Intervention de Michel Liebgott

Séance en hémicycle du 23 juillet 2015 à 15h00
Dialogue social et emploi — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Liebgott :

Nous devons prendre nos responsabilités. Il est trop facile de voter systématiquement contre, comme il est trop facile de proposer la disparition pure et simple de ce très lourd code du travail, ainsi que j’ai pu le lire ici et là.

Vous citiez Nicolas Boileau, monsieur le ministre : « Hâtez-vous lentement ; et, sans perdre courage, Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage : Polissez-le sans cesse et le repolissez ; Ajoutez quelquefois, et souvent effacez. » Dès demain, bien entendu, le Gouvernement continuera de discuter avec les syndicats, car telle est sa marque de fabrique.

Rappelons qu’en 2014, 951 accords ont été passés. Cela ne veut pas dire qu’il faut cesser d’améliorer le dialogue. Il ne faut pas non plus qu’un excès de formalisme, qui freine aujourd’hui et le dialogue et les entreprises – je rejoins ici le point de vue de certains collègues de l’opposition –, le rende inopérant.

Permettez-moi de rappeler les dispositions que nous nous apprêtons à voter pour fluidifier les conditions d’exercice du dialogue social : meilleur agencement des consultations et des négociations, recentrées sur trois temps forts ; meilleure configuration des instances représentatives du personnel en fonction de la taille des entreprises ; délégation du personnel, plébiscitée par 60 % des PME de 50 à 200 salariés où elle fonctionne déjà, étendue aux entreprises comptant jusqu’à 300 salariés, avec un champ de compétence élargi au CHSCT – sans perte de moyens, je le rappelle –, car il est important de ne pas déconnecter les discussions sur les conditions de travail des débats sur la situation économique de l’entreprise – qui pourrait soutenir le contraire ?

Par ailleurs, le texte ouvre le dialogue social à de nouveaux acteurs, les 4,6 millions de salariés des TPE de moins de onze salariés. Cela pourra paraître inapplicable pour certains, excessif pour d’autres. En tout cas, ces salariés pourront désormais être représentés au sein des commissions paritaires régionales interprofessionnelles, les CPRI, et conseillés sur leurs droits et obligations. Qui dira que c’est un recul ?

Enfin, le texte prévoit des mesures de lutte contre la discrimination syndicale et soutient l’engagement syndical, en panne dans notre pays. M. le ministre a dit tout à l’heure tout le bien que l’on pouvait penser de certains aspects du système allemand, et force est de constater que moins de 10 % de salariés sont syndiqués en France contre environ 20 % en Allemagne.

Il ne vous aura pas échappé que notre majorité n’a pas été totalement inactive, c’est pourquoi elle a étoffé ce volet de mesures concernant la place des suppléants, maintenue, si j’ose dire, envers et contre tout, et qui est à nos yeux une amélioration considérable, concernant l’extension des missions des CPRI à la médiation, ou encore la place des administrateurs salariés dans les grands groupes. Sur tous ces points, nous avons progressé par rapport au texte initial. Il faut encore citer la question du burn-out,qui a donné lieu à un large débat, et pour laquelle s’engage peut-être un processus de reconnaissance.

Le deuxième axe du projet de loi, non moins important, établit des dispositifs d’insertion pour les travailleurs les plus en difficulté tout en leur apportant du pouvoir d’achat. Signalons la création du contrat « nouvelle chance », la consolidation du rôle de l’AFP, et, dès le 1er janvier 2016, la mise en place de la prime d’activité pour soutenir le pouvoir d’achat des travailleurs pauvres, ceux qui ne sont pas assez pauvres pour bénéficier des minima sociaux et pas assez riches pour bénéficier des allégements d’impôts que nous avons votés – et que nos concitoyens, qui commencent à recevoir leurs feuilles d’impôts, peuvent constater – pour les premières tranches de revenus en décembre 2015. Cette prime sera servie mensuellement, à partir d’une déclaration trimestrielle dès le premier euro d’activité, elle sera individualisée et concernera potentiellement 5,6 millions d’actifs, dont 1,2 million de jeunes, salariés ou indépendants. C’est donc une disposition très concrète, en monnaie sonnante et trébuchante.

Toujours dans un esprit de dialogue avec les entreprises et les salariés, la loi met enfin en chantier le compte personnel d’activité, qui rassemblera les principaux droits sociaux des salariés – compte pénibilité, compte personnel de formation, etc – et qui les suivra tout au long de leur vie active. Nous donnons ainsi corps à une notion bien connue dans les pays nordiques, la sécurité sociale professionnelle. Un rapport est d’ores et déjà attendu à l’automne prochain pour définir ses contours et son utilisation, et une négociation aura lieu avec les partenaires sociaux en 2016.

Je m’en tiendrai, pour conclure, à ce mot de « négociation » qui caractérise bien nos débats.

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