérativement être déconnectés du traitement du CIF lui-même, afin d'éviter que celles-ci soient considérées comme bénéficiant indirectement d'une aide du CIF. À cet égard, l'exposé sommaire de l'amendement n° 24 fait courir aux SACICAP, dont la plus grande partie de l'activité s'inscrit dans un champ concurrentiel, un risque très important. Tel qu'il est rédigé, cet amendement risque, qui plus est, d'être une source de contentieux avec la Commission européenne. Je ne souhaite donc pas qu'il soit maintenu tel quel, et c'est pourquoi je vous demande à nouveau, monsieur Alauzet, de le retirer, faute de quoi je demanderais à l'Assemblée de le rejeter.

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