Intervention de Colonel Michel Bachette-Peyrade

Réunion du 8 avril 2015 à 10h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

Colonel Michel Bachette-Peyrade, président de l'association nationale des réserves de l'armée de terre (ANRAT :

Je vous remercie de l'honneur que vous voulez bien faire aux personnels militaires de la réserve opérationnelle en leur donnant l'occasion de s'exprimer devant votre commission. Nous y voyons une marque de confiance mais aussi l'intérêt que vous portez à votre armée de réserve.

En tant que président de l'association nationale des réserves de l'armée de terre et vice-président « Terre » de l'Union nationale des organisations de réservistes, cette audition me donne l'occasion d'évoquer les motivations, problématiques d'emploi et préoccupations des réservistes, militaires du rang, sous-officiers et officiers appartenant à la réserve opérationnelle de l'armée de terre.

Au travers des conflits qui ont marqué le XXe siècle et de ceux qui se déroulent aujourd'hui, la réserve militaire a toujours joué un rôle opérationnel significatif, parfois décisif, aux côtés de nos camarades de l'armée d'active pour emporter la victoire.

Il y a donc dans les familles ayant eu un tué, un blessé, un disparu, une fierté d'avoir participé directement ou indirectement à une juste cause. Et c'est tout naturellement, par sympathie, qu'une certaine volonté de servir émane d'une grande partie de notre population, plus particulièrement au profit de nos forces armées. Cela est toujours vrai chez les jeunes générations, sous diverses formes, comme on le constate lors du parcours citoyen.

En résumé, la motivation première du réserviste est de servir, celle-là même qui pousse les jeunes engagés, militaires du rang, sous-officiers ou officiers, à embrasser une carrière militaire. De ce fait, le socle du recrutement existe et, pour peu que l'on pose le problème avec pragmatisme, il est possible de repérer, sélectionner, préparer, recruter, former et employer le volume de personnel de la réserve opérationnelle nécessaire pour atteindre les objectifs fixés par le commandement à la suite des déclarations répétées du ministre de la Défense après les événements du mois de janvier.

Les travaux développés par l'ensemble des partenaires membres du Conseil supérieur de la réserve militaire (CSRM) depuis plusieurs années ont permis d'avoir une connaissance assez précise des problématiques posées par le recrutement, la fidélisation et l'employabilité. Je me limiterai, à titre personnel, à quelques propositions simples concernant l'armée de terre.

En matière de recrutement, ne pourrait-on relancer les préparations militaires terre (PMT) sous une forme qui soulagerait les unités d'active, très employées par les opérations extérieures comme intérieures ? Nos associations nationales ont réalisé cela dans le passé, ce qui en faisait de véritables auxiliaires du commandement.

Pour les PMT généralistes, la sélection et le recrutement seraient réalisés localement. De même, la formation initiale serait encadrée localement par des personnels de la réserve opérationnelle locale. La synthèse serait organisée au plan régional, voire national, sous forme d'une période bloquée validant une qualification générale, dispensée dans un camp militaire.

Pour les PMT spécialisées – parachutisme, montagne, logistique, etc. –, la sélection et le recrutement seraient locaux et la formation dispensée au plan régional, voire national pour les spécialités les plus pointues.

De nombreux cadres, peu sollicités par manque de crédits, seraient volontaires et pourraient voir leur carrière militaire dans la réserve relancée par les activités prémilitaires.

Cette préparation serait visible, homogène, de proximité et pourrait remplacer les préparations découverte et autres préparations dispensées directement par les unités.

S'agissant de la fidélisation, il est admis qu'elle est directement liée à l'emploi des réservistes. La diminution progressive du nombre de jours d'emploi s'est en effet accompagnée d'une augmentation du taux de rotation des personnels, entraînant une situation alarmante de la fidélisation des réservistes de tous grades.

Par ailleurs, la création d'unités de réserves au plan local, notamment dans les « déserts militaires », permettrait d'accueillir les nouvelles recrues issues des préparations militaires.

Compte tenu du fort professionnalisme demandé par les opérations intérieures du type Héphaïstos, Vigipirate ou Sentinelle, il est nécessaire que notre armée de terre d'active fasse preuve de générosité en termes d'appartenance, autrement dit que les qualifications des réservistes – brevets, diplômes, récompenses, décorations – ou tout simplement l'accueil soient les mêmes que pour les personnels d'active, même s'il faut étaler les formations dans le temps.

Est-il besoin de rappeler l'effet désastreux sur la fidélisation que constitueraient de nouvelles réductions budgétaires après la mise en place de projets volontaristes ? Cela pose le problème de la sanctuarisation des budgets consacrés aux réserves dans le temps.

Concernant l'employabilité, la loi sur les réserves prévoit une obligation pour l'employeur de libérer cinq jours par an aux réservistes, avec un préavis d'un mois. Ne pourrait-on passer de cinq jours à deux semaines avec un préavis très court en cas de crise d'une certaine gravité sur le territoire national ?

Il faut susciter la motivation des employeurs et non, seulement, des employés. Il conviendrait, dans la gestion des réservistes, de permettre des « trous » dans leur carrière et des « ponts » pour les franchir, en bref un système très souple, permettant à certains de revenir dans la réserve après un certain temps, avec un grade supérieur éventuel compte tenu de leur activité professionnelle.

Pour prendre en compte la progression civile professionnelle dans le cursus militaire, on pourrait par exemple prévoir qu'une expérience acquise d'encadrement en entreprise soit transposable en tant que telle dans un contexte militaire.

Enfin, on pourrait instiller une approche qualitative dans les notations, à côté de l'approche traditionnelle quantitative particulièrement démotivante en période de réductions budgétaires.

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